La loi, Mme la Préfète, je m’en bats les c…
Ce jeudi matin 25 aout, ça lavait à grande eau sur la place de l’église de Crest. Et ma vitrine, et ma terrasse, et mes tables, et mes chaises, et mes plantes, pour bien faire, mon bout de chaussée devant mon établissement. C’est plus propre. Ça vend mieux. Ça bat les concurrents, ces moutons respectueux de la loi.
La loi ? dit le commerçant, je m’en bats les c…
La loi ? dit l’industriel de Montélimar, je m’en bats les c… Trop d’impôts. Après tout je fais ce que je veux de mon argent durement gagné à la sueur du front de mes ouvriers. Je le place dans les îles.
La loi ? dit le propriétaire qui loue à prix d’or des cagibis passoires énergétiques… Je m’en bats les c…. Je loge des pauvres, s’ils ne sont pas contents, ils n’ont qu’à dormir sous les ponts.
La loi, dit l’expert-comptable des pieds du Vercors, expert surtout en magouilles, je m’en bats les c…Je place mon fric et celui de mes clients dans une dictature peu regardante.
La loi, Mme la Préfète, l’Etat Mme la Préfète, votre arrêté, Mme la Préfète, on s’en bat les c…
Pourquoi ces Crestois ne le feraient-ils pas ? L’exemple ne vient-il pas d’en haut ? Et si la tête est pourrie, comment les membres pourraient-ils ne pas l’être ?
Et la foule de renchérir : mais si eux ne respectent pas la loi, pourquoi devrions-nous le faire ?
Alors de Luc à Die, d’Espenel à Livron, de Loriol à Montélimar, de Montélimar à Marseille, chacun de se dire : pourquoi serais-je pénalisé d’être un citoyen, une citoyenne responsable ? A quoi sert le civisme, sinon à être le dindon de la farce. Ainsi de fil en aiguille s’assèche le Rhône, s’épuise la Provence, se détricote le corps civil. Bientôt ne tient plus, se déchire, agonise, succombe à la première pitchenette.