L’un des motifs légitimes de sortie malgré le confinement a été oublié : comment ceux qui n’ont pas de machines à laver tiendront-ils leur linge propre ? Comment les gens du voyage – dont il existe un camp à Eurre - comment les pauvres maintiendront-ils leurs vêtements propres, et leur hygiène personnelle correcte, tant pour leur propre santé que celle des gens qu’ils croiseront ?
On dira : vu l’ampleur de la crise, le point est quelque peu anecdotique. Oh certes anecdotique quand on est un gras politicien ou haut fonctionnaire aux revenus garantis : ces trivialités leur passe très loin au-dessus de la tête. Pas de machine à laver : enfin, monsieur, nous ne sommes plus au Moyen Age !
Et bien si : nous y retournons même à grande vitesse. Sous nos yeux se reconstituent les anciens ordres. Sous une forme moderne, bien sûr, progressiste, il va de soi : les premiers de cordée d’une part, les sans-dents de l’autre. Ce ne serait encore qu’un défaut accessoire si notre parlement ou nos institutions politique donnaient la voix à ceux qui sont majoritaires dans notre société.
Si les sans-dents, les petits, les gilets jaunes - au nombre desquels une large proportion de soignants - si les classes moyennes avaient accès aux commandes à la mesure de leurs poids démographique, on n’oublierait la question des machines à laver, les sans-abris.
Edo ou la Cour des miracles
Comment se fait-il que les intérêts des riches ne soient jamais oubliés, et servis promptement, tandis que ceux des pauvres, qui font tourner le pays, sont systématiquement oubliés ? Qu’il faille des années et des combats sans nombre pour que leur voix soit un peu entendue ?
Pourquoi ? Parce que nous vivons dans une société fracturée, où les sans-dents, comme les Intouchables indiens vivent dans des sphères parallèles, dans le monde flottant d’Edo ? Même avec la meilleure volonté du monde, nos dirigeants, nos élus sont incompétents, pour simplement ne pas voir, ignorer absolument le monde parallèle et grouillant, pour ne pas entendre la colère montant de la Cour des miracles qui bientôt viendra les assiéger dans leurs palais.
Ce ne sera là que juste rétribution : un pays ne peut vivre dirigé par des aveugles, ignorants et incapables, au point de s’être, par idéologie, coupé eux-mêmes les bras en détruisant l’Etat.
Quelle confiance accorder à un ex-banquier sans enfants – les enfants, cette dure école de la contestation, mais aussi de la relativité et de la générosité ? – qui du haut de sa morgue ignorante méprise les « gens qui ne sont rien », et prend pour modèle une classe interlope dont le seul horizon moral est le profit, autre mot pour dire jouissance personnelle aux dépens de tous les autres et après moi le déluge ?
Pas contents les sans-dents ? Ils n’ont qu’à manger de la brioche !
Il y a une semaine Emmanuel Macron méprisait les soignants. Il les encense aujourd’hui. Comment faire confiance à une girouette sans orient, sans vision ? Nous méritons mieux.
On voit mal cette crise se terminer sans remise en question radicale. Las, notre constitution n’est bonne qu’à la reproduction de l’incompétence , à la négation de la démocratie ! Faudra-t-il reprendre la Bastille ? En attendant cette échéance, peut-on aller laver son linge au Lavomatic ?
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