Le parquet de Valence et une juge des libertés et de la détention du tribunal de Valence autorisent une surveillance particulièrement intrusive et totalement disproportionnée au regard des faits : plus d’un mois de balise GPS sur un véhicule, planques, épluchage de comptes bancaires, géolocalisation du téléphone et identification des contacts, perquisition...
Ca donne une idée au passage des moyens de surveillance et des choses à éviter de faire pour leur échapper.
Bientôt des drones et des descentes du GIPN à l’école pour choper et mettre en GAV un gamin qui a jeté un pétard lors d’un carnaval ?
Afin d’échapper aux caméras de surveillance et aux tirs policiers, bientôt la nécessité de sortir cagoulé avec un gilet pare-balle pour aller coller des affiches de gauche sur une palissade ?
Comme souvent, de gros moyens policiers sont utilisés contre des militant.e.s de gauche concernant des faits anodins, tandis que les grosses entreprises, flics ou oligarques qui commettent des crimes graves sont épargnés ou sont visés par des enquêtes "légères". C’est ce qu’ils appellent "la-république".
A l’automne 2023 on était (et en est encore) dans la criminalisation à outrance des soutiens à la cause palestienne et des critiques des crimes de masse commis par l’Etat israélien. De nombreuses personnes ont été ainsi pourchassées sous le prétexte pratique et faux d’"apologie du terrorisme", tandis que les apologistes des crimes de guerre et de crimes contre l’humanité pouvait soutenir tous les jours à la TV l’armée d’Israël et ses actions meurtrières planifiées qui sont à présent qualifiées de génocide par des instances parfaitement "reconnues".
La justice, les polices et le gouvernement vont-ils faire leurs excuses à toutes les personnes et organisations pourchassées injustement et les remercier d’avoir alerté précocement sur le génocide commis à Gaza ?
Des détails sur cette énième affaire hallucinante :
Dans la Drôme, les gendarmes sortent les grands moyens pour traquer l’autrice de tags propalestiniens
Dans la Drôme, les gendarmes sortent les grands moyens pour traquer l’autrice de tags propalestiniens
Au nom de la lutte contre « l’apologie du terrorisme » post-7-Octobre, le parquet de Valence s’est mis en quatre pour surveiller une jeune femme, autorisant notamment la pose d’une balise GPS sous sa voiture. Elle doit finalement être jugée jeudi (05 décembre) pour des « dégradations légères ».
Pendant plus de cinq semaines, Emma S., une potière et céramiste âgée de 24 ans, a roulé avec une balise GPS sous sa voiture. Sans qu’elle le sache, les gendarmes de la Drôme ont suivi en temps réel tous ses déplacements. Ils ont aussi planqué devant sa maison, épluché ses comptes bancaires et adressé des réquisitions aux opérateurs téléphoniques pour géolocaliser son numéro et identifier ses principaux contacts.
Ce qui a valu un tel traitement à la jeune femme ? Elle est soupçonnée d’une dizaine de tags contre le « massacre à Gaza » et en soutien à la Palestine, à l’automne 2023.
Initialement visée par une enquête pour apologie du terrorisme, Emma S. doit finalement être jugée par le tribunal de Valence, jeudi 5 décembre, pour des « dégradations légères par inscription » (les tags), un « outrage aux forces de l’ordre » pour avoir écrit « ACAB » (pour « All Cops Are Bastards ») sur un mur, ainsi que pour son refus de donner ses empreintes et son ADN lors de sa garde à vue.
Les premiers tags apparaissent le 23 octobre 2023, à La Bégude-de-Mazenc, une petite commune drômoise de moins de 2 000 habitant·es entre Montélimar et Dieulefit.
« STOP MASSACRE À GAZA », est-il écrit sur le mur d’une maison, à la peinture noire. À proximité, le maire trouve une banderole : « SOLIDARITÉ AVEC LES PEUPLES DE PALESTINE, pas de guerre entre les peuples, pas de paix entre les classes ». Il prévient les gendarmes. Sur la route qui mène à Dieulefit, ceux-ci découvrent d’autres inscriptions : « Tu préfères passer ta vie avec Pascal Praud ou Darmanin – ACAB » et une citation (presque exacte) de Paul Valéry : « Car la guerre c’est un massacre de gens qui ne se connaissent pas au profit de gens qui toujours se connaissent et ne se massacrent pas. »
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Alice Becker, l’avocate d’Emma S., juge cette décision « inquiétante pour le balancier entre répression et liberté d’expression ». « À aucun moment, ces tags ne peuvent être assimilés à l’apologie d’un groupe terroriste ou présentés comme favorables aux attaques. »
Avec l’aval du parquet de Valence, et d’une juge des libertés et de la détention (JLD) qui a autorisé l’emploi des techniques d’enquête les plus intrusives, les gendarmes se lancent pourtant dans une véritable traque pour identifier et surveiller Emma S., l’autrice supposée de ces inscriptions. Parmi toutes les qualifications pénales retenues, seule l’apologie du terrorisme, passible de cinq ans de prison, permet un déploiement aussi exceptionnel de moyens.
