Ma femme chérie, on est saccagés de l’intérieur par tout ce sang, cette crasse, ce vacarme. Je veux rester inchangé pour toi. Je veux te revenir tel que j’étais avant. Comment atteindre ces autres rivages ? Ces collines bleues ? L’amour, d’où vient-il ? Qui a allumé en nous cette flamme ? Aucune guerre ne peut l’éteindre, le soumettre. J’étais prisonnier. Tu m’as libéré.
Nous. Nous, ensemble. Un seul être. Confondu comme l’eau qui coule, je ne te distingue plus de moi. Je te bois. Maintenant. Maintenant.
Ce grand mal, d’où est-ce qu’il est venu ? Comment est-ce qu’il s’est faufilé dans le monde ? Quelle graine, quelle racine l’a fait pousser ? Qui fait ça ? Qui nous tue ? Qui nous arrache la vie et la lumière ? Et nous montre, pour nous narguer, ce qu’on aurait pu connaître ? Est-ce que notre ruine profite à la Terre ? Est-ce qu’elle aide l’herbe à pousser, le soleil à briller ? Est-ce que cette noirceur est en toi, aussi ? As-tu toi aussi traversé cette nuit ?
On était une famille. Il a fallu se séparer, se défaire. Pour se retrouver dressés l’un contre l’autre. Chacun faisant de l’ombre à l’autre. Comment on l’a perdu, ce bien qu’on avait reçu ? Comment on l’a laissé filer ? S’éparpiller sans y penser ? Qu’est ce qui nous empêche de tendre la main ? D’atteindre la grâce ?