LA GUERRE ... DES CHIFFRES
Vu de la pénibilité de la lecture sur un écran, l’attention moyenne de l’internaute sur un article en ligne, je vais essayé de faire court et concis. L’objectif n’est pas ici de faire un listing détaillé sur l’irrationalité de la période que nous vivons actuellement mais bien d’essayer de combattre un outil utilisé par les médias main stream et nos gouvernants pour nous faire rentrer dans le rang, nous faire peur et par conséquent nous contrôler, à savoir les chiffres, ceux liés au COVID-19 en l’occurrence.
11 000 morts en France au 9 avril 2020. C’est beaucoup ? Pas beaucoup ? Plus que la normale ? Est ce qu’il y a une surmortalité ? Si un chiffre est balancé comme ça dans un article, une communication, une émission (télé ou radio), une discussion, et bien, quel qu’il soit, il va impacter l’interlocuteur, le lecteur, l’auditeur ou le téléspectateur. Surtout s’il n’est rattaché à aucun élément de comparaison. On se prend le chiffre dans la gueule et puis l’idée fait son chemin, la peur en l’occurrence lorsqu’il s’agit de mort dû à une épidémie hautement contagieuse.
Le décompte macabre du Coronavirus, le compteur des macchabées, c’est rabâché à tout bout de champs dans les médias. Ils s’en délectent, ils se paluchent avec. Et l’effet est anxiogène, c’est garanti. Faisons le même exercice avec n’importe quelle autre cause de décès et l’effet sera le même. Prenez par exemple cette Dépêche AFP fictive qui serait reprise en boucle sur BFM TV « Depuis le début de l’année 2020, environ 30 000 personnes sont mortes à cause du tabac et de l’alcool, 300 morts par jour ! ». Ah merde, je vais peut être arrêter la clope ! Et bah, le chiffre exact n’est pas connu mais c’est l’ordre de grandeur quand on prend les chiffres des causes de mortalité de l’INSEE. Et on peut faire ça avec tout, le nombre d’électrocutés, d’indigestions au foie gras, de furoncles, ...
Pour rappel, les premiers cas officiels en France du COVID-19 ont été identifiés en date du 24 janvier 2020 soit une période considérée ici de 80 jours (81 mais on arrondit à 80 pour faire rond).
Limites de l’approche :
Nous ne sommes pas encore à la fin de l’épidémie
Effet saisonnier des épidémies sur la mortalité (la période d’analyse est donc une période où observe normalement une mortalité plus forte)
Aucune compétence médicale de la part du rédacteur
les chiffres utilisés sont ceux de l’INSEE mais ils datent un peu (2012, choppés sur WIKIPEDIA)
L’approche est celle d’un géographe, on va zoomer au fur et à mesure.
LA FRANCE
Voici les chiffres en vigueur à l’échelle nationale en date du jeudi 9 avril 2020 :
110 000 cas confirmés, c’est à dire ceux qui ont subi un test parce qu’ils avaient des symptomes avérés (fièvre, toux, …).
11 000 décès dont 3 200 en EPHAD
21 000 personnes guéries
30 000 personnes hospitalisées
Ce sont des chiffres qui font peur au premier abord, ça a pas l’air cool mais ça ne me dit rien si je ne les compare pas avec d’autres chiffres.
Pour comparer ces chiffres, il y a les chiffres de l’INSEE :
600 000 morts/an environ ces dernières années (soit 1 650 mort/jour en moyenne) dont (Source : INSEE 2012) :
• 27 % sont dus au Cancer soit 160 000 morts /an
• 26 % sont dus à des maladies cardio-vasculaires soit 156 000 morts/an
• 18 % sont dus au tabagisme et à l’alcool soit 108 000 morts/an
• 10 % sont dus à l’obésité soit 60 000 morts/an
• 6 % sont dus au diabète soit 36 000 morts/an
• 5 % sont dus à des maladies infectieuses (dont la grippe) soit 30 000 morts/an
• 3 % sont à des accidents domestiques soit 18 000 morts/an
Dans les EPHAD, 150 000 morts en 2015 et en France soit une moyenne de 400 morts/jour. (Source : https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/er1094_toile.pdf)
Les même chiffres rapportés à la journée soit 1 650 morts/jour en moyenne en France dont :
• 445 sont dus au Cancer
• 429 sont dus à des maladies cardio-vasculaires
• 297 sont dus au tabagisme et à l’alcool
• 165 sont dus à l’obésité
• 99 sont dus au diabète
• 82 sont dus aux maladadies infectieuses (dont la grippe)
• 50 sont dus aux accidents domestiques
Pour info, Ce nombre de décès journaliers est plus élevé en hiver (mois de décembre, janvier et février), de l’ordre de 1 830, et plus faible chaque année, entre mai et septembre, aux environs d’un peu plus de 1 500.
Ces mêmes chiffres, rapportés à une période de 80 jours (soit notre période considérée, du 24 janvier au 9 avril 2020) ce qui fait un total de 132 000 morts environ :
• 35 600 morts dus au cancer
• 34 300 morts dus à des maladies cardio-vasculaires
• 23 760 morts dus au tabagisme et à l’alcool
• 13 200 morts dus à l’obésité
• 7 920 morts dus au diébète
• 6 560 morts dus maladies infectieuses (dont la grippe)
• 4 000 morts dus aux accidents domestiques
Sur la même période, le Coronavirus a fait 11 000 morts en France. Et là, tout d’un coup, on a un peu plus de recul par rapport à ce chiffre. Oui, c’est beaucoup, trop pour les familles qui ont perdu quelqu’un mais si on fait bêtement la comparaison (un peu neu neu le mec), il y a par exemple plus de mort dus à l’obésité qu’au Coronavirus sur cette période. Plus de mort dû au tabagisme et à l’alcool. La difficulté d’interprétation est que le coronavirus emporte en priorité des gens qui sont déjà malades, vieux, ou avec une santé fragile. En tout cas, si surmortalité il y a, elle concerne principalement les personnes déjà malades d’une autre pathologie ou qui sont vieux. Vieux, EPHAD. Transition.
Autre chiffre dont se gargarisent les médias : 3 200 morts du au COVID 19 dans les EPHAD, toujours sur la même période de 80 jours. Ca fait 40 décès par jour en EPHAD. Aie Aie Aie ! On perd nos vieux. Sauf qu’on en perd en temps normal 400 par jours. Là encore, ça permet de relativiser cette donnée qui est tout sauf anormalement élevée pour cette tranche d’âge.
Autre donnée issue de l’INSEE que vous pouvez retrouver là (https://www.insee.fr/fr/information/4470857) , le nombre total de mort en France sur les mois de mars 2018, 2019 et 2020. Une donnée reprise par un article de Libération du 2 avril 2020 qui cherchait à savoir s’il y avait une surmortalité due au Coronavirus (https://www.liberation.fr/checknews/2020/04/02/covid-19-y-a-t-il-une-surmortalite-en-france-par-rapport-aux-dernieres-annees_1783618). Bon, on est pas encore au pic de l’épidémie, les données de mars 2020 ne sont disponibles que jusqu’au 23 mars mais on voit très nettement que la mortalité du mois de mars 2020 est inférieure à celle du mois mars 2018 et équivalente à celle de mars 2019. Au 31 mars 2018, année où la grippe avait fait près de 15 000 morts dans l’hexagone, il y avait eu 58 836 décès. On fera les comptes lorsqu’on aura les chiffres jusqu’au 31 mars 2020 mais on ne devrait pas dépasser le total de mars 2018 (ou s’en approcher dans le pire des cas).
Figure 1 - Nombre de décès en France (hors Bouches-du-Rhône) au 23 mars 2020 - Effectif cumulé depuis le 1er mars (Source : Insee, état civil)
Autre graphique, toujours issu du site de l’INSEE, le nombre moyen de décès par jour selon le mois et l’année sur la période 2015-2020. L’année 2020 fait partie des courbes les plus basses sur le début d’année. On voit très nettement là la variation saisonnière de la mortalité. Il faudra faire la même approche début 2021 et comparer l’année 2020 avec les autres pour avoir un avis plus précis.
