Effondrement ? Effondrements ? D’autres chemins ?

50 ans après, et si nous reparlions du rapport Meadows ?

mercredi 16 octobre 2024, par Jean-Clone.

Il y a un peu plus de 50 ans était publié le rapport au club de Rome dit « Rapport Meadows », titré « Les limites à la croissance (dans un monde fini) ». Basé sur la dynamique des systèmes (modélisation mathématique qui permet de comprendre et d’analyser des problèmes complexes), ce rapport a simulé les interactions entre population, croissance industrielle, production de nourriture et limites des écosystèmes terrestres. Le modèle utilisé est le modèle World3. Il fut régulièrement mis à jour et une récente version du rapport Meadows est parue en 2022

AVERTISSEMENT
En conclusion, au bas de cet article, nous verrons quelle échappatoire reste aux riches et ultra-riches. VOTRE AVENIR EST FONCTION DE CETTE ÉCHAPPATOIRE. Mais auparavant, il faut comprendre le pourquoi et nous commencerons par expliquer grossièrement les effondrements (certains ont déjà commencé) !

Commençons par le changement climatique
Le changement climatique commence (enfin !) à inquiéter de nombreuses personnes, même ceux qui sont longtemps restés incrédules. Cependant, ce n’est qu’un épi-phénomène. Les phénomènes associés au changement climatique se multiplient : méga incendies partout dans le monde : Australie, Californie, Sibérie, plus près de chez nous, les Landes. Inondations de plus en plus fréquentes voire dévastations comme dans les vallées des Alpes-maritimes. Chacun peut constater une nette accentuation des phénomènes climatiques extrêmes, que ce soit en France ou dans le monde. A l’heure où j’écris ces lignes, la saison des cyclones bat son plein en Atlantique-Nord. Une fois déversés sur les Caraïbes, la Floride, les restes retraversent l’Atlantique et apportent des phénomènes météo ravageurs sur l’Europe de l’Ouest, notamment la France, l’Irlande, le Royaume Uni et j’en passe.

Chaleurs humides
Par ailleurs, il fut démontré que de fortes chaleurs humides sont difficiles à supporter par l’être humain. Or, certaines zones de la planète sont fortement soumises à ce risque et pourraient devenir inhabitables. C’est le cas notamment des zones équatoriales humides de l’Amérique du Sud et de l’Afrique : les bassins de l’Amazone et du Congo. S’ajoutent à ces régions (selon quelles étendues ?), les parties équatoriales de l’Asie et de l’Océanie et l’Asie du Sud-Est soumise à des climats chauds et humides. Toutes ces régions risquent de devenir rapidement inhabitables engendrant de fortes mortalités d’une part et d’importantes migrations de l’autre. Nombres d’entre elles étant parmi le plus peuplées, les effets seront très probablement dévastateurs.

Osons une comparaison avec un changement climatique apocalyptique du passé
Cet événement apocalyptique n’est rien moins que la première extinction des espèces il y a environ 250 millions d’années. Une émission que j’ai pu voir quelques années auparavant (probablement sur Arte) analysait les causes de cette extinction. (Malheureusement, je n’ai pu retrouver cette émission et je lance un appel au cas où quelqu’une ou quelqu’un aurait noté ses références). Dans cette émission, il était supposé principalement 2 causes naturelles à l’exclusion de causes extra-planétaires (météorites) :

  • Un premier réchauffement de 5° pendant 40 000 ans lié à des super-volcans : les trapps de Sibérie.
  • Un deuxième réchauffement car le premier aurait acidifié les océans et libéré les hydrates de méthane des profondeurs océaniques. Là aussi un nouveau réchauffement de 5° supplémentaires sur 40 000 ans de plus.
  • Au total, ce furent donc 10° sur 80 000 ans qui auraient donc provoqué la première extinction des espèces : 95% des espèces marines et 75 à 80% des espèces terrestres.

Si l’on compare avec le réchauffement actuel (considérons 1,5° sur 170 ans), nous allons au bas mot 70 fois plus vite ! Mais ce n’est pas tout pour deux raisons :

  • Tout d’abord, cette estimation de la vitesse est basée sur une extrapolation linéaire. Mais il semble qu’il faille compter sur une accélération et non une linéarité.
  • Ensuite, d’autres estimations sur internet font état d’une durée plus longue que 80 000 ans induisant une estimation actuelle d’un facteur peut être 250 fois plus rapide qu’alors.

