Sécheresse structurelle, pesticides, insecticides neurotoxiques « tueurs d’abeille », gestion de l’eau...

Soutenir les paysans et repousser les lobbys de l’agro-business et leurs soutiens

samedi 8 août 2020, par Camille Pierrette.

Bon petit texte :
• A propos du retour des insecticides neurotoxiques « tueurs d’abeille ».
• A propos de la gestion de l’eau en période de sécheresse.
• A propos des priorités dans le cadre d’une agro-industrie destructrice qui n’arrive pas à se remettre en question, et ça le texte ne le dit pas mais on l’a tous compris : car dépendante du capitalisme et de l’Etat.

➡️ Les solutions évoquées (très efficaces et réelles) ne pourront jamais se faire sans l’abolition de ce système mortifère qui impose son idéologie et modèle du tout chimique + mécanisé. On ne doit pas sauver ni essayer de composer avec (ou « verdir ») un modèle sociétal qui maintient le peuple, paysans y compris, dans une dépendance à l’argent, au commerce, à l’exploitation, à l’extractivisme etc...

(post de R Ki-Manio)

Soutenir les paysans et repousser les lobbys de l’agro-business et leurs soutiens

Donc, si j’ai bien suivi...

Il y a un problème de maladie transmise à la betterave par le puceron, contre lequel il est difficile de lutter car les néonicotinoïdes (insecticides « tueurs d’abeille » récemment interdits par la France) ne peuvent plus être utilisés et que le territoire agricole ne possède plus suffisamment d’aires d’accueil des auxiliaires naturels aidant à lutter contre les ravageurs parce que les parcelles sont beaucoup trop vastes, d’une seule variété, et sensibilisées par le dérèglement climatique.
La réponse de l’Etat, sous pression de la FNSEA (toujours dans les bons coups pour que la population perde de plus en plus d’empathie envers cette partie du monde paysan) : autoriser de nouveau les néonicotinoïdes durant les trois prochaines campagnes (3 ans) sur la betterave dans les secteurs concernés, avec la quasi-certitude que les producteurs d’autres cultures atteintes par les pucerons réclameront aussi -légitimement- ce même droit, et l’obtiendront.
Quelle compensation demandée aux agriculteurs : Néant.
Quelles mesures d’urgence pour compenser l’absence de résilience des cultures : Néant, on reste sur les mêmes programmes déjà existants d’aides à la plantation de haies ou à l’agroforesterie (qui a une forte tendance à être de la monoculture de noyer) sans aucune obligation proportionnelle au parcellaire des exploitations ou à leur actuelle nudité.
Détail : la betterave est majoritairement destinée à produire du sucre, au sein d’infrastructures très impactantes pour l’environnement. Sachant que le sucre, en particulier celui de betterave, est considéré comme un poison sociétal (le seul diabète coûte 15 milliards par an à la sécurité sociale, et l’obésité 5 milliards environ, sans compter les autres problèmes de santé qu’il engendre pour la dentition, la stimulation des cancers, etc...), l’idée aurait pu être aussi d’en réduire la production pour la remplacer par celle d’édulcorants naturels ou le recours au miel ou aux fruits, qui n’arrangent pas l’industrie agro-alimentaire.
L’Etat calcule étrangement le coût sociétal de ses mauvaises stratégies agricoles.

Même chose pour l’eau :
face aux sécheresses dramatiques que nous affrontons, et aux difficultés réelles que les exploitants ont à produire certaines plantes ou élever des bêtes, l’Etat propose -sous la pression des mêmes lobbies habituels- de faciliter la création des bassines de rétention et autres retenues collinaires... pour pouvoir continuer d’irriguer des cultures inadaptées au terroir, souvent dans des champs qui ont été drainés.
Compensations exigées de la part du monde agricole : Néant.
Bénéfice environnemental : Néant.Plutôt l’inverse (échauffement de l’eau, rupture de l’alimentation des nappes et de la reconstitution de l’hydrologie du sol, pertes supérieures par évaporation, dégradation de nombreuses zones humides -utiles à l’infiltration, à la filtration de l’eau avant percolation, à des centaines d’espèces animales ou végétales souvent menacées- par leur transformation, risque de destructuration des sols et d’accentuer la rétractation des argiles, etc...).
Bénéfice alimentaire : Néant. Nombre de grandes cultures irriguées le sont pour l’alimentation animale, maïs en tête, ou pour la bière. Si un animal qui se nourrit d’herbe peut fournir des protéines avec un bilan positif (jusqu’à 2kg pour 1kg de protéines végétales consommées), les chiffres s’effondrent lorsqu’ils consomment du maïs ou d’autres protéines issues de grande culture qui pourraient être directement consommées par l’Homme (aussi bas que 0.2 kg de protéine animale pour 1 kg de protéine végétale consommée par le bétail, je vous mets le lien dans les commentaires).

Face à cette urgence hydrologique et sanitaire, intrinsèquement liée à la transformation du paysage par et pour l’agriculture industrielle, il existe cependant un certain nombre de mesures pouvant être mises en place et que de nombreux paysans organisent sans l’aide de l’Etat, ni des chambres d’agriculture, ni des organisations locales ou des régions.

