Avec « Don’t Look Up » et ses stars, le « mouvement climat » et les « écologistes » médiatiques continuent leur propagande pour (tenter de) faire durer la civilisation industrielle (et donc ses ravages) en la décarbonant à coup de technologies, d’innovation techno-marchande, de numérique partout, d’énergies dites « vertes ». Cette propagande criminelle est totalement en accord avec les Etats « progressistes » et les industriels capitalistes avisés, elle est l’antithèse d’un mouvement écologiste et social digne de ce nom.
La plupart des médias et partis de gauche la reprenne pourtant les yeux fermés, obnubilés par les archaïques mythologies anciennes du progrès par la science et la technologie, de la civilisation, de l’innovation technologique et de la planification étatique.
Il est temps qu’un max de monde se réveille ! Et regarde vers le techno-capitalisme et ses rouages fondamentaux, vers l’Etat et le productivisme au lieu de regarder ailleurs vers les brumes du greenwashing, du techno-cocon, de la gestion autoritaire et inégalitaire des pénuries futures à coup de pass et de matraque.
2022 : encore une année ensevelie dans la gestion autoritaire du covid-19, les rêves électoraux, les dérivatifs sociétaux, le replis sur soi et l’anticapitalisme tronqué à base de « populisme productif » ? Ou début d’un mouvement écologiste et social radical et offensif ?
- Film DON’T LOOK UP : le « mouvement climat » contre le mouvement écologiste
- Un mauvais film avec une mauvaise métaphore
la propagande nulle du « mouvement climat
DON’T LOOK UP : la propagande nulle du « mouvement climat » (par Nicolas Casaux)
Une nouvelle superproduction signée Netflix et encensée par les médias de masse nous « alerte sur l’état de la planète » (Télérama) : Don’t Look Up : Déni cosmique, avec Leonardo DiCaprio, Jennifer Lawrence, Meryl Streep, Cate Blanchett, etc. On l’a vu. Nous voilà alertés. Non sans ironie, le sort de ce film illustrera très certainement ce qu’il dénonce : la destruction de la planète, tout le monde s’en fout, on passera à autre chose, on a d’autres choses à faire, un nouveau chef suprême à élire, un grand remplacement nous menace, etc.
Concernant son contenu (si vous ne voulez pas savoir, scrollez votre chemin) : la métaphore du réchauffement climatique qu’il propose — sous la forme d’une comète menaçant de s’écraser sur Terre — est assez mauvaise. Une partie de l’humanité — les humaindustriels, les habitants de la civilisation industrielle — est directement responsable du réchauffement climatique. Une comète qui menace de frapper la Terre, ça ne marche pas (sauf si on prend la comète pour une métaphore de la civilisation industrielle elle-même : on se retrouve alors avec la civilisation industrielle luttant contre la civilisation industrielle, ce qui se tient, vu que c’est un peu ce qui se passe réellement… mais, bon, ce n’est pas ce qui est suggéré). Le réchauffement climatique est relativement graduel, une comète qui s’écraserait sur Terre, assez peu. (Au passage, on note l’habituelle réduction du problème écologiste à celui du seul réchauffement climatique.) L’endiguement — mieux encore, l’inversion — du réchauffement climatique implique d’en finir avec la civilisation industrielle, de mettre un terme à l’industrialisme, de désindustrialiser, détechnologiser le monde. La préservation de la vie sur Terre menacée par une comète implique au contraire de recourir aux technologies les plus avancées, d’utiliser toutes les ressources produites par la civilisation industrielle. Bref, une métaphore ratée.
Bien entendu, le film ne propose aucune critique de l’État, du capitalisme, de l’industrialisme ou du patriarcat. Le problème ? Des dirigeants terriblement stupides, profondément incapables (et des médias à l’avenant). La solution (implicitement suggérée) ? Élire de meilleurs chefs (qui écouteront les sachants de la caste des scientifiques, lesquels savent comment rendre durable la civilisation techno-industrielle ; formulent des recommandations qui ne remettent évidemment jamais en question les institutions qui les financent et les forment, le technocapitalisme et l’État). Mais comment faire avec — ainsi que le film le dépeint, de manière relativement réaliste — une population lourdement composée d’abrutis, le cerveau câblé sur les mass-médias, notamment télévisuels avec leurs émissions grand public au contenu désespérément stupide, obnubilés par les aventures des célébrités et autres influenceurs (ou ‑ceuses) qui sévissent dans les cyber-asiles psychiatriques (Instagram, TikTok, Twitter, Snapchat, Facebook, etc.), accros à la technologie, aux « mèmes » sur internet, bernés par le populisme de richissimes crapules encourageant les conflits identitaires ou encore persuadés que des reptiliens se cachent parmi nous et que Bill Gates est l’un des leurs qui a pour objectif de tous nous donner à manger à une cabale constituée de juifs et d’aliens crudivores, etc. ? Malheureusement, le film ne nous aide pas à répondre à cette question.
