Imaginez qu’un « influenceur » à la mode s’exhibe sur la toile en partageant ses dernières vacances dans le Diois. Dans une cascade d’images, il fera la promotion des plus beaux sites de cette contrée en vantant les atouts de ces lieux : déconnexion, beauté, air pur... Pour suivre la tendance, le vallon de la Jarjatte, le cirque d’Archiane et d’autres seront rapidement pris d’assauts par des smartiens équipés de leurs prothèses numériques. Les datacenters déborderont de photos pour prouver au reste du monde qu’ils y sont vraiment allés. Les parkings pour accéder aux sites remarquables seront saturés. On parlera dans les médias locaux puis nationaux de sur-fréquentation, d’hyper-fréquentation, menaçant ces sites d’exception. Un journaliste innovant couplés à une Intelligence Artificielle tentera le terme de Giga-fréquentation, pour « marquer les esprits », afin que tout le monde « prenne conscience du désastre ». Puis, les autorités compétentes seront interpellées : « Il faut agir vite, sinon ce sont tous les paysages du Diois qui risqueraient de disparaître ». Alors, les gestionnaires du parc du Vercors imposeront la solution de leurs collègues marseillais : « le pass nature ! ». Après tout « une autre vie s’invente ici », dans le Vercors. Évidemment, le tourisme de masse ne sera jamais questionné dans les médias classiques. La mesure sera acceptée par le plus grand nombre et bientôt tout le monde trouvera normal d’être scanné « comme un colis » pour accéder à une nature 2.0. Une nature sans liberté. Certes les calanques de Marseille ne sont pas les falaises du Vercors. Plus sauvages, moins urbanisées. En revanche, l’universalisme du technocrate gestionnaire est indéniable. Ce qui est devenu la norme chez nous pourrait le devenir très prochainement, chez vous. C’est en tout cas le souhait le plus cher de certaines entreprises. Pour comprendre ce qui se joue, vous pouvez lire notre enquête dans ce premier volet de publications.