En 1974, le premier ministre Pierre Messmer lance l’accélération du programme nucléaire. Un des piliers de ce programme s’appelle Superphénix, un surgénérateur, à Malville, en Isère.
Le nucléaire constitue le coeur des gouvernements Pompidou, puis Giscard : la « raison d’état », intouchable, inattaquable.
Malgré cet enthousiasme pour l’atome, des comités Malville (Grenoble, Lyon, Valence, etc.) se forment un peu partout à partir de 1975 : réunions d’information, recours juridiques, création de médias, rassemblements. Forte de cette mobilisation et de cette dynamique, la coordination des comités Malville organise une grande marche pacifiste le 31 juillet 1977.
- Manifestation antinucléaire du 31 juillet 1977 à malville : mort d’un manifestant antinucléaire
Très vite, on réalise que des milliers de gens sont attendus mais aussi que l’Etat se prépare à réprimer : manifestation interdite, circulation interdite dans une zone de 5 kms autour du chantier.
Le préfet de l’Isère, René Janin, déclare : « S’il le faut, je ferai ouvrir le feu sur les contestataires. » 5000 CRS et gardes mobiles, des hélicoptères, des véhicules amphibies et ponts mobiles, des parachutistes et des membres des brigades antiémeutes sont mobilisés.
Des milliers de manifestants arrivent sur le site et se retrouvent pris en entonnoir. Pacifistes, ils n’étaient pas suffisamment préparés à répondre au déferlement de violence de la police. Un premier manifestant a perdu sa main en renvoyant une grenade, un autre a eu une partie de la jambe arrachée. Le tir de grenades s’est intensifié ; tout le monde est parti en débandade, dans la panique.
C’est à ce moment là que Vital Michalon a été touché par le souffle d’une explosion d’une grenade offensive qui a causé des lésions pulmonaires et qu’il en est mort.
Bien sûr, le préfet et les autorités nieront toute responsabilité. A la suite d’une plainte contre X déposée par les parents Michalon, le juge d’instruction rendra une ordonnance de non-lieu le 21 novembre 1980.
Les autorités ont crée un état de guerre, avec la volonté de tuer pour tuer la contestation. Et il est vrai qu’après cette manifestation, le mouvement antinucléaire a été durablement démobilisé jusqu’à la lutte de Plogoff (dont nous parlerons au prochain numéro) qui s’est avérée victorieuse.
Et puis, la mise en service de cette centrale en 1985 a viré à la catastrophe : en 1987, 20 tonnes de sodium liquide se sont échappées ; en 1990, nouvelle fuite de sodium et effondrement d’une partie du toit de la salle des turbines ; en 1994, une fuite d’argon. Chacun de ces « incidents » a nécessité des arrêts provisoires de la centrale. Et en février 1997, alors que le surgénérateur était toujours à l’arrêt, le Conseil d’Etat a annulé le décret d’autorisation de redémarrage de Superphénix pris en 1994. Puis, un arrêté ministériel en 1998 conduit à son arrêt définitif. Depuis, des travaux de déconstruction ont été engagés.
Des gendarmes gardent en permanence le site, interdisant photos et arrêts prolongés devant la centrale.
Une stèle a été plantée à Malville : « En souvenir de Vital Michalon, 31 ans, tué par les forces de l’Etat le 31 juillet 1977 lors de la manifestation contre Superphénix. »
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