Simplement en tenant uniquement compte du seul réchauffement climatique, nous pouvons nous interroger sur la pérennité de l’espèce humaine. Je parle bien ici de l’espèce humaine et je ne m’interroge pas sur l’avenir de la planète Terre. Du moins, tant que le soleil restera au stade naine jaune et qu’il ne commencera à basculer au stade géante rouge. Parmi les 35 indicateurs vitaux de notre planète, 25 affichent désormais des niveaux sans précédent de détérioration

Mais, comme ce fut rapidement évoqué dans l’entête, le rapport Meadows modélise bien plus d’interactions. Certaines de ces interactions sont abordées par l’astrophysicien Aurélien Barrau dans de nombreuses vidéos sur internet. L’une de ces vidéos recense pêle-mêle divers points de non retour. L’une de ses tribunes affiche clairement que la vie sur Terre se meurt. Répétons ses propos : « La crise est fondamentalement systémique et multi-factorielle »,

podcast de dernières limites

L’une de ressources parmi les plus intéressantes (mais est-ce vraiment intéressant ?) sur internet est le podcast en 16 épisodes de dernières limites. Bon nombre de sujets du rapport sont abordés par divers spécialistes. Chaque épisode est abordé et présente des pistes de solutions. Personnellement, je ne crois pas du tout en ces pistes. D’une part, il faudrait une entente mondiale de la quasi totalité des pays du globe (vous y croyez, vous ?), d’autre part, il est probable que nombre de limites sont déjà dépassées et les pistes évoquées arriveraient bien trop tard même si elles étaient suivies aujourd’hui. L’un des modèles recherché par le rapport précise qu’il aurait fallu que le monde se conforme de manière draconienne à diverses prescriptions dès 1980 pour espérer suivre un chemin ne conduisant pas à un effondrement. Nous devrions plutôt dire « des effondrements » : effondrement des insectes, effondrement des oiseaux, effondrement de la vie sauvage, effondrement du climat, effondrement des ressources. L’aspect systémique multi factoriel de la crise devient évident pour l’analyser !

Les ressources
L’un des aspect évoqué dans le podcast concerne les ressources. Déjà en 2011, lors de la bagarre contre le gaz de schiste en Ardèche, j’avais évoqué le contexte dans lequel venait se situer le gaz de schiste. Je ne reviendrais pas sur cet article mais je souhaite apporter des précisions concernant 4 points :

1. Les pics pétroliers

Vers 2007-2008, nous avons passé le pic de production du pétrole conventionnel. Plus jamais, depuis cette date, la production de pétrole conventionnel sera plus importante. Vers 2018, nous avons passé le pic de production du pétrole tous liquides. Cette situation peut sembler de bonne augure pour faire baisser les émissions de CO². Nous verrons cependant un dilemme profond sur la production de pétrole (chapitre Démographie, pétrole, santé et agriculture ci dessous).

2. Le taux de retour énergétique (EROI)

L’association ASPO (Association pour l’étude des pics pétroliers et gaziers), composée d’anciens géophysiciens du pétrole alerte depuis plusieurs décennies sur le pic pétrolier. Il s’agit d’une association internationale avec des sous-groupes dans plusieurs pays. Dans les rangs de la branche française, vous trouverez un ancien géophysicien français très actif : Jean Laherrère (voir notamment son intervention sur thinkerview). Nous trouvons également une étude intitulée « Pic pétrolier et transition vers une énergie à faible teneur en carbone : une perspective énergétique nette ». Le schéma de cette étude montre grossièrement (partie jaune en haut du schéma) qu’il faudra dépenser l’énergie d’un baril pour en extraire trois vers 2030, un baril pour en extraire deux vers 1940 et un baril pour en extraire un vers 2050.
Sachant qu’avec un rapport de 1 pour 1, nous pouvons juste extraire, un rapport de 1 pour 2 permet d’extraire et raffiner en enfin un rapport de 1 pour 3 permet de transporter ce qui fut raffiné. Je vous laisse déduire les conséquences par vous même ...

