Une commune des Hautes-Alpes, réputée pour son air pur, a décidé de vendre l’air de son territoire à une multinationale.
Une vingtaine d’emplois seront créés sur place dans un premier temps : mise en bouteille de l’air, contrôle qualité, vérification des taxes de consommation que devront les habitants, transport...
Les acheteurs d’air pur sont potentiellement très nombreux, le marché promet d’être énorme : hôpitaux, personnes asthmatiques, riches résidents de centres villes pollués, nostalgiques des campagnes d’antan, crèches, excentriques...
La multinationale a créé une nouvelle filiale, « Pure Your Air », et prévoit dans un premier temps une production de 100.000 bouteilles d’air comprimé par mois pour des clients partout dans le monde.
A terme, des centaines d’emplois sont envisagés. Le département et la région sont enthousiastes. D’autres communes du secteur sont prêtes à vendre leur air pour alimenter le marché dès qu’il sera en croissance. Des communes du haut diois sont aussi sur les rangs.
L’air communal devenant une propriété privée, les habitants devront acquiter une taxe pour avoir le droit de consommer, le droit de respirer l’air.
Mais « Pure Your Air » promet des tarifs modiques aux résidents, avec possibilité d’abonnements mensuels ou de forfaits à l’année. Un tarif réduit sera proposé aux personnes les moins favorisées.
Les réfractaires amish anti-tout qui se dresseraient contre ce projet et qui refuseront de payer seront invités à cesser de respirer un air qui ne leur appartient pas, ou à quitter la commune.
Les habitants sont partagés, des contre, des pour, des qui attendent de voir.
Voici quelques commentaires choisis recueillis lors de la consultation publique réalisée après la vente de la concession :
« Au moins on aura un air certifié avec contrôle qualité », « Les jeunes partent à cause du chômage, les emplois c’est bon pour la commune », « Des emplois locaux ça vaut bien le fait de payer pour avoir le droit de respirer », « L’entreprise »Pure Your Air« semble très écolo, ils utiliseront des bouteilles en plastique recyclé consignées et l’usine d’embouteillage sera alimentée avec du photovoltaïque », « pour une fois que notre commune a une ressource valorisable, c’est génial »...
Avec « Pure Your Air », vendre du vent deviendra de plus en plus lucratif.
Après tout, vendre du vent est l’essence du capitalisme et de son commerce.
Humour et ironie, pas si loin de la réalité
Cette annonce d’immonde business d’air pur est une blague humoristique, mais qui hélas n’est pas si éloignée de la réalité.
Voyez ci-dessous l’info sur l’appropriation d’une nappe phréatique qui m’a inspiré ce petit article ironique et moqueur.
Et puis on sait que les pauvres, exclus, gens du voyages sont ceux qui habitant les lieux où l’air est le plus pollué : bords d’autoroute, usines chimiques, incinérateurs crachant la dioxine, périph... L’air « propre » n’est pas directement vendu aux plus offrants, mais la ségrégation immobilière et sociale fait que les plus riches peuvent payer pour vivre là où c’est moins pollué, et donc s’acheter de l’air plus pur.
D’autres part, des « bars à oxygène » existent depuis longtemps dans diverses grandes villes, et au Japon on trouve des distributeurs d’oxygène.
- Un maire vend l’air de sa commune à une multinationale contre des créations d’emplois
💧EN PLEINE SÉCHERESSE, CRISTALINE S’APPROPRIE UNE GIGANTESQUE NAPPE PHRÉATIQUE DANS L’HÉRAULT
La mairie du village de Montagnac a bradé cette ressource commune contre l’espoir de potentielles « créations d’emplois » -
Dans le Sud de la France, et en particulier dans l’Hérault, la sécheresse continue encore et toujours. Si le déficit de pluie des dernières années a été partiellement comblé par les intempéries et la forte humidité de ces derniers mois, notamment dans l’Ouest, ce n’est pas le cas partout en France.
Et cette sécheresse touche notamment l’Hérault depuis des années, un département du Sud, où se trouve la commune de Montagnac, peuplée de 4.000 âmes. C’est justement là bas que pourrait s’implanter une usine d’eau minérale qui pomperait dans la nappe phréatique à plus d’un kilomètre de profondeur. L’objectif de Source-Alma, la firme qui possède notamment Cristaline, l’eau minérale la plus vendue de France : produire jusqu’à 1,6 millions de bouteilles par jour selon BFM.
Une association nommée « Veille au grain » tente de lutter contre l’installation de l’usine, alors que les habitant-es n’ont pas été consulté-es sur le projet. Le média Reporterre explique que le puits est déjà existant suite à un forage réalisé il y a trente-cinq ans, mais qu’il n’a jamais été réellement exploité par les deux anciens propriétaires. Désormais c’est une multinationale qui a mis la main dessus, achetant le puits à la mairie pour une bouchée de pain en 2022.
L’acquisition de cette nappe n’aura coûté à Cristaline que 30.000 euros et lui permettra donc de pomper chaque année des centaines de millions de litres, mis dans bouteilles en plastique et vendues 200 fois plus chères que l’eau du robinet. Les habitant.e.s ont fait le calcul, le groupe privé pourrait réaliser chiffre d’affaires quotidien de quelque 240.000 euros, quasiment 10 fois le prix d’achat à la commune, chaque jour ! Un marché extrêmement rentable, et une véritable braderie d’un bien commun. Jusqu’à épuisement de la ressource. Un cas classique de cadeau fait par le secteur public à une entreprise privée.
Artificialisation de terres agricoles, augmentation du nombre de camions sur les routes, risque plus fréquent de remontées d’eau salée en période de sécheresse, déchets ... le projet sera vraisemblablement ultra-polluant pour la région. Et c’est sans compter les tonnes de plastique nécessaires à la production d’eau en bouteille, des plastiques qui iront bien souvent polluer... l’eau des rivières et des océans !
Mais au-delà de la pollution, l’accaparement d’une nappe phréatique par une multinationale pose la question du partage des ressources. Selon l’association, la nappe « pourrait alimenter 20.000 personnes pendant quinze ans » si elle était gérée localement : une denrée précieuse, vitale, sous les pieds d’une population souffrant de sécheresse mais qui sera entre les mains de prédateurs capitalistes.
Toutes les conditions sont réunies pour qu’à Montagnac se joue un nouvel épisode de la guerre de l’eau. Après les golf sabotés, les mégabassines désarmées : la construction d’une usine empêchée ?
À suivre.
Un message de Contre Attaque
Tout est bon pour faire de l’argent en utilisant le pare-feu de la "création d’emploi".
La création d’emploi justifie toutes les pires saloperies d’entreprises : usines à PFAS pour les ustensiles de cuisines, fabrication et vente d’armes, fabrication de pesticides, fabrication de SUV, de yachts et de jets privés, extraction de pétrole, entrepôt logistique... Tout est bon pour continuer le même modèle de société mortifère. Quand la "création d’emploi" ne suffit pas, c’est la "transition" (écologique ou énergétique) qui est invoquée.
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