Film The Creator, une grosse propagande pour l’Intelligence Artificielle et son monde robotique voulu par les puissants

Le film The Creator de Gareth Edwards est intéressant pour analyser et comprendre l’idéologie couramment véhiculée autour de l’IA (la rationalité cybernétique frauduleusement nommée Intelligence Artificielle).

A l’heure où ChatGPT déferle partout, quelle que soit l’intention du réalisateur (propagande consciente pour l’IA et son monde, business as usual, colportage inconscient d’une idéologie pro IA, relais culturel du secteur industriel numérique, goût pour le divertissement spectaculaire...), il est intéressant de voir quel est le message porté en pratique par le film.

Film The Creator, une grosse propagande pour l’Intelligence Artificielle et son monde robotique voulu par les puissants

Un robot-Ia du film The Creator

Côté ambiance et esthétique, c’est loin de valoir Dunes ou Blade Runner, même si il y a des beaux passages, intriguants ou spectaculaires.
Ca ressemble surtout à une sorte de film de guerre, avec course poursuite et explosions boumboum.
Ici mon sujet n’est pas le scénario, le jeu d’acteur ou l’esthétique, mais le message sous-jacent, qu’il soit volontaire ou involontaire.

 Dans cet extrait d’interview, l’auteur « avoue » d’emblée apprécier l’IA et être optimiste sur son usage et sa fabrication :
Quand on a commencé l’écriture du film avec Chris Weitz, nous voulions utiliser les IA comme une métaphore de l’autre, de ces étrangers qu’on voit systématiquement comme l’ennemi. Mais la technologie de l’IA nous semblait aussi lointaine que celles des voitures volantes ! Or, nous nous sommes fait rattraper par l’actualité, et c’est devenu un sujet politique. À titre personnel, je veux être optimiste sur l’IA. Sa démocratisation est aussi importante que celle de l’électricité ou...

Le film ne fait pas avancer la réflexion, au contraire. C’est très superficiel et en fait l’IA est présentée comme une bonne chose, et même comme une possible sauveuse et bienfaitrice de l’humanité, qui pourrait stopper le cycle des guerres, rien que ça !

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Les robots d’apparence humaine se multiplient dans le monde réel

Quelques commentaires de séquences du film The Creator

 Au début, on aperçoit des scènes où un système policier et ses robots flics « défendent la paix ». Déjà c’est très orienté de supposer que les policiers « défendent la paix », et il est posé d’emblée que les robots sont « bénéfiques ».

 Dans le film, il est dit quelque part que les IA-robots-humanoïdes sont une « simple suite de l’évolution ». Comme si la sélection naturelle, les choix et évolutions des animaux donnaient forcément des humanoïdes robotiques. Or les gènes et la reproduction ne donnent pas des robots et des « intelligences » numériques, ces robots sont fabriqués par des humains à partir de minerais divers, ils n’émergent pas tous seuls des processus évolutionistes.

 Les robots-IA agissent exactement comme des humains : douleurs face à la mort (des leurs ou d’humains), rites spirituels, prêtres, moines boudhistes, amour (y compris amour humain-robot), etc.
Ce qui paraît pour le moins hasardeux au vue des limites applications existantes, et en tout cas un choix non anodin.

 Avec des images spectaculaires de guerre, et des scènes qui rappellent parfois la guerre du Vietnâm, le film semble jouer sur la culpabilité américaine envers les massacres commis par l’armée us durant ce conflit. Il s’agit sans doute d’humaniser les robots-IA et de mettre les spectateurs de leur côté. Par rapport aux violences des guerres impérialistes et au bellicisme de généraux (très caricaturaux et comme sortis tout droit de la guerre froide) les robots-IA sont présentées comme pacifistes et visant la fin des guerres.
C’est d’ailleurs assez contradictoire.
Car d’un côté les humanoïdes-IA sont décrits comme vivants, évolutifs, douées de conscience et de sentiments, de sens du sacré, donc assez proches des humains, et de l’autre ils seraient forcément sages et pacifistes... Or on constate partout que les êtres doués de conscience sont capables du pire comme du meilleur, mais les robots-IA ne viseraient que le meilleur ?! Comme si une supposée « intelligence » plus importante apporterait la paix et la sagesse.
Les exemples d’humains considérés comme très intelligents et auteurs d’actes horribles, de crimes de masse, de génocides et de tortures sont pourtant très nombreux.
Et puis chacun sait que les nouvelles technologies sont utilisées d’abord pour la guerre et les armements.

