A l’heure des traditionnels préparatifs électoraux, pratiquement tous les partis se gargarisent de création d’emploi, de croissance et de réindustrialisation.
Ils invoquent des emplois verts, la croissance verte ou l’économie circulaire en laissant croire de manière mensongère qu’un simple changement de vocabulaire ou des modifications dans les dispositifs de production industrielle ou énergétique suffiraient à préserver le climat, le vivant et des conditions sociales décentes.
Quelques articles et des notes sur ces sujets :
La croissance verte sauvegarde le modèle industriel, pas la nature - Dans « La croissance verte contre la nature », l’économiste Hélène Tordjman montre comment, sous couvert de « transition écologique », le capitalisme financiarisé poursuit sa destruction de la planète.
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sous couvert de « transition écologique et numérique », de « progrès » ou encore de « croissance verte », les grandes institutions internationales, les États et les multinationales ne font in fine qu’aggraver la crise écologique qu’ils et elles, main sur le cœur, assurent vouloir stopper… après en avoir été à l’origine.
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Une vision basée sur « l’augmentation des performances » et la « recherche du profit maximum », considérée désastreuse par l’autrice, qui rappelle que « le mythe de la neutralité de la science et de la technique » n’est guère pertinent tant « les interactions des jeux de pouvoir, des structures institutionnelles et de l’imprégnation idéologique aboutissent à privilégier certaines options parmi la multitude des possibles explorés par la science ».
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Consciente que ces initiatives locales d’agroécologie et d’agriculture paysanne « ne suffiront pas à changer le système » — elle appelle d’ailleurs à sortir du capitalisme, ajoutant avec humilité ne pas avoir de « plan B à proposer »
- Etats, multinationales, croissance verte, réindustrialisation... sauvegardent le modèle techno-industriel productiviste, mais pas le vivant
- De plus, dans le techno-capitalisme, les travailleurs tendent à être remplacés par des robots, des logiciels, des IA et des algorithmes
L’Europe largement responsable de la destruction des forêts tropicales - Malgré les initiatives en faveur de la « zéro déforestation », la consommation européenne de soja et d’huile de palme continue de détruire des milieux tropicaux, selon une étude du WWF publiée mercredi 14 avril.
Polluer ou produire ?!
« Pollution ou inflation : en Chine, un dilemme de fer » - Principal producteur d’acier de la planète, l’empire du Milieu est confronté à un choix cornélien : bloquer l’économie mondiale ou compromettre ses récents engagements climatiques. Une ligne de crête difficile à tenir, note Philippe Escande, éditorialiste économique au « Monde ».
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Il faut dire que les tentations sont grandes, voire irrésistibles. Si, en 2019, on parlait encore de surcapacités de production en Chine, qui fabrique plus de la moitié de l’acier dans le monde, aujourd’hui, c’est la pénurie qui s’installe. Réveillée par la reprise plus rapide que prévu dans le pays, mais aussi aux Etats-Unis et en Europe, la demande explose, du côté des constructeurs d’immeuble comme des fabricants d’automobile.
En quelques mois, les prix des différents produits, plats ou longs, ont crû de 50 % à 80 %, voire doublé dans certains cas. Même en France, certains industriels sont tellement désespérés de courir après le métal pour continuer à travailler qu’ils demandent une suspension des quotas d’importation. C’est un pan majeur de l’économie qui se grippe. Et les plans de relance, aussi verts soient-ils, remettront de l’huile sur le feu, qu’ils favorisent le logement, le ferroviaire ou les éoliennes.
Bloquer l’économie mondiale ou compromettre des engagements climatiques pourtant tout frais ? En dépit de la pandémie de Covid-19, la production d’acier chinois a dépassé en 2020 son record de 2019. Ce dilemme ne touche pas que l’acier, mais aussi l’aluminium et la plupart des autres matières premières. Et il ne concerne pas que la Chine. La reprise qui s’annonce menace déjà la vertu si facile à promettre durant les temps difficiles.
- Etats, multinationales, croissance verte, réindustrialisation... sauvegardent le modèle techno-industriel productiviste, mais pas le vivant
- Des robots performants, pour remplacer les humains considérés obsolètes par la méga-machine
Dépasser le dilemme insoluble emploi/croissance/productivisme/nuisances
Le discours commun, le discours politicien et techno-capitaliste sacralisent la forme travail et l’emploi, les rendant indépassables, ils ne veulent surtout pas remettre en cause le cadre existant. Or, le travail et le marché de l’emploi, l’Economie peuvent pourtant être critiqués et rejetés (voir liens en PS), au profit d’autres formes d’organisations sociales et de partages des activités et de leurs produits. Et sans verser dans la dictature pour autant, bien au contraire.
