« Les fab labs ne sont en rien un dépassement de la société industrielle. Bien au contraire, ils forment la pointe la plus avancée d’un nouveau modèle industriel en germe depuis plusieurs décennies qui peut s’épanouir aujourd’hui grâce aux dernières innovations technologiques et à la diffusion de l’esprit du Web. Les valeurs qui les animent : créativité, goût du risque, innovation, disparition des frontières entre temps de travail et loisirs, entre sphère publique et privée, etc., sont celles du « Tous entrepreneurs » cher au modèle libéral, et finalement partagées par tous ces promoteurs, qu’ils s’inscrivent dans une tradition politique marquée à droite ou à gauche, voire même très à gauche.
Ces innovations ne nous permettent pas de dépasser le capitalisme et ces dégâts écologiques et sociaux, elles nous font entrer dans une nouvelle ère, celle d’un capitalisme numérique. Face à ces discours puissants, notamment parce qu’ils sont […] ambivalents et font appel à un spectre de valeurs très large, héritées de différentes traditions politiques considérées jusqu’ici comme antagonistes, il est très difficile de ne pas succomber aux sirènes des nouvelles technologies. Mais contre vents et marées, il faut continuer à expliquer comment l’informatique est la mise en ordre du monde selon une logique de rationalisation, de mise en gestion de toutes les activités humaines, de déqualifications des métiers, de rupture d’avec l’expérience sensible, de dépendance accrue à la machine, de remodelage de l’humain, de disparition de l’intériorité et de destruction du lien social. »
(citation de Cédric Biagini)
En complement, voir aussi :
Contre l’organisation scientifique du monde : Entretien de PMO avec La Décroissance
- Les fab labs ne sont en rien un dépassement de la société industrielle
Remarques
Dans la Drôme, à Crest, comme partout ailleurs, les Fab Labs et autres dispositifs ultra-technologiques (comme les véhicules connectés, les navettes autonomes, les carburants à hydrogène...) sