Olivia Grégoire, ministre déléguée au tourisme a beau s’appuyer sur une succession de projets1 visant à la mutation du tourisme, à la gestion des flux touristiques et à l’équilibre entre logements touristiques et logements à l’année, le principal projet touristique actuel n’est autre que celui des JO de Paris. Avec ses 64 chantiers en cours et de multiples aménagements, un coût actuellement affiché de 8,8 milliards d’euros, ces JO de Paris désavouent tout discours sur la surfréquentation et l’« équilibre entre l’impact économique du développement des meublés et le respect des équilibres économiques et sociaux locaux »2.
Comment peut-on vouloir réguler les flux touristiques et en même temps attirer près de 16 millions de visiteurs cumulés à Paris durant les JO ? Comment peut-on se préoccuper de l’« accès à une offre de logement à prix raisonné tout au long de l’année »3 alors que Paris est unes des villes les plus chères d’Europe et que les JO accentueront le phénomène ? On annonce déjà que le prix de certaines locations de type Airbnb sera multiplié par six en Ile-de-France. Pour un T2 dans le 20e arrondissement, il faudra compter, du 26 juillet au 11 août 2024, 861 euros par jour ; 1330 euros pour un T3 à Saint-Denis…4 Mais lorsqu’une ville accueille le plus grand événement sportif international couvert par 20 000 journalistes accrédités pour les 206 pays représentés et qu’on espère 3,5 milliards de téléspectateurs, celle-ci doit s’attendre à un bouleversement du marché de l’immobilier et à des répercussions sur le tourisme, à plus long terme. La valorisation immobilière basée sur la notoriété olympique va probablement gentrifier les villes de Saint Denis, Aubervilliers ou Pantin comme l’ancien quartier pauvre de Stratford, métamorphosé depuis les JO de Londres de 2012.5 Cette notoriété renforcera également l’attractivité touristique de la région parisienne. Les JO de Barcelone de 1992 sont révélateurs de cette croissance touristique. Le nombre de visiteurs est passé de 1,75 million en 1990 à 4 millions en 2000, puis à 13 millions en 2010 pour arriver à 19,4 millions de touristes en 2019. Cette augmentation fulgurante était d’ailleurs valorisée par certains promoteurs des JO de Paris alors même que le surtourisme à Barcelone posait des problèmes incommensurables que la maire de Barcelone essayait d’endiguer.6
Le 18 juillet 2023, les régions PACA et Auvergne-Rhône-Alpes ont annoncé une « union des Alpes françaises » dans l’intention de déposer une candidature au Comité International Olympique (CIO) pour accueillir les épreuves des Jeux Olympiques et Paralympiques d’hiver de 2030.1 Cette intention commune — déjà entachée par une plainte déposée pour trafic d’influence et favoritisme contre le directeur général délégué du Comité d’organisation des JOP (Cojop)2 — serait soucieuse, nous dit-on, « des enjeux liés à la préservation de la biodiversité et à l’accélération du réchauffement climatique dont les conséquences sont plus fortes encore dans les territoires de montagne ». Peut-on encore célébrer les sports d’hiver sous neige artificielle aux JO alors qu’une étude publiée le 28 août dans la revue Nature Climate Change3 souligne que le réchauffement climatique menace presque toutes les stations de ski d’Europe ?
Henri Mora