La classe ouvrière a elle aussi largement sacralisé le travail. Etant dépossédés de longue date du pouvoir économique et politique, les ouvriers ont eu tendance à survaloriser ce sur quoi ils ont (avaient) un certain pouvoir, le travail, au point d’adhérer progressivement aux mêmes folies que leurs maîtres capitalistes et technocrates : la méritocratie, le corporatisme, la valorisation du sacrifice et de la performance, la critique de l’oisiveté et des réfractaires au travail...
Majoritairement, la classe ouvrière a voulu faire du travail une force pour contrer les menées du patronat et du Capital, pour obtenir des droits et un meilleur (un moins mauvais) traitement, au lieu de détruire d’un même geste la « valeur travail », le capitalisme et l’Economie. Au final, tout le monde se retrouve aliéné au travail et à ses lois, soumis à la peur de la précarité et du chômage, inféodé aux impératifs de rentabilité et de compétitivité, toujours sous la menace de délocalisations là où c’est moins cher, et les classes laborieuses sont divisées, intoxiquées par l’idéologie consumériste et capitaliste, plus impuissantes et faibles que jamais.
Sans parler bien sûr de la destruction dantesque du monde vivant opérée par l’extractivisme, l’industrie, l’urbanisation, les pollutions diverses, la déforestation...
On réalise là les échecs et impasses de nombreux partis et syndicats de gauche.
A présent, les machines, les robots, les IA, les algorithmes et les logiciels remplacent la force de travail humaine, et pas seulement dans les usines, et les travailleurs deviennent de plus en plus superflus, moins utiles, cantonnés à des taches toujours plus parcellaires et machiniques dont tout leur échappe. On est loin des artisans ou des ouvriers qui savaient réaliser l’intégralité d’un produit.
Continuer la valorisation du capital, la croissance, le consumérisme et le productivisme, et fournir des emplois, souvent « maltraitants », à une partie des travailleurs (et de gros profits à une minorité), et continuer à polluer et détruire le vivant OU quitter le capitalisme et le techno-monde pour préserver le vivant tout en satisfaisant les besoins et désirs de toustes dans l’égalité et les activités partagées ?
Ce dilemme implacable illustre bien l’incompatibilité du productivisme et de la civilisation industrielle avec la préservation d’un monde vivant et vivable.
On ne peut pas produire en masse avec des hautes technologies sans polluer et/ou exploiter autrui, donc il faut arrêter la civilisation industrielle, ses usines et ses mines, son cycle infernal de la valorisation du capital. Les autres options ne sont que la poudre aux yeux qui font durer les carnages locaux et planétaires.
Comme il n’y a pas de débats et de volontés collectives pour sortir de ce système, les candidats à l’élection et les puissants se contentent de répéter les mêmes programmes, juste relookés et un peu modifiés.
Chacun.e et chaque secteur social subit, et subira de plus en plus, les effets sociaux de l’ultra-capitalisme et les conséquences catastrophiques de la civilisation productiviste sur les plans écologiques et climatiques. Mais pourtant, chacun.e continue de se préoccuper dans les faits principalement de la survie à courte vue de son secteur, de son foyer de vie.
Chacun.e proteste épisodiquement dans son coin sans vraiment chercher à remonter aux racines ni chercher à coordonner les colères pour frapper ensemble au coeur. De ce fait, on se condamne d’avance à l’impuissance, à la défaite et à l’accentuation des méfaits produits inéluctablement et structurellement par la civilisation industrielle (son étatisme-capitalisme-productiviste).
Les gros merdias et les politiciens sont grandement responsables de ces impasses, ils ne portent aucune rupture franche et radicale, ils endorment avec le discours comme quoi on serait malgré tout en démocratie, et que des mesures de prétendue « verdissement » et de répartition des richesses meilleures seraient possibles dans le cadre existant, et pourraient suffire si elles se faisaient.
Si tout n’est pas forcément à jeter, on ne peut pas faire du neuf avec du vieux, et les logiques productivistes reliées à la valorisation du capital poussent toujours dans le même sens.
Il est donc temps de se défaire des illusions et habitudes anciennes, de s’orienter vers des basculements révolutionnaires, de les préparer de diverses manières, de les soutenir via la démocratie directe, l’autonomie et l’autogestion.
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