Dès le lendemain de la découverte des tags, la voiture d’Emma S. est repérée sur une image de vidéosurveillance permettant de lire sa plaque d’immatriculation.
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Ils géolocalisent son trafic téléphonique et constatent qu’elle a pu se trouver dans le secteur quand les tags ont été commis. Dans les fichiers de police, son nom renvoie par ailleurs à des tags commis à Paris en 2019 : « la manif pour tous est homophobe » ainsi que « trans, pd, gouines, on est partout », même si Emma S. n’a pas été condamnée pour ces faits.
- Drôme : gendarmes et parquet utilisent des gros moyens juste pour des tags : balise GPS durant plus d’un mois !
D’autres tags fleurissent le 1er novembre 2023, toujours sur la commune de La Bégude-de-Mazenc et dans le village voisin de La Bâtie-Rolland : « Free Palestine », « STOP au massacre à Gaza », « Pas de guerre entre les peuples pas de paix entre les classes », « ANTIFACHISTE » (avec une faute d’orthographe), « À bas l’impérialisme PALESTINE VINCRA » (avec une autre faute d’orthographe), « Un massacre a lieu en Palestine FRANCE COMPLICE » et « ANTISIONISTE ». Ils sont tracés sur les murs de particuliers ou encore sur le sol d’un rond-point.
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les gendarmes obtiennent de pouvoir utiliser la balise pour un mois supplémentaire, à compter du 8 décembre 2023. C’est une juge des libertés et de la détention du tribunal de Valence qui autorise cette mesure, particulièrement intrusive. Le jour même, les gendarmes contrôlent Emma S. au volant de son véhicule et elle leur donne oralement son adresse. Mais la surveillance continue.
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En prévision de son interpellation, les enquêteurs obtiennent des magistrats l’autorisation de recourir à la « comparution forcée » de la jeune femme et à des « perquisitions sans assentiment » de son domicile, de sa voiture et de son téléphone portable, sous prétexte qu’elle serait susceptible de les refuser.
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Lors des perquisitions, les gendarmes saisissent plusieurs bombes de peinture chez elle et dans sa voiture, ainsi que divers objets à connotation politique : des autocollants pour la libération de Georges Ibrahim Abdallah, des affiches de soutien à la Palestine, d’autres qui portent des slogans contre Emmanuel Macron, la loi Kasbarian et la police, des tracts. Ils extraient quatre images de son téléphone pour les verser au dossier : une publication du site Contre-Attaque, une page de podcasts de Radio France sur l’extrême gauche des années 1970, un « appel international à une semaine d’action contre toutes les guerres » et un photomontage « Nique le capital ».
La jeune femme exerce son droit au silence et refuse de répondre aux questions des gendarmes, dont celles qui portent sur sa « confession religieuse », son avis sur « le conflit israélo-palestinien », ses opinions sur « la police, la gendarmerie ou la justice ». Au terme de sa garde à vue, qui ne dure que huit heures, Emma S. est relâchée sans même être placée sous contrôle judiciaire. La balise posée sous sa voiture, inactive depuis une quinzaine de jours, est retirée le soir même.
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Avisés du procès, les trois propriétaires des maisons visées par les tags (ainsi que le département de la Drôme, responsable du rond-point) auront la possibilité de se constituer parties civiles. Lors de leur dépôt de plainte initial, les gendarmes à la recherche d’un potentiel mobile antisémite leur ont demandé s’ils étaient juifs. Aucun ne l’était. « Catholique », a répondu une femme de 90 ans. « Ce n’est pas dirigé contre ma personne, estimait un homme de 66 ans. Pour moi, ils ont tagué sur mon mur, car il se trouve à l’entrée de la commune et il est bien visible des automobilistes. »
Article complet : https://www.mediapart.fr/journal/france/041224/dans-la-drome-les-gendarmes-sortent-les-grands-moyens-pour-traquer-l-autrice-de-tags-propalestiniens