Hausse des prix du papier et des consommables, baisse d’activité de l’imprimerie, diminution des recettes publicitaires et stagnation des ventes se conjuguent pour menacer sérieusement la survie du célèbre journal local de 122 ans.
Le journal Le Crestois en appelle solennellement au soutien de ces lecteurs et amis.
On sait bien que dans le monde capitaliste froid et sans pitité, les petites entreprises indépendantes de presse ont plus de mal à survivre que les mastodontes soutenus (parfois à perte) par des milliardaires (et éventuellement par les Etats pour les secteurs bancaires ou énergétiques, car « trop gros pour chuter ») et sont souvent broyées par les aléas tyraniques de la concurrence et des inévitables et récurrentes variations de conjectures.
Les petites entreprises locales sympa et autogérées comme la multinationale géante prédatrice sont toutes soumises de gré ou de force au même système social inhumain, au règne mécanique de la valeur, de l’argent, de la marchandise et du travail abstrait.
Sans cesse les règles abstraites et automates du capitalisme se rappellent salement à nos existences impuissantes, notamment quand elles détruisent ce qui est socialement et/ou écologiquement utile, tandis qu’elles font fructifier jusqu’à l’obscène ce qui est néfaste pour l’humanité, le climat et la nature.
Même pas besoin de grands méchants et d’affreux spéculateurs (même s’ils existent) pour ça, l’impératif de valorisation s’impose à tous, aux pires comme aux meilleurs, aux travailleurs modèles comme aux requins sans scrupules, aux pires pollueurs comme aux petits paysans en bio, aux travailleurs indépendants comme aux entrepreneurs et aux détenteurs de capitaux (même si ces derniers en profitent davantage).
Ainsi, le capitalisme se moque bien de la nature des activités et du sort des humains ou de la Terre, seul lui importe l’augmentation du volume d’argent.
La disparition du journal Le Crestois ou de n’importe quelle activité écologique ou sociale bénéfique lors d’une fluctuation du libre marché ne fait ni chaud ni froid à un système social fondamentalement aveugle et mécanique.
Et à nous ça fait quoi ?
La plupart des gens vont continuer à déplorer certaines des innombrables conséquences néfastes du capitalisme (celles qui les touchent plus directement), tout en se gardant bien de critiquer/rejetter/combattre le capitalisme lui-même ?
Le capitalisme doit être détruit et combattu sans répis en tant qu’il est une totalité sociale qui absorbe et contraint tout, en tant qu’il est un système totalitaire destructeur et néfaste en soi. Il est vain, stupide, illusoire et absurde d’espérer le réformer, le contrôler, le rendre autre ou meilleur. C’est une impasse d’essayer de le verdir, de l’aménager, de vouloir le rendre moins inégal.
On ne peut que rechercher activement sa disparition, tout en construisant d’autres sociétés sur des bases viables.
En souhaitant au journal Le Crestois de résister encore longtemps aux gouffres noirs de l’économie de marché, car très rares sont les journaux « professionnels » qui acceptent de publier des tribunes subversives et qui offrent ainsi une certaine pluralité de points de vue et d’analyses.