Le 3e numéro de l’excellente revue Takakia est sorti récemment, toujours aussi dense et précis. Commandable sur le site ou trouvable dans certains infokiosques.
Il y a aussi 3 « Cahiers » à découvrir, à télécharger, tout aussi indispensables (ces textes sont extraits de la Revue Takakia).
Présentation du numéro 3
Merci aux elfes sylvaines de Nandor, aux Piévelus, aux elfes Sinda de Doriath, aux Aigles du Nord, aux enfants de Dúnedain, aux Entures, aux Nains d’Erebor, aux Rohirrim, au peuple d’Haleth et à toutes les créatures libres. Votre résistance au Mordor industriel est une source inépuisable d’inspiration et d’encouragement.
96 pages – automne/hiver 2024
prix libre (coût de fabrication 1,75 euros)
tirage 1000 exemplaires
- Takakia #3 - Brame de combat contre le Mordor industriel
Sommaire
ARTICLES ET RECITS
- La Kanaky insurgée met à mal l’État… et l’industrie minière
- Chimie industrielle. Le règne ténébreux de l’artificiel
- Nouveaux OGM : grise mine dans les labos de la plaine du Pô
- Sur la ligne de feu : interview avec des anarchistes en Grèce sur les feux de forêt et la résistance contre la société techno-industrielle
- La magie et la machine. Technologie et animisme à l’ère de l’extermination écologique
- Direct Action. Guerre au patriarcat, guerre à la technologie mortifère : une histoire de résistance armée au Canada
RUBRIQUES - Résistances
- Freinage d’urgence dans le Sud-Ouest
- Fragments de la résistance contre l’A69
- Exploitation industrielle des forêts : la fronde monte
- Mégabassines : à bout de souffle ?
- En Sardaigne, le prix du capitalisme vert
- Sápmi : un train qui va nulle part
- Mauvaises herbes
- Drainage
- Aguerrissement
- Le vent, le froid, la pluie, la neige
- Recensions
- La mort de la Nature : les femmes, l’écologie et la révolution scientifique
- Sans dessous-dessus : apériodique pour chahuter l’extractivisme
- Vers l’écologie de guerre
- ANNEXES
- Undomiél
- La Gazette : dépêches de la résistance férale
Petite présentation de la revue :
Sur le plateau tibétain, au nord des géantes de l’Himalaya, une plante
rare s’accroche aux falaises granitiques glacées, témoins robustes du
Jurassique. Sur le toit de la planète, les pousses vertes de cette
plante restent proches du sol, dépassant rarement l’épaisseur d’un
doigt, et ses feuilles sont minuscules. Très rare, son vert vif et
éclatant n’a été observé que par peu d’humains. Le nom vernaculaire en
japonais, nanjamonja-goke, reflète bien la résilience hors commune dont
fait preuve cette plante : la « mousse impossible ».
La mousse Takakia, est le plus vieux genre taxonomique de plantes connu.
Elle a probablement 390 millions d’années, plus vieille que le
supercontinent Pangée qui a commencé à se séparer il y a 200 millions
d’années pour former les continents tels que nous les connaissons
aujourd’hui. Si Takakia est particulièrement âgée, les mousses sont
parmi les plantes les plus vielles sur terre. Leur résilience, leur
capacité d’adaptation et d’évolution sont tout simplement uniques, ce
qui les rendent capables de prospérer presque partout : dans les déserts
les plus secs comme dans les forêts luxuriantes, sur les collines de
l’Antarctique balayées par les vents et aux sommets des montagnes.
Dans le monde moderne, les mousses, pourtant si fondamentales pour le
vivant, ont été relégués au décor. A proximité de la présence humaine,
elles font souvent l’objet d’une impitoyable guerre chimique afin de les
expulser du pavé et du béton, des cadres, des fenêtres et des seuils de
portes. Est-ce que ce serait une coïncidence que dans les imaginaires de
villes en décrépitude, dans des rêves de la chute de la société
industrielle, les mousses – plantes porteuses de vie et résilientes face
aux pires pollutions et radiations – sont parmi les premières à
recouvrir les ruines des usines et des métropoles, des autoroutes et des
déchetteries ? Dans la revanche de la nature, les mousses avancent. Et
avec elles, la vie non-domptée, le sauvage, la farouche, le rudéral.
Takakia a survécu à au moins quatre extinctions massives de la faune et
de la flore, toutes dues à des changements climatiques. Ce n’est pas la
première fois que les mousses voient les glaciers fondre.
Mais aujourd’hui un défi autrement plus grand se dresse devant la mousse
impossible. Désormais, sa résilience mythique est mise à rude épreuve
par la crise écologique totale qu’est la société industrielle. C’est ce
que Takakia sur le plateau tibétain raconte aux humains qui sont allés
la trouver : d’année en année, son combat se durcit, mais sa résistance
ne faiblit pas. Elle recule, mais elle se bat, inlassablement.
Takakia marque une ligne de démarcation : résistance et liberté ou
soumission et agonie. Le souvenir des mousses qui ont verdi la planète
et ont donné naissance à tout ce qui vit et croît à la sortie de chaque
ère de cataclysmes n’a pas été effacé. Aasaakamek, celles qui couvrent
la terre. Aujourd’hui, cette force viscérale vient nourrir le fabuleux
rêve de les voir couvrir les ruines industrielles de l’Anthropocène.
Chaque pousse de Takakia rappelle le défi actuel : œuvrer à la chute de
la société industrielle ou périr avec elle ; résistance libre et sauvage
ou
soumission morbide.