Quand de bonnes pratiques alternatives sont en but à l’agro-business, avec un rapport de force bien trop faible et des perspectives trop peu politiques et collectives :
Permaculture et Microferme maraichère : une alternative agricole entre mythe et espoir - Comme Romain Boucher dont nous publiions une interview la semaine passée, Daniel Vivas est un ingénieur déserteur qui se présente lui-même comme « ancien ingénieur d’études des High Tech qui a pris la tangente depuis 10 ans ». Depuis, il baigne dans la permaculture : après avoir été maraicher-permaculteur, il enseigne désormais les principes de la permaculture et de l’agroécologie dans un Centre de Formation Professionelle et de Promotion Agricole. Dans cet article, il explique les fondements de la permaculture avant de démontrer en quoi le mythe des « microfermes », notamment dans les versions lisses et médiatiques de l’écologie, ne représente en rien une alternative au capitalisme (nous sommes moins convaincus lorsqu’il propose, dans le sillage de Bernard Friot, une Sécurité Sociale de l’Alimentation qui permettrait de garantir un salaire à des permaculteurs responsables et des bons légumes aux consommateurs. En plus de participer d’une opération de traçage supplémentaire, comme toute la chaîne du Bio l’a fait dans les dernières décennies, ce type de solution « politique » nous semble accroître, une fois de plus, la dépendance envers un État – aussi social soit-il – auquel nous avons plutôt coutume de ne rien demander, même pas des bons légumes).
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On semble effectivement face à une aporie : les prix des produits maraichers issus de l’agriculture biologique sont trop élevés (On peut même dire que des légumes ou des fruits cultivés suivant les principes de l’Agroécologie ou de la Permaculture sont d’une exigence culturale et biologique beaucoup plus élevée que le propre cahier des charges du label AB sans cesse en baisse de qualité – sans parler du propre label européen qui est en train de satisfaire pleinement les grandes enseignes de la grande distribution) pour s’adresser au plus grand nombre – classes moyenne et précaire – et en même temps ne rémunèrent pas suffisamment et décemment les producteurs maraichers dans leur grande majorité. Face à cette dialectique indépassable en apparence, la Permaculture elle-même n’y pourra rien malgré ces fonds sonores qui veulent faire croire le contraire. Ne serait-il pas temps alors d’envisager ces bonnes approches et pratiques agricoles dans un autre système économique que le capitalisme ? La réponse est clairement oui.
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Il faut donc en finir avec le mythe de la réussite agricole alternative dont la Permaculture et le modèle des microfermes seraient à la fois caution et panacée. Ce mythe rejoint dans son idéologie égocentrée et individualiste l’adage « chacun fait sa part » ou l’appel à « l’insurrection des consciences » si bien popularisée dans les milieux écologistes de Pierre Rabhi ou Nicolas Hulot, malheureusement trop dérisoire et trop tendre – pour ne pas dire si creux.
Si respectueuses, louables, souhaitables et généralisables soient ces approches et ces pratiques alternatives, elles restent largement insuffisantes à elles seules pour provoquer une véritable révolution et marée vertes dans le domaine agricole. Car sans véritable socle politique lui-même révolutionnaire, ces alternatives ne dureront pas et se prendront en pleine face le rouleau-compresseur de l’Agro-Business qui lui continue sa route vers l’effondrement... inexorablement.
- En finir avec le mythe de la réussite agricole alternative (permaculture et microfermes)
Note :
Les initiatives et les expérimentations c’est bien, c’est indispensable, mais on a souvent tendance à oublier que les luttes collectives acharnées contre le capitalisme et la civilisation industrielle, les analyses et les perspectives politiques approfondies sont tout autant indispensables.
Les habitudes culturelles actuelles, encouragées par les principes et structures de l’économie de marché adossé à l’Etat, encouragent et valorisent les initiatives (surtout quand elles ne remettent pas en cause l’économie de marché, les structures de la propriété et du travail ni la mainmise étatique) mais tendent à critiquer et rejeter les luttes collectives radicales, tandis que les pouvoirs et leurs flics les combattent.
Il va donc bien falloir songer à rééquilibrer et articuler tout ça.