Avec l’exemple caricatural de la colonisation des territoires palestiniens par l’Etat d’Israël, un article faire ressortir les techniques de manipulation du langage qui servent en toute occasion aux dominants pour inverser la réalité et masquer leurs crimes :
« Affrontements entre Israël et Palestine » : 5 techniques de manipulation du langage au service des dominants
Il y a peu d’exemples aussi frappants du rôle du langage dans la déformation d’une réalité que celle de l’entreprise d’apartheid de l’Etat colonialiste d’Israël, pardon, du « conflit israélo-palestinien ». Que s’est-il passé ces dix derniers jours au Proche-Orient ? Un quartier de Jérusalem est en train d’être vidé de ses habitants palestiniens au profit de colons israéliens, énième épisode d’un État colonial dirigé en ce moment par un gouvernement d’extrême-droite. Les protestations des Palestiniens ont été violemment réprimées par la police israélienne. En représailles, des roquettes ont été tirées depuis la bande de Gaza, cette prison à ciel ouvert coupée du monde par un blocus israélien depuis plus de dix ans, et où la situation des habitants est devenue, aux dires de l’ONU, « invivable ». L’armée israélienne a répliqué par des bombardements, pardon, des « frappes » (plus précises, ciblées et plus « pro »).
Cet épisode d’une guerre coloniale que beaucoup d’entre nous ont toujours connu n’est pourtant pas décrit en ces termes. A lire la presse cette semaine, il y aurait à Jérusalem « des affrontements », des « heurts », une « escalade de la violence » entre deux peuples ennemis. Qu’importe qu’il y ait d’un côté des manifestants et de l’autre la police armée, d’un côté la bande de Gaza et de l’autre une puissance nucléaire. A entendre nos médias, on est dans une guerre à armes égales, voire avec un côté plus légitime que d’autre… Exemples : « International : pluie mortelle de roquettes sur Tel-Aviv, frappes musclées d’Israël sur Gaza », titrent Challenges, la Provence ou Nice Matin, reprenant une dépêche AFP. La mort d’un côté, les muscles de l’autre : la sacro-sainte « neutralité journalistique » en pleine action. Et sur France Info, on pouvait entendre que « l’aviation a mené des raids à Gaza et les groupes armés palestiniens bombardent Israël ». Vous avez dit « journalisme militant » ?
Par le miracle des mots, la répression menée par un Etat colonialiste ayant instauré un régime d’Apartheid devient la réaction légitime et courageuse (« musclée ») d’un pays exposé à la barbarie de terroristes assoiffés de sang.
Hélas, le traitement médiatique de ce qu’il se passe en Israël et Palestine n’est qu’une illustration de plus de la faculté de notre classe dominante à déformer la réalité vue et vécue à son profit, en invisibilisant sa domination illégitime et en inversant la responsabilité de ses actions. Petit guide des procédés les plus répandus en la matière :
(...)
Ces cinq techniques de négation des rapports de domination sont à l’œuvre pour justifier l’épisode actuelle de répression de la résistance palestinienne par le régime d’apartheid israélien, mais elles le sont aussi pour justifier le patriarcat, la domination bourgeoise, l’exploitation au travail ou le racisme structurel en France. Pour ne pas rester prisonnier de ces procédés, il faut les connaître et appliquer une vigilance constante des discours que nous tenons et qui nous sont diffusés. Et utiliser nos propres mots, ceux qui décrivent la réalité telle qu’elle est : traversée par des rapports de domination que l’on peut renverser et détruire.
(...)
- Traitement médiatique de la colonisation menée par l’Etat d’Israël : exemple typique de manipulation du langage
En France, on a vu souvent à l’oeuvre ces procédés de manipulation du langage par les médias militants du pouvoir et des grands capitalistes.
Les contestataires sont systématiquement dénigrés par les pouvoirs et leurs médias dès qu’ils dérangent, ils seront comparés à des sortes d’animaux pulsionnels et irrationnels, des pauvres hères manipulés par des partis politiques ou par des militants aguerris, des factieux anti-démocrates dès qu’ils veulent la démocratie, des terroristes, des violents, des vecteurs de simples colères qui-n-ont-pas-compris-on-va-mieux-vous-expliquer-nos-super-réformes, des délinquants sans idéaux mus uniquement par l’appât du gain et de la destruction, des bêtes assoiffées de sang, des ennemis sanguinaires, des imbéciles utiles manipulés par des forces étrangères, des mercenaires vénaux...
En gros, il s’agit toujours de déshumaniser les révolté.e.s, de les réduire à des foules irrationnelles, et de leur refuser toute légitimité politique.
Comme dans les guerres militaires, en réduisant l’ennemi à une sorte de non-humain et à un simple agresseur assoiffé de sang alors que « nous » on est gentil, c’est plus facile moralement d’écraser ensuite les gens en utilisant les formes les plus brutales.
Souvenez-vous des attaques multiples contre les gilets jaunes (factieux, extrême droite, ultra-jaunes, foules haineuses...), les expressions telles que « grogne sociale » pour qualifier les mouvements de protestations sociales, les grèves qualifiées de « prise d’otage », les militants politiques adeptes de la destruction de biens matériels capitalistes qualifiés de « casseurs », de délinquants ou de policiers, et toujours l’expression récurrente « affrontements avec la police » ou « heurs entre policiers et manifestants » pour parler des agressions policières en manifestation et des éventuelles répliques d’auto-défense, etc.
Il est donc primordial de toujours dénoncer et boycotter les médias des pouvoirs et des capitalistes, et de faire grandir des médias de contre pouvoir, des auto-médias, des médias militants pour les opprimés et pour leur libération, et des médias libres.
Acrimed, l’observatoire critique des médias, peut aider à comprendre les ressorts des médias militants des dominants
Frustration Magazine fait aussi assez souvent des articles pour aider à décrypter le langage des puissants et leurs manipulations
Forum de l’article