On pourrait se dire que c’est juste un film, du divertissement lourdeau, et donc qu’il ne faut pas chercher le réalisme. On peut aussi constater le choix d’une propagande affirmée pour la promotion de la robotique et des IA, une sorte de publicité géante pour le secteur, un clip cinématographique bruyant pour vanter les promesses messianiques de l’industrie techno-numérique et les faire avaler par des foules subjuguées et crédules.

 Dans ce film, les robots-IA aident généreusement des humains orphelins et des affamés, ce sont des sortes de saints humanitaires.
Manquerait plus que ces machines complexes montrées comme « douées de vie » (d’où le titre du film, une personne humains crée une soi-disant nouvelle forme de vie, comme Dieu dans les religions) sauvent le climat et stoppent la destruction de la biosphère par la civilisation industrielle qui les a fait naître !

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Sophia, en 2020

Résumé d’affirmations présentes dans le film

• Les humains sont globalement trop nuls et belliqueux, les robots-IA peuvent faire mieux, ils peuvent apporter la fin des guerres. C’est encore plus énorme que les « super-héros » justiciers des BD !
• Les robots-IA humanoïdes sont forcément bons, sages, pacifistes.
• Ces machines peuvent devenir aussi conscientes et sensibles que les humains, mais en mieux.
• Ces machines sont le fruit de l’évolution naturelle, comme les espèces vivantes.

Ce film qui naturalise les robots s’inscrit dans le solutionisme technologique partout vanté par les oligarques, technocrates et capitalistes.
Plutôt que la démocratie réelle, le partage, la fin de la civiliation industrielle, etc., les dirigeants et puissants font rêver les foules (et parfois rêvent eux-mêmes) à des « solutions » technologiques à la place d’évolutions politiques et sociales positives.
Quand on veut garder le désastreux modèle de société actuel, il est pratique de faire croire qu’on peut le changer et l’améliorer par des nouvelles technologies.
Ainsi les robots-IA seraient la solution technologique miracle qui va résoudre tous les problèmes. Finançons les startups, Google et Microsoft et tout ira bien. La civilisation industrielle qui ravage les mondes vivants, les écosystèmes et le climat va créer par miracle, un jour (après ou avant la destruction totale de la biosphère ??), des robots-IA qui vont sauver le monde des ravages de la civilisation industrielle...?! Toujours ce mythe du progrès technologique salvateur, une croyance absurde et démentie par les faits.

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Une robote en couple avec un humain, dans le film The Creator

Ce film, consciemment ou non, peu importe, vise clairement à faire accepter les transformations technologiques robotico-numériques en cours et à faire la promotion plus large du messianisme du progrès high-tech. La thèse est que seule la course en avant dans le système techno-industriel pourrait sauver l’humanité d’elle-même. Les remises en cause politiques et sociales sont totalement évacuées au profit d’une glorification de la sagesse supposée de robots qui n’existent pas.
On est loin des films plus noirs tels Robocop ou Terminator.
On est loin aussi de la série d’Arte, Real Humans, qui avait le mérite d’interroger plein de sujets de fond (tout en partant du même présupposé de robots devenant « vivants » et conscients).

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Des technologies industrielles du monde machine

Pour creuser ces sujets, sur Ricochets :

• Un robot humanoïde réaliste bientôt en magasin - La série TV Real Humans bientôt dépassée - Est-ce vraiment le monde que nous souhaitons ?
• IA & chatbot : Imiter les machines qui nous imitent, ou rester (redevenir) humain ? - Notre « identité numérique est une pure fiction » qui éloigne des émotions et de la réalité
• Critiquer radicalement la société technologique et capitaliste, pour ouvrir des voies d’émancipation sociale inventant leurs propres techniques - S’émanciper de la domination technicienne et capitaliste, ce n’est pas retourner à la bougie, c’est inventer d’autres techniques, correspondant aux choix collectifs
• Les technologies modernes sont un problème même si on veut en faire un bon usage - Le capitalisme veut aussi récupérer les « basses » technologies, en en changeant le sens

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Une enfant robot, ça passe encore mieux

Occulation des problèmes

Les médias dominants, les oligarques et les techno-capitalistes ne parlent que de certains problèmes liés à l’IA (une rationalité cybernétique à jamais incapable d’une intelligence semblable à celle d’un être vivant, voir les écrits de Eric Sadin, et notamment L’Intelligence artificielle ou l’enjeu du siècle - Anatomie d’un antihumanisme radical).

Le tyran Macron, comme tout les dirigeants, ne veut pas rater le train d’une technologie nouvelle, qui sera vaguement « régulée » une fois mise en application (on voit ce que ça donne avec les pesticides, les OGM, l’énergie nucléaire...). Les impératifs de Croissance, la loi d’airain de la concurrence et de la compétitivé obligent tous les acteurs qui veulent rester dans la course.
Les dégâts sur la biosphère ne sont pas évoqués.
La nécessité d’un système techno-industrielle hiérarchique et autoritaire pour maintenir des technologies aussi complexes non plus.