Cela dit, il a au moins le mérite de souligner ce fait que la véritable catastrophe, la première catastrophe, qui n’est pas une menace lointaine, qui est en cours depuis des siècles, est sociale. Le premier désastre, c’est la société humaine (« la » parce qu’à bien des égards il n’en existe grosso modo plus qu’une seule, planétaire, industrialisée, capitaliste, étatique, patriarcale). La catastrophe écologique — qui ne se limite certainement pas au réchauffement climatique mais comprend la pollution et la destruction inexorable des écosystèmes depuis déjà des siècles, le ravage des habitats de toutes les espèces, du paysage planétaire — n’est qu’une conséquence de la catastrophe sociale.
Et cette catastrophe sociale n’a rien à voir avec de mauvais dirigeants. Elle correspond à — et découle de — l’existence même de dirigeants, de « décideurs politiques », de « chefs d’État », de (premiers) ministres, etc. Elle correspond à — et découle de — la délégation obligatoire de notre pouvoir au travers de l’élection, soit l’aliénation obligatoire de notre droit légitime à participer nous-mêmes, directement, à la fabrique de la société dans laquelle on vit, à la fabrique de notre quotidien. Elle correspond à — et découle de — la propagande massive qui nous fait prendre des systèmes sociaux oligarchiques, autocratiques, pour des « démocraties » ; la domination la plus écrasante — la dépossession la plus étendue — que l’humanité ait jamais souffert pour le summum de la liberté humaine ; une institution établie afin de « diriger les opinions politiques et morales » des individus (l’école, dixit son père fondateur, Napoléon) pour un formidable organisme d’émancipation visant à « apprendre à chacun à penser par soi-même » ; etc.
La catastrophe, c’est que la plupart des « écologistes » ne comprennent pas les origines (sociales) du désastre qu’ils ne perçoivent que partiellement et auxquels ils espèrent alors remédier sans s’attaquer à ses causes réelles.
Le « mouvement climat » possède désormais son film. Les politiciens actuels sont des incapables, il faut les secouer, il en faut de meilleurs, qui « écoutent la science », « écoutent les scientifiques », afin qu’enfin les plans technocratiques visant à rendre durable (décarboner) la civilisation industrielle soient appliqués. Faute de quoi on va tous crever. Ou plutôt, faute de quoi la civilisation industrielle risque de s’effondrer.
Décarboner l’exploitation et la domination sociale, décarboner l’exploitation (la destruction) de la nature. Décarboner le technocapitalisme. Quelle riche idée.
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voir aussi : « Don’t look up » : une métaphore discutable de la catastrophe climatique - Le film "Don’t look up" cartonne sur Netflix. Il dépeint l’inaction des politiques et l’inconsistance des médias face à l’imminence d’une catastrophe. Une métaphore de la réaction de la société au changement climatique ? « Don’t look up » en offre toutefois une lecture simpliste.
DON’T LOOK UP : LE MOUVEMENT CLIMAT, UN MOUVEMENT CONTRE-RÉVOLUTIONNAIRE (SUITE)
Goldman Sachs, Ikea, Bloomberg, HSBC, EDF, et une multitude de multinationales ou d’entreprises de télécommunications, de production d’énergie, etc., financent généreusement le projet appelé « Count Us In » (soit : « Comptez sur nous »), auquel le film Don’t Look Up est lui-même associé. Il s’agit, sans surprise, de nous dire que nous pourrions et devrions tous — ensemble, main dans la main — faire des efforts pour décarboner (rendre durable) le capitalisme industriel. Choisir une « banque verte », soutenir le développement des « énergies propres », « investir plus vert », rouler en voiture électrique, etc. Ensemble, main dans la main, parce que, voyez-vous, toutes et tous, clochards, chômeurs, RSAstes, employés, ouvriers, retraités, coiffeurs, plombiers, éboueurs, policiers, fromagers, petits patrons, grands patrons, chefs d’État et PDG de multinationales, nous ne formons qu’une seule grande famille, qu’un vaste cercle d’amis et d’amies, œuvrant de concert pour le plus grand bien de nous toutes et tous.
Bien entendu, c’est totalement faux. La propagande capitalo-étatique vise à nous le faire accroire pour la même raison que l’État a violemment réprimé le mouvement des gilets jaunes. Il faut maintenir la paix sociale. Il est tout à fait attendu que les riches et les puissants passent sous silence l’exploitation et la domination sociales, prétendent qu’il n’existe aucun antagonisme dans la société industrielle, que tous les rapports sociaux y sont de nature fraternels, égalitaires, etc. Soit l’inverse de la réalité. En réalité, l’État implique la domination sociale d’un petit groupe d’individus sur tous les autres, et même, en permettant l’existence du capitalisme, l’entr’exploitation généralisée, la mise en concurrence généralisée de tous contre tous, et tout particulièrement l’exploitation impitoyable des plus pauvres, des dépossédés, des non-propriétaires, par les plus riches, les possédants, les propriétaires.
