L’indifférence et la violence destructrice du gouvernement, de l’Etat, du productivisme et du capitalisme se montrent à nouveau en clair. Les institutions, leurs servants et le Capital sont déterminés à laisser crever des activistes en grève de la soif en opposition à un projet écocidaire d’autoroute A69 à Toulouse.
Les exigences de ces écologistes volontaires sont pourtant légères, mais l’Etat et ses institutions criminelles ne veulent pas interrompre un instant la course lucrative des machines qui ravagent la nature pour davantage de bagnoles, de vitesse et de fric.
Trois écologistes sont déjà entre la vie et la mort, mais la présidente d’Occitanie Carole Delga et le ministre des Transports Clément Beaune s’en cognent. Ils préfèrent détruire, bétonner, ravager et tuer, coûte que coûte. La Croissance et l’argent priment sur tout. Tandis que pour le sinistre Darmanin les biens valent autant que les personnes.
(voir en PS : une courte pause a finalement été décidée)
En Drôme et en Ardèche, les autorités locales, Vinci & co, veulent également perpétuer le règne destructeur de la bagnole et du fric. Vont-ils renoncer à leurs projets de merde à St Paul trois Châteaux (échangeur autoroutier), à St Péray (pseudo-déviation et bétonnage complet de la plaine) et à St-Rambert-d’Albon/Villeneuve-de-Vals (échangeurs autoroutiers) ? Quelles modalités vont devoir prendre les luttes pour arriver à contrer ses carnages planifiés et les nombreux autres ?
D’autant que c’est la civilisation industrielle elle-même qu’il faudrait démanteler, et pas seulement stopper quelques unes de ses innombrables avancées destructrices.
- L’Etat et les autorités locales prêts à laisser mourir des militants en grève de la soif, pour une autoroute de plus !
- Thomas Brail hospitalisé pendant sa grève de la soif contre l’A69 - Quelques heures après avoir engagé une grève de la soif, Thomas Brail a été transporté à l’hôpital, inconscient. Si son état est depuis stable, le grimpeur se dit prêt à continuer.
- La grève de la soif contre l’A69, symptôme d’un monde qui se meurt - Les grévistes de la faim opposés à l’A69 ont décidé d’arrêter de boire. Prêts à mourir pour faire plier ce projet écocidaire, ils révèlent la dépendance humaine aux ressources que l’on détruit, raconte notre journaliste dans cet éditorial.
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Il fait 32 °C dans le Tarn, en plein mois d’octobre. Les pelleteuses de l’A69 arasent les collines, arrachent les arbres et façonnent le désert, sous un soleil de plomb. Il y a quelque chose de fondamentalement dystopique dans les temps incertains que nous vivons.
À Toulouse, des écologistes grévistes de la faim annoncent qu’ils sont prêts à mourir. Leur rassemblement pacifique du 4 octobre dernier a été nassé par des gendarmes surarmés. À côté d’eux, et dans une température caniculaire, les équipes municipales installaient les décorations de Noël tandis que les badauds, indifférents, font leur course, les yeux rivés sur leur smartphone.
Dans quel monde allons-nous vivre et comment faire prendre conscience de l’urgence ? Les grévistes de la soif veulent mettre leur corps en jeu pour créer un électrochoc. Leur visage émacié et leur silhouette famélique sont ceux d’une humanité future si nous ne faisons rien, assurent-ils. Il n’y a pas pour autant chez eux un goût particulier pour le sacrifice ou le martyre, mais une détermination sans faille et une sensibilité exacerbée.
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C’est aujourd’hui un fait : la crise écologique ne vient pas nous frapper de l’extérieur. Elle nous touche intimement. Elle nous bouleverse dans notre corps, notre esprit et affecte notre cœur. Et c’est peut-être, là aussi, une vertu de cette grève.
Montrer que nous ne sommes pas extraterrestres à la cause que nous défendons. Nous partageons une communauté de destin avec le vivant et cette situation peut nous ronger de l’intérieur, jusqu’à refuser de nous alimenter, de boire et de manger si des arbres venaient à tomber, des animaux à mourir, des rivières à être asséchées.
C’est quelque chose d’à la fois dramatique et beau. Nous luttons comme si notre vie en dépendait. Comme si un fil nous reliait au reste du monde. En détruisant la Terre, on se détruit soi-même. Moralement, mais aussi physiquement.
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Thomas, Çelik et Reva ont déjà perdu plus de 10 kilos. Ils maigrissent à vue d’œil. Ils commencent à avoir du mal à se tenir debout, ils peinent à trouver leurs mots. Mais ils font face. Ils défient un pouvoir qui vit dans un monde parallèle et obsolète, fait de bitume et de béton armé. Eux rêvent de cabanes dans les bois avec leurs enfants, de forêts verdoyantes, de prairies aux herbes folles.
C’est un combat qu’ils ont décidé de mener jusqu’au bout et qui mérite, malgré notre effroi, notre respect et notre soutien. Leur dénuement est le signe de notre propre détresse. Jusqu’où devrons-nous aller pour faire plier les projets écocidaires ?
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Certaines et certains ont fait d’autres choix, ancrés dans les luttes et les combats collectifs. Au cours de la semaine dernière, une militante a été arrêtée suite au sabotage de véhicules de l’entreprise NGE, le futur concessionnaire de l’A69. Les médias en ont très peu parlé. Mais ce geste est là aussi très symbolique. Plutôt que de se faire du mal à soi-même, en refusant de s’alimenter, les militants ont préféré cette fois-ci viser leur adversaire et le faire reculer, ne pas tendre l’autre joue, mais semer le trouble.
D’autres écologistes usent, et useront sans doute, d’autres moyens de luttes, qui ne mettent pas en danger leur santé, mais causent, et causeront, des dommages matériels conséquents aux appendices vulnérables de la Mégamachine.
Quelques réflexions sur l’idéologie de la non-violence et ses limites :
- L’idéologie de la non-violence en question - Colères inaudibles, privilèges silencieux et bruits de vitrine brisée
- Livre : L’échec de la non-violence (de Peter Gelderloos) - pour une diversité de tactiques - Réflexions critiques sur l’idéologie exclusive du pacifisme et de la non violence et ses effets sclérosants
- La non-violence, une résistance molle écrasée par les régimes autoritaires et policiers - Reporterre parle d’un livre captivant qui critique avec force le dogme de la « non-violence » exclusive et dogmatique