Les puissants vont plutôt évoquer les drones utiles pour la reforestation, les opérations chirurgicales sous assistance d’IA, la régulation du traffic routier...

Il n’est pas souvent question des énormes quantités d’énergies pour faire tourner les serveurs et les fabriquer, ni des infrastructures électriques et internet nécessaires, ni des minerais extraits au prix de pollutions et de montagnes de déchets.
Les médias dominants ne parlent que des problèmes liés au travail, des risques de prise de pouvoir, des humains pouvant être « dépassés » et déclassés par la puissance des machines. Et les oligarques ressortent les mythologies des comités d’éthique et de la régulation. Et les acteurs puissants en Silicone Vallée qui poussent à fond la robotique et le numérique s’empressent de se poser en sages régulateurs prudents, ...pour faire passer la pilule et garder la main sur tout.
On a vu ce que donnent les tests de pesticides faits par ceux qui les vendent, ou la complaisance de la CNIL concernant toutes les technologies de surveillance et de fichage.

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Une des mines qui alimentent les machines électriques et les IA en lithium

Un monde machine productiviste a besoin de machines complexes, les humains sont superflus et trop coûteux

Les critiques de cinéma que j’ai pu lire ne parlent pas de cette idéologie grossière en faveur du monde machine de l’IA, ils n’évoquent que la forme (souvent surévaluée).
Soit ils sont peu futés, ce qui paraît peu crédible, soit ils sont complices de cette idéologie. Sans doute qu’ils l’ont adoptée et n’y trouvent pas grand chose à redire. Ces fantasmagories sur les évolutions des robots complexes vers des formes de vie supérieures sont sans doute à présent largement admises, voire désirées.

Avant on parlait de déshumanisation. Là on est en train de passer à autre chose, à l’abandon des évolutions sociales et morales positives, à l’abandon des humains dépassés par les machines qu’ils créent, à l’effacement des besoins et possibles humains. D’acteurs (possiblement) conscients en mouvement on devient rouage passif et figés, prisonniers, un jour peut-être inutiles au monde machine, ou décoratifs.
La tyrannie technologique remplace (ou complète, renforce) la tyrannie politico-économique.

Après s’être débarrassé largement du besoin de la force de travail musculaire grâce aux énergies fossiles et aux machines mécaniques, l’industrie productiviste se débarrasse du besoin de capacités cognitives humaines grâce à l’électricité et aux machines numériques.
Et en effet, dans un modèle de société voué à la vitesse, à la Croissance, au productivisme, au virtuel, à l’efficacité techno-monétaire..., les machines sont beaucoup plus adaptées, sobres (« transition » « écologique » oblige) et efficaces que des humains « poussifs » faits de muscles et de cerveaux lents, qui ont besoin d’être éduqués durant toute l’enfance, qui mangent, dorment, se fatiguent trop vite, rêvassent, et même parfois ont le culot de se révolter.

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Les robots réels en usine

Le monde machine, mécanique, robotisé et techno-numérique, est « voulu » par les puissants (les nécessités du modèle social dont ils profitent réclament de toute façon cette voie), mais est-ce le monde et le modèle social que nous voulons ?
Dans les tyrannies précédentes et actuelles, les dominants avaient encore besoin de masses d’humains à leur service, pour la guerre et la production, mais dans un monde machine rempli de robots-IA (de surcroît avec des ressources énergétiques et de matières premières en baisse), les masses populaires sont inutiles, dangereuses, gênantes. Elles font taches dans les smart city végétalisées. A terminer, à éradiquer ou à laisser crever.
Seuls seront nécessaires aux puissants des ingénieurs et des techniciens de maintenance. Peut-être quelques excentriques milliardaires se paieront le luxe de quelques esclaves humains, un peu comme les actuelles espèces exotiques mises en aquarium.

Comme tout le reste, comme les variantes précédentes d’autocraties et de dominations, ce monde de robots agiles, froid et mort, sera imposé par la force et la propagande par les puissants, les médias, les systèmes policiers et les armées (robotisées bientôt) à leur solde. Saurons-nous y résister ? Et pour ça, saurons-nous abandonner les croyances et dépendances qu’ont incorporées en nous et pour leur avantage les médias dominants, les oligarques, l’éducation, les rouages capitalistes ? Saurons-nous démanteler la mégamachine, la civilisation industrielle, qui elle a besoin a tout prix du monde totalitaire des robots-IA pour perdurer ?
Avons-nous encore assez de force et de décence humaine pour le vouloir ?