3. La modélisation des ressources uranifères

Nous ne pouvons extraire les ressources en uranium sans pétrole (bulldozers, camions, transformation en yellow-cake ...). Sans même comptabiliser cet aspect, il est important de vérifier la disponibilité d’uranium et notamment le pic de production tout comme nous vérifions les pics du pétrole et du gaz. Une étude d’un groupe de scientifiques allemands (2006) prédisait un pic vers 2020-2030 (cette étude - version en français - est par ailleurs référencée dans le livre de Richard Heinberg La fin de la croissance) :
Schéma :

4. Les ressources minières
Une tension existe sur les ressources minières à la fois très polluantes et en voie de forte déplétion. Voir à ce sujet les interviews thinkerview d’Aurore Stéphant (Interview1, interview2). Notez que vous êtes partis pour plus de 6 heures d’interviews mais ça vaut le coup ...

Démographie, pétrole, santé et agriculture

Considérons les impacts du pétrole sur la société et principalement sur l’agriculture et la santé.
La mécanisation, avec des machines agricoles (tracteurs, moissonneuses-batteuses ...) mues par le pétrole, a profondément transformée les sociétés. Alors qu’auparavant, nos ancêtres devaient travailler aux champs pour produire leur nourriture, l’arrivée du pétrole a permis la construction de machines agricoles capables de remplacer de nombreux travailleurs des champs. De meilleurs productions et rendements, accentués par la production d’engrais issus des énergies fossiles ont alors permis à la démographie de grimper en flèche. Si l’on calque les courbes de la démographie et de la production de pétrole, le lien devient évident. Parallèlement, les famines issues des mauvaises récoltes se sont atténuées et un fraction toujours plus importante de la population a pu se tourner vers d’autres emplois que l’agriculture, notamment la médecine. Diminutions des famines et augmentations des capacités de soins se sont coordonnées pour soutenir la démographie humaine. Très rapidement, la démographie a explosée. Nul doute que les pics pétroliers advenant vont rompre considérablement cette harmonie artificielle.

La courbe de production de pétrole s’infléchissant, la démographie va suivre. De futures famines, accompagnées d’épidémies sont à craindre. Intuitivement, nous voyons là des exemples d’interactions entre ressources et populations modélisées par la dynamique des systèmes du modèle World3 dans le rapport Meadows. De surcroît, les politiques actuelles avec les grands travaux inutiles, l’artificialisation des sols, les errements pour compenser les erreurs passées vont accentuer les problématiques.
Citons comme exemple les pesticides : Pour améliorer les productions et lutter contre la ravageurs, l’être humain produit, encore et encore, des pesticides. Ceux ci détruisent les insectes (effondrements de plus de 70% en quelques années) et, conséquemment, leurs prédateurs (effondrement des oiseaux des champs de plus de 60%). Pour pallier l’effondrement des insectes pollinisateurs, devinez la pseudo solution apportée. Cette pseudo solution utilise des techniques ultra gourmande en énergies (IA, robots ...), énergies dont la disposition est en passe de s’effondrer. Effondrement garanti !

Quid des riches et ultra-riches ?

Dans un livre, Hervé KEMPF explique comment-les-riches-detruisent-la-planete. Allons plus loin : Supposons que certains accordent un certain crédit aux thèmes que nous venons de résumer. En schématisant fortement, deux possibilités s’offrent à eux.

  • La première consiste à devenir solidaires du reste de la population : contribuer fiscalement à la société et en devenant véritable lobbyistes vers une transformation radicale (permettez moi très temporairement un peu de naïveté - rassurez-vous, ça ne va pas durer). En avez-vous entendu parler ? (moi pas !)
  • La deuxième consiste à jouer le plus égoïstement possible. Reporterre explique dans un premier article comment les autres préparent l’avenir. D’ailleurs, certaines boîtes aident à cette entreprise.
  • Mais, au delà de ces deux articles, permettez-moi de revêtir la peau d’un de ces phénomènes et de tenter de réfléchir selon ses propres critères. Nul doute que, effondrements aidants, je ne pourrai pas survivre seul. Il me faudra de l’aide. Quoi de mieux dans ces conditions qu’une armée de vrais esclaves. Mais, pour tenir ces esclaves, lesquels risquent de se soulever, j’aurai également besoin d’une armée de Combattants de Riches Spéculateurs !
  • Mais, je suis une incroyable mauvaise langue. Rien ne se passe ainsi dans notre monde. J’arrête là mes divagations. La populace pourrait y croire et se soulever avant qu’il ne soit trop tard (vieux motard que jamais !).

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