La couverture permanente du sol (incitée mais pas exigée), la réduction des dimensions des parcelles (sujet tabou, car les exploitations sont calibrées pour y faire tourner du matériel désormais gigantesque pour lequel les exploitants sont endettés), la stimulation de la vie du sol et de sa capacité de rétention d’eau par le biais de la végétation (prairies provisoires ou permanentes, arbres de rapport, trognes productives de biomasse à y intégrer, haies pour l’infiltration ou le blocage de l’érosion...), la création de zones humides stratégiques ou de réseaux de fossés, la fin des coupes à blanc de plus de 0.5ha et la restitution d’une partie du bois et de la totalité des purges lors des abattages en forêt sont autant de pratiques de bon sens parmi d’autres que des réseaux d’agriculteurs, d’agronomes, de sylviculteurs, d’écologues mettent ensemble en place un peu partout, aussi bien en France qu’ailleurs dans le monde.

Alors j’en tire deux conclusions :
- soit les gens qui nous gouvernent sont d’une imbécillité et d’une incompétence à ce point incroyables qu’elles oblitèrent toute capacité de notre agriculture à changer à temps, nous plongeant dans un péril alimentaire (et de soif) dont ne nous sortirons pas forcément, notamment parce que les enjeux économiques à courte vue les aveuglent.
- soit il existe au sein de l’Etat un népotisme, un conservatisme et une corruption qui poussent les décideurs à nous diriger vers tous les mauvais choix, poussés aussi par les baronnies agricoles, l’agro-industrie, l’industrie agro-alimentaire, l’agro-chimie qui tiennent les campagnes et ralentissent tous les processus de transition qui pourraient être mis en place parce qu’ils ne leur rapportent pas autant d’argent.

Pas la peine de vous exciter, ni de vociférer : oui, je sais que c’est dur pour les paysans, je sais qu’ils nous nourrissent, je sais qu’ils sont endettés et qu’eux aussi veulent envoyer leurs gosses à la FAC, et que le consommateur peut être un sacré connard qui va toujours au moins cher et prend des bains tous les jours ou lave sa voiture en plein cagnard.

Et alors ?
On va bouffer de la poussière et regarder tout crever pour autant ?

Défendons l’agriculture, c’est elle qui nous fait vivre.
Accompagnons, défendons, promouvons ceux des paysans qui s’acharnent à faire leur boulot correctement, dignement, respectueusement.

Mais, bon sang, secouons tous les (-j’ai effacé la formule que j’avais écrite-) qui les exploitent, les manipulent, les empêchent d’évoluer, et les consommateurs qui veulent n’importe quoi, n’importe quand, parce qu’on les a conditionnés pour qu’ils croient que leur liberté et leur plaisir passent par ça, sans conséquence aucune.
(Photo : secteur Yonne centre, sur 2.5 km² un seul arbre et aucune haie. Le cadre de la photo représente moins d’1/8 d’une zone analogue en termes de densité d’arbres et de haies, où certaines cultures sont irriguées car les sols argilo-calcaires y sont très secs l’été)

(post de Eric Lenoir)

Les autres secteurs n’ont pas trainé à demander des dérogations :
- Pesticides : les producteurs de maïs veulent aussi déroger à l’interdiction des néonicotinoïdes - Après la dérogation accordée aux producteurs de betteraves, d’autres agriculteurs tentent d’obtenir la même chose du gouvernement. (...) « La maïsiculture est également en situation d’impasse totale pour lutter contre les mouches », soutient dans un communiqué le syndicat des producteurs de maïs AGPM, branche spécialisée de la FNSEA. « Une recrudescence de ces ravageurs aurait des conséquences dramatiques pour les producteurs et les éleveurs qui comptent sur le maïs fourrage pour nourrir leurs animaux », poursuit l’AGPM, demandant que « la voie dérogatoire pour l’accès aux solutions efficaces » soit également « ouverte pour la culture du maïs ».

P.-S.

- Articles de la Confédération paysanne :

- pour la Drôme et articles complémentaires :


Forum de l’article

  • Sécheresse structurelle, pesticides, insecticides neurotoxiques « tueurs d’abeille », gestion de l’eau... Le 9 août 2020 à 16:06, par Déborah

    Comment faire pour sortir de ce système ? Je ne vois qu’une seule chose : s’unir. Je n’ai pas les compétences en agronomie pour pouvoir porter un tel mouvement, je suis juste consciente des problèmes écologiques et économiques que pose notre système... et la sincère volonté de créer un nouveau système, pour que nos luttes ne soient pas seulement politiques et idéales, mais deviennent pragmatiques. Pour attaquer le mal à la base, il faut modéliser, informer. Une association peut être un premier outil. Soit elle existe, soit on la crée. En Isère, il existe une association qui soutient et informe les nuciculteurs pour réduire les pesticides voire les abandonner.... unissons-nous pour un monde meilleur. Sans agriblashing, bien au contraire. Cherchons dans nos réseaux qui serait intéressé par un tel projet... je cherche de mon côté.

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