Le mouvement climat, (quasiment) créé et lourdement financé par l’argent des riches, des classes dominantes, des États et des grandes institutions supra-étatiques, ne remet — évidemment — jamais en question l’essentiel des causes des inégalités sociales, qui sont aussi celle du désastre écologique : l’existence du capitalisme et de l’État. Et durant que des aspirants écolos pauvres s’imaginent faire « un petit geste » pour la planète, quelque part, un riche, dont le train de vie a infiniment plus d’effet sur la nature, fait l’exacte inverse, puissance mille (par exemple en faisant construire « un gigayacht de 120 mètres avec 5 ponts et de nombreux équipements de luxe pour toutes et tous », disposant « de grands espaces et d’une hauteur sous plafond qui vous rappellera sans nul doute les grandes salles de bals que l’on peut trouver dans les palais », dont « la décoration intérieure renforce ce sentiment, avec une utilisation massive de matériaux précieux et prestigieux », avec des « suites de luxe, dont une suite principale avec poutres apparentes, salle de jeux et de cinéma, bar, salle de sport et de remise en forme, piscine extérieure ou encore jacuzzi avec vue sur l’océan », sachant que « vous pourrez également profiter des sorties en mer grâce au garage et aux jet-skis qui viennent avec ce navire d’exception », et que, pour couronner le tout, de grotesques mensonges verts permettent aux riches d’avoir bonne conscience : « le yacht se veut respectueux de l’environnement avec de nombreuses installations et dispositifs qui vont en ce sens : biodigesteur, traitement des eaux usées ou encore technologie de réduction des particules qui permet de réduire ces dernières jusqu’à 90% permettent […] de compenser les impacts écologiques d’un bateau de cette envergure ».)
Voilà pourquoi Don’t Look Up — dont un des principaux acteurs, Leonardo DiCaprio, qui se plait à faire la leçon aux petites gens qui regardent ses films tout en vivant sa vie de milliardaire, a été aperçu il y a quelques jours dans les caraïbes, près de Saint-Barthélémy, à bord du Vava II, un yacht de luxe propriété de Ernesto Bertarelli, homme d’affaires suisse, marié à Kirsty Roper, ex-Miss Royaume-Uni — est un film détestable, au même titre que le mouvement climat qu’il sert à promouvoir : ils ne remettent pas en question les seules choses qui devraient l’être : l’État et le capitalisme.
En outre, ceux qui se fichent de l’exploitation et de la domination sociales et croient réellement que si nous étions des millions à accomplir les petits gestes qu’on nous propose d’effectuer pour décarboner le capitalisme industriel, et que si les entreprises et les gouvernements faisaient des efforts, alors le capitalisme industriel pourrait réellement devenir durable se trompent lourdement. Le capitalisme est intrinsèquement croissanciste, expansionniste. Aucune production industrielle d’énergie dite « renouvelable », « verte » ou « propre » ne l’est réellement, toutes impliquent des dégradations environnementales. La voiture électrique est un désastre écologique au même titre que toutes les productions industrielles.
Si vous aimez la vie sur Terre, oubliez toutes les imbécilités mensongères que les organisations comme « Count Us In » et les grandes figures médiatiques du « mouvement climat » vous racontent. Elles visent avant tout à préserver non pas la vie sur Terre mais le capitalisme industriel. Al Gore, un des plus éminents représentants du « mouvement climat », idole majeure de Greta Thunberg, le clame ouvertement :
« Les inégalités, c’est un peu comme l’inflation. Vous en aurez toujours un peu. Sinon, vous vous retrouvez avec un autre genre de problème. On en veut donc toujours un peu, mais on doit à tout prix éviter l’hyperinflation. Cela gâche tout. Les inégalités, c’est pareil. Pour que les marchés fonctionnent, il nous faut un peu d’inégalité. Les gens ont des compétences différentes, certaines valent plus que d’autres. Mais lorsque les inégalités atteignent des niveaux trop élevés, cela menace à la fois la démocratie et le capitalisme. Ce que nous constatons. »
Vive les inégalités, le capitalisme et la démocratie capitaliste. Et ailleurs :
« Ces temps-ci sont cruciaux pour les investisseurs. C’est au cours des dix prochaines années que nous devons accélérer urgemment la transition vers une économie à faible émission de carbone. Nous pensons que le capitalisme court le risque de s’écrouler. En conséquence, le commerce, qui a été assez timide par le passé en ce qui concerne la mécanique de l’investissement dans la soutenabilité, s’apprête à augmenter sa visibilité. Nous devons y aller à fond. Nous allons devenir plus agressif parce que nous n’avons pas le choix. »
Si vous aimez la vie sur Terre, vous devez réaliser que le capitalisme et l’État (notamment en raison des inégalités sociales qu’ils impliquent) sont la cause de sa destruction, et que le « mouvement climat », qui vise à sauver le capitalisme de lui-même, fait également partie du problème.
(post de Nicolas Casaux)
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