Une résolution visant à encourager l’allaitement maternel aurait dû être approuvée rapidement et facilement par les délégués gouvernementaux réunis au printemps dernier à Genève pour l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé). S’appuyant sur des dizaines d’années de recherches, la résolution rappelait que le lait maternel est le plus sain pour les enfants et que les pays devraient s’efforcer de limiter la commercialisation des substituts.
La délégation des États-Unis a toutefois fait obstruction, pour défendre les intérêts de l’industrie alimentaire et para-pharmacie des fabricants de laits et préparations pour nourrissons. Il faut dire que l’industrie de l’alimentation pour nourrissons pèse 70 milliards de dollars, mais que dans les pays riches, ses ventes stagnent.
Les responsables américains ont demandé la suppression de la demande de « protéger, promouvoir et soutenir l’allaitement maternel », ainsi qu’un autre passage qui demandait aux décideurs politiques de restreindre la promotion des produits alimentaires qui ont des effets délétères sur les jeunes enfants.
Voyant que leur demande était rejetée, ils sont passés aux menaces. L’Équateur, qui avait prévu de relayer la mesure en cours de discussion, a été le premier dans le collimateur : si l’Équateur n’abandonnait pas la résolution, Washington déclencherait des mesures commerciales punitives et retirerait son aide militaire. Le gouvernement équatorien n’a pas tardé à capituler.
Les représentants de plus d’une douzaine de pays ont témoigné de cet échauffourée - sous couvert d’anonymat, par crainte des représailles de la part des États-Unis.
Les défenseurs de la santé se sont empressés de trouver d’autres soutiens pour la résolution, mais au moins une douzaine de pays pauvres d’Afrique et d’Amérique latine, ont reculé, invoquant des craintes de représailles, selon des responsables de l’Uruguay, du Mexique et des États-Unis.
« Nous avons été étonnés, consternés et attristés », a déclaré Patti Rundall, directrice politique du groupe britannique Baby Milk Action, qui assiste aux réunions de l’assemblée (l’organe décisionnel de l’OMS) depuis la fin des années 1980. « C’est un chantage. Les États-Unis prennent le monde en otage et tentent de renverser près de 40 ans de consensus médical sur la meilleure façon d’assurer la santé des nourrissons et des jeunes enfants »
Au cours des délibérations, certains délégués américains ont émis la menace que les États-Unis pourraient réduire leur contribution à l’OMS, dont Washington est le plus grand contributeur. (l’année dernière, les US ont contribué pour 845 millions de dollars, soit environ 15% du budget de l’OMS).
Malgré cela, le lobbying des Américains n’a finalement pas pu aboutir, notamment car les Russes sont intervenus pour défendre la mesure initialement envisagée.
Ça laisse tout de même pantois sur la capacité de nuisance générale des Etats Unis depuis l’élection de Trump, puisque même les bébés sont sacrifiés sur l’autel des profits de ses industries et multinationales de la para-pharmacie.
Forum de l’article