Marcher... marcher encore, depuis plus de trois heures je marche, parfois l’haleine courte, en remontant le ravin de Peyre Rouge passant sous le Pas de Maupas... Le temps est magnifique malgré le tard de la saison. Le parking de Fréchinets est loin la forêt d’épicéas et de mélèze a cédée le pas aux pierres, le paysage commence à dévoiler son théâtre grandiose.
Deux femelles bouquetins se chauffent au soleil en observant ma progression... Je me fais discret pour ne pas les déranger outre-mesure... Un moment j’hésite entre le Pas des Bassachons et celui du Fouillet, je préfère ce dernier pour son coté plus aérien... plus engagé. L’arrivée sur le plateau, à cette époque, est toujours d’une grande plénitude, désert un immense espace s’ouvre pour abriter ma solitude.
Toisé par le Grand Veymont, je lui tourne le dos face au vent devenu glacial à 1800 mètres d’altitude... Je suis environné de centaines d’hectares que seul je parcours, avec comme seuls témoins ; le ciel et la fragile pelouse alpine... Les marmottes sont déjà dans leur sommeil hivernal, les oiseaux se sont tus, l’edelweiss est desséchée...
L’arrivée face au Mont Aiguille est toujours, comme une révélation, dans son faste minéral... les courbes du plateau de Peyre Rouge le masque, pour graduellement le dévoiler , lieu symbolique de la naissance de l’escalade, il est à la frontière entre Vercors et Trièvres... Pensant au grand Sebastião Salgado je ne peux qu’immortaliser ce moment en noir et blanc, en m’imaginant comme lui, découvreur de site naturel intact de la prédation humaine...