Contre les guerres en cours et la guerre qui vient : stopper les complexes militaro-scientifico-industriels français

Les pseudo embargos laissent place au libre marché reconfigurable à volonté

lundi 14 octobre 2024

Le capitalisme mondialisé permet partout la continuité des approvisionnements en matériels de guerre, notamment électroniques, qu’il y ait ou pas d’embargos.
Des exemples ici avec les échanges scientifico-techno-militaires d’entreprises françaises avec la Russie et Israël concernant les puces ou des matériels à utilisation « duale ».

La guerre n’est pas un événement fortuit qui nous tomberait sur la tête, la faute à pas de chance, c’est un processus, une infestation déjà présente dans toutes les stuctures de la civilisation industrielle (la masculinité toxique, les Etats et le capitalisme, et le système techno-scientifico-industriel à leur service), une planification de long terme.
La guerre est permanente dans la civilisation industrielle, c’est un de ses carburants, et elle prend régulièrement, à petite ou grande échelle, la forme de la guerre militaire.
Guerre aux pauvres, guerre aux rebelles, guerre aux femmes, guerre à la nature, guerre économique, guerre pour le pouvoir..., la guerre est partout.
Vraiment s’opposer aux guerres militaires industrielles signifie s’opposer à la civilisation industrielle, la démanteler et chercher à construire des sociétés pacifiées et soutenables. Par exemple commencer à déserter et contester la recherche scientifique qui alimente les meurtrières innovations militaires.

Contre les guerres en cours et la guerre qui vient : stopper les complexes militaro-scientifico-industriels français

Guerres & Puces

- La dure réalité de la microélectronique en temps de guerre mondialisée - Groupe Grothendieck
En pleine montée du bellicisme et de la barbarie au Moyen-Orient et pendant que Poutine et Biden nous refont la Guerre Froide avec notamment une nouvelle menace atomique, il nous faut redire encore et encore en quoi la France participe, avec son « écosystème de la microélectronique » aux guerres, avec ses morts, ses destructions et ses colères légitimes, de part et d’autre du globe.

« Il existe un lien direct entre semi-conducteurs et puissance militaire [… ]. Bien que la plupart des puces produites aujourd’hui soient utilisées à des fins civiles, les grandes armées du monde sont de plus en plus dépendantes des semi-conducteurs les plus avancés. »

(...)
Et la révélation est importante : en 2023 il y a eu une augmentation par six des exportations françaises de biens à double usage vers Israël. En effet le montant passe de 34 millions d’euros en 2022, à 192 millions d’euros en 2023, avec notamment 154 millions en puces (capteurs, lasers, etc).
(...)
« STMicroelectronics est un des leaders européens du semi-conducteur, avec un chiffre d’affaires de 8,35 milliards de dollars en 2017 et 120 millions de dollars domestiques en Israël, ce qui fait de STMicroeletronics l’un des plus grands acteurs du semi-conducteur en Israël. »

Les guerres 2.0 ont un appétit gargantuesque en puces (contrôleurs, capteurs, processeurs) parce que le matériel jetable, c’est-à-dire les munitions, les missiles et les drones kamikazes en sont truffés. Le plus souvent, même des gros producteurs de puces comme Israël ou la Russie ne peuvent combler cet appétit avec seulement la production interne. Il faut donc rafler les puces partout où il y en a : des machines à laver kazakh aux usines de la vallée grenobloise, tout est bon pour combler l’appétit sans fin de Moloch.
D’où le fait que les exportations de puces françaises montent en flèche vers Israël et la Russie.
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Les embargos servent surtout à calmer les opinions publiques envers les vendeurs d’armes quand le sang éclabousse trop les caméras, mais n’ont jamais été réellement mis en application. Ils n’ont pas un rôle éthique du genre d’embargo qu’avait imposé De Gaulle à Israël en 1967 après l’attaque contre l’Égypte, espérant ainsi temporiser les déjà voraces appétits d’Israël. Les embargos aujourd’hui sont une manière de contraindre l’économie des ennemis à se reconfigurer.
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En pratique, le business l’emporte toujours sur le politique car le business est la vrai politique de notre temps. Enfin… le business couplé à l’accroissement sans limite de puissance, quitte à foutre en l’air des pans entiers du globe, à provoquer la haine de population pour trois générations, et à laisser planer sur la Terre entière des menaces d’holocauste atomique.

Dans la guerre mondialisée, il n’y a plus cette ancienne rupture économique et sociale des guerres mondiales, où les fronts et frontières étaient bouclés, barricadés, et où la pénurie s’installait. Les échanges mondialisés et supportés par les réseaux virtuels s’accommodent maintenant d’affrontements durs et sanguinaires sur les fronts et frontières par un ré-agencement constant des routes et échanges économiques. Les pôles de puissances économiques maintenant variés et multiples (zone chinoise, zone étasunienne, zone singapourienne, zone indienne, zone turque, zone européenne, zone du golfe persique, etc) font qu’il est facile de changer de fournisseurs, d’acheteurs ou de vendeurs d’une denrée et d’échanger devises et actifs avec d’autres agents économiques.
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Prenons la Russie. Elle a complètement reconfiguré son système bancaire vers la Chine, réorienté ses exportations vers les Brics et dispose d’une diaspora aux quatre coins du monde permettant le transit de puces et autres matériels sensibles par des sociétés écrans singapouriennes, chinoises ou turques. Et vu que la demande en matières premières est bien souvent beaucoup plus forte que l’offre, au fur et à mesure de l’épuisement des ressources et du changement climatique, il est par exemple facile pour la Russie de vendre son excédant de gaz et d’autres matières pétrolifères à qui le veut. Poutine peut même se glorifier d’un peu de croissance et d’une augmentation générale des salaires de 17 % à 19 %. Tournée générale, y’a rien à voir ! En somme, la routine capitaliste dans la guerre mondialisée.
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Contre les guerres en cours et la guerre qui vient : stopper les complexes militaro-scientifico-industriels français

Dans tout ce merdier, les industriels de l’armement français et les marchands de puces, notamment Safran, Thales, Nicomatic et STMicroelectronics s’en sortent bien. Ils utilisent des intermédiaires chinois, singapouriens ou turques pour vendre des puces à des États en guerre de « haute intensité ».

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On ne dira jamais assez qu’il ne faut pas voir tout le temps les quantités d’armes exportées mais plutôt le type (par exemple les boîtiers de détection Thalès classé ML5 « 
Matériel de conduite de tir et matériel d’alerte et d’avertissement connexe » peuvent avoir de grosse capacité de nuisance quand ils sont installés sur des drones israélien Hermes 900, même si leur coût n’est pas élevé, ni les quantités astronomiques.)

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« La concurrence israélienne est, quant à elle, très performante sur certains segments de haute technologie (matériels électroniques, drones, systèmes spatiaux, missiles). Les exportations d’armes israéliennes ont doublé en une décennie, en raison des changements de l’environnement stratégique en Europe et de la normalisation des relations diplomatiques avec plusieurs pays arabes. Malgré le conflit découlant de l’attaque du 7 octobre, l’industrie israélienne continue à proposer ses offres à l’export »
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Les échanges scientifico-techniques avec Israël ne se sont pas arrêtés, le Haut Conseil Franco-Israélien pour la Science et la Technologie (HCST) continue de délivrer des bourses à des chercheurs, pendant que des gros instituts de recherche français nouent des partenariats de plus en plus serrés avec des pôles de recherches israélien. Notamment l’Institut national de recherche en informatique et automatisme (INRIA) qui a signé un accord cadre avec le Technion israélien avec à la clé une enveloppe bipartite de 720 Millions d’euros pour développer l’ordinateur quantique [28]. De plus l’INRIA continue a vouloir envoyer des chercheur en Israël. L’INRIA n’est qu’un exemple, mais les échanges scientifiques franco-israéliens sont fructueux pour les deux « start-up nation » et mériteraient d’être cartographiés et dénoncés.
(...)
La marche forcée scientifico-militaire n’a pas de point de vue « morale », au contraire, plus la guerre avance, plus « l’innovation de Défense », comprenez la mobilisation scientifique pour la guerre sera de mise. Il faut du jus de cerveau concentré et des savoirs-faire spécifiques pour que les drones tuent mieux, que l’IA détecte mieux les cibles et que les missiles soient le plus performant possible pour détruire ! Le technocapitalisme, dont la recherche publique est l’un des rouages (et le chercheur un pion mais un pion volontaire !), a besoin de ces cerveaux bien enrégimentés pour continuer à tuer et vendre des armes !

Devant l’atrocité des massacres à Gaza, au Liban mais aussi sur le front russo-ukrainien, ou au Yémen, la neutralité scientifique n’a plus sa place. Continuer tout bonnement son train-train de recherche en IA, en informatique, en microélectronique, en résistance des matériaux, continuer à bosser dans des laboratoires où Thales ou MBDA ont investit et donnent des conseils, être chercheur ou ingénieur chez ST ou Airbus, c’est sûrement avoir du sang sur les mains.
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Cependant, il n’y a pas les mêmes responsabilités entre un trimard faisant les 3-8 en salle blanche et le chef de projet R&D d’une multinationale, qui passe des commandes et comprend à quoi vont servir les puces de son unité de conception. Mais de toute façon, au-delà des parcours individuels, que ces usines et ces instituts de mort ferment, malgré les emplois, malgré la Connaissance, malgré le « Progrès », malgré la manne financière, serait la meilleur des solutions politiques pour mettre fin à la destruction sans concession à laquelle notre génération assiste.
(...)
Il paraît clair que la France est rentrée tête baissée dans une économie de guerre et qu’elle se prépare à la guerre de « haute intensité ». Les signaux faibles de ce futur engagement sont pléthores (3 milliards pour les hôpitaux militaires, Jeux de rôles militaires avec l’OTAN, obligation pour les industriels de l’armement de faire des stocks, loi sur les ingérences étrangères, bourrage de crane intensif, etc). Encore beaucoup de personnes nient l’évidence et ce même après les multiples prises de parole de Macron, du Ministre des Armées Lecornu et des chefs militaires. Elle y rentrera doucement en guerre, elle y ai déjà rentré en fait !
(...)
Les militaires appellent cette dernière « composante » du militarisme français, les « forces morales de la nation », qui devront, en cas de coup dur, être derrière les « premiers de cordée » cette fois habillés tout de kaki, arme à la main pour sauver les valeurs mortifères de la France.

Les personnes qui soutiennent le calvaire palestinien en ce moment, les anti-militaristes convaincus ou qui viennent de le devenir, les sympathisants des causes anti-impérialistes, anti-colonialistes, les pacifistes, les anarchistes anti-nation, tous commencent à comprendre l’ampleur des forces bellicistes des pays du sommet capitaliste et de comment la France mène sa barque industriellement et militairement là dedans.
(...)
Des groupes en réseaux comme Stop Arming Israël ou le Réseau de surveillance de l’Observatoire des armements, ont compris qu’il était intéressant d’agir localement sur le complexe scientifico-militaro-industriel, dans chaque ville de France, d’Angleterre ou d’Allemagne où ces instituts et multinationales se déploient. Manifestations, piquets devant les usines, jets de faux sang, sabotages, pression sur les pouvoirs publics, discussions dans les laboratoires, affiches de la honte, mobilisations des syndicats des boîtes, enquêtes critiques… un large panel d’actions se met en place un peu partout en France d’un mouvement anti-militariste qui, nous l’espérons, ne s’arrêtera pas au massacre des palestiniens, mais embrassera petit à petit toutes les misères des guerres en cours dont la France trempe salement.
(...)

NOTE : Safran et Thalès sont par exemple présentes en Drôme (respectivement à Rovaltain et à Valence)

P.-S.

- Israël tue au Liban et en Palestine, Thalès complice ! - Au petit matin du mardi 1er octobre, un groupe de personnes personnes se sont rassemblées devant le site de Thalès à Toulouse. Avec une banderole « Stop arming Israel », les activistes ont distribué des tracts aux voitures. Ils et elles ont scandé des slogans pour dénoncer la complicité criminelle de l’entreprise d’aéronautique avec le génocide en cours à Gaza.
Récemment, le média indépendant Disclosed nous apprend que plusieurs matériels de Thalès destinés à Israël sont actuellement bloqués par la douane et ne peuvent pas être livrés. Sans aucun doute, cette suspension discrète de livraison à destination d’un État génocidaire est un résultat encourageant de la mobilisation croissante contre l’armement d’Israël qu’il s’agit maintenant de pérenniser et de renforcer.


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