Figure 2 - Nombre moyen de décès par jour selon le mois et l’année (Source : INSEE)
LA REGION AUVERGNE RHONE-ALPES
La région Auvergne Rhône Alpes, c’est à peu près 8 millions d’habitants en 2020. C’est la deuxième région la plus peuplée de France après l’Ile de France. Si on compare (voir carte ci-dessous) le nombre de décès entre le 1er et le 23 mars 2020 et la même période en 2019, on voit les régions où il y a une surmortalité entre les deux périodes, surmortalité qui peut être du au COVID-19 mais je n’ai aucun élément pour le confirmer :
Le grand est et la région Ile de France.
La région Auverge Rhone Alpes a un ratio inférieur à 1, c’est-à-dire que le nombre de décès en mars 2020 est inférieur à celui de mars 2019. Il n’y a donc , sur la période considérée aucune surmortalité due au virus.
Figure 3 - Nombre de décès du 1er au 23 mars 2020 rapporté au nombre de décès du 1er au 23 mars 2019 (Source : INSEE)
La région AURA est donc peu touchée par le virus au moment de la rédaction du papier même si une lecture rapide du graphique ci-dessous peut donner l’impression du contraire (et ouais c’est une courbe qui monte quand même). Au 8 avril 2020, 654 décès sont dus au COVID-19 dans notre région.
Figure 4 – Evolution du nombre des décès en Auvergne Rhone Alpes attribués au COVID-19 (Décès en milieu hospitalier)
654 décès, c’est beaucoup ? Pas beaucoup. Et bien, pour cà, il faut aller consulter les chiffres de l’ARS qui nous indique qu’il y a eu environ 63 000 décès à l’échelle de la région en 2014 (source : https://www.auvergne-rhone-alpes.ars.sante.fr/sites/default/files/2017-02/BVS_2016_03_Mortalit%C3%A9.pdf).
63 000 décès en moyenne (on va considérer ce chiffre comme une moyenne fiable mais il faudrait faire la comparaison avec d’autres années) sur une année en région AURA. Ca fait en moyenne 170 morts par jour en temps normal, et encore ce chiffre est certainement plus élevé en période hivernale et printannière. Entre le 11 mars et le 8 avril (période considérée sur la figure 4), il y aurait donc eu selon cette règle arithmétique simple environ 5 100 décès en région AURA. Rapporté à ce chiffre (certes théorique), celui de 654 décès apparaît déjà plus mesuré. Et comme, les derniers chiffres (Figure 3) ne montrent pas de surmortalité par rapport à la normale dans la région, on peut être interpréter ce chiffre de la manière suivante : ce sont des gens qui, de toute façon, serait décédée car malade, fragile ou vieux. C’est morbide, c’est vrai, c’est fataliste mais c’est une vérité que l’on entend pas ou peu. Les quelques cas relevés dans les médias de personnes jeunes décédées à cause du Virus sont très rares et à ranger dans la catégorie fait divers. Par contre, brandir ces quelques cas isolés à une population est très efficace pour la manipuler et lui faire croire qu’elle court un grand risque, et pas uniquement les personnes fragiles.
654 décès, 2 900 personnes malades hospitalisées pour 8 000 000 d’habitants au 9 avril 2020. 0,081 décès pour 1000 habitant. Est ce que ce sont les chiffres révélateurs d’une hécatombe ? D’un problème de santé publique majeur pour notre région qui justifierait de rester confiné encore pendant des semaines ? Et bien, non, bien évidemment. Et cela est encore plus frappant si on regarde les chiffres par département. Voici les chiffres au 9 avril 2020 :
Détail des cas hospitalisés par département, depuis le début de l’épidémie (https://france3-regions.francetvinfo.fr/auvergne-rhone-alpes/carte-coronavirus-covid-19-voici-se-trouvent-2908-malades-hospitalises-auvergne-rhone-alpes-1796941.html) :
• Ain : 124 cas (31 décès)
• Allier : 53 cas (10)
• Ardèche : 107 cas (35)
• Cantal : 26 cas (0)
• Drôme : 247 cas (69)
• Isère : 228 cas (35)
• Loire : 475 cas (90)
• Haute-Loire : 22 cas (4)
• Puy-de-Dôme : 74 cas (14)
• Rhône : 1150 cas (273)
• Savoie : 122 cas (20)
• Haute-Savoie : 280 cas (73)
LA DROME
La Drôme, en tant que département, c’était 517 000 habitants au dernier recensement de 2019. Sur cette population, on compte au 9 avril 2020, 247 cas avéré de COVID-19 qui ont nécessité une hospitalisation et 69 décès. Ca fait donc un ratio de 0,133 mort pour 1000 habitant. 247 cas graves pour une population de 517 000 habitants. 0,047 % de personnes infectées et qui ont été obligé d’aller à l’hôpital. Pas besoin d’être docteur en médecine. C’est pinuts. La Drôme n’est absolument pas en situation d’urgence sanitaire.
QU’EST CE QUE CA NOUS DIT TOUT CA ?
Que ce soit à l’échelle de la France, de la région AURA, ou du département de la Drôme, la situation d’urgence sanitaire décrétée n’est absolument pas avérée par tous les chiffres qui ont été cités.
Le décompte macabre lié au COVID-19, qui sert de curseur et d’outil pour justifier notre confinement actuel est tout sauf un argument si on compare les chiffres habituels distillés dans les médias sur l’épidémie (nombre de cas avérés, nombre de morts, ...) à ceux fournis par l’INSEE (ou d’autres organismes comme l’ARS) sur la mortalité des francais :
600 000 morts en moyenne tous les ans en France,
1750 morts par jour.
400 morts/jour dans les EPAHD.
300 morts par jour du au tabac et l’alcoolisme.
…
La situation n’est absolument pas alarmante dans bon nombre de régions et de départements français. Par exemple, 26 cas de COVID-19 hospitalisés dans le Cantal (145 000 habitants en 2019) pour 0 décès. On voit donc tout l’intérêt de faire une analyse plus détaillée de l’impact du virus à l’échelle des régions et encore plus des départements car la France n’est pas un tout. Paris n’est pas Montélimar. L’ile de France n’est pas la Bretagne. Il y a des réalités géographiques différentes dans notre vécu avec ce virus et il serait intéressant d’en tenir compte dans les futures mesures de déconfinement. Pourquoi continuer à être confiné de cette manière alors que certaines zones géographiques pourraient retrouver une vie « normale », sortir de chez eux, bavarder de tout ça sans risquer de se faire demander un papelard ridicule. Et ceci dès à présent quitte à appliquer certaines mesures préventives.
Autant le confinement pouvait se justifier dans les premières semaines pour ne pas engorger les services hospitaliers et pour limiter sa propagation, autant il apparaît complètement abusif et arbitraire de le prolonger encore des semaines, notamment dans les régions rurales non touchées massivement par le virus. C’est le cas pour la région Rhône Alpes mais c’est également valable pour toutes les régions du sud de la France.
Et puisque le sujet de l’article était les chiffres et leur utilisation par les médias. On va finir par deux chiffres qui en disent long sur la nature plus profonde du problème que vivent actuellement les hôpitaux et par répercussion, tout le pays entier. Ce sont des chiffres qui font partie d’un article du monde diplomatique d’Avril 2020 « Jusqu’à la prochaine fin du monde ... » rédigé par renaud Lambert et Pierre Rimbert :
En 1980, il y avait 11 lits d’hopital pour 1000 habitant.
En 2020, on en comptait plus de 6 pour 1000 habitants.
Voilà le vrai problème, le dézingage de l’hôpital par les politiques néolibérales, la gestion managériale des services hospitaliers depuis 40 ans avec l’appui de nos élus qui ont été (en majorité) favorable à la « réforme », la « modernisation » de l’hôpital. L’ennemi n’est donc pas invisible, bien au contraire. Il est présent dans les hautes sphères de l’état, il est visible à l’assemblée, au sénat, à l’élysée. Et il s’appuie sur un virus pour faciliter le passage en force de mesures qui nuisent à notre liberté de circulation, au droit du travail, à nos retraites, à nos conditions de vie d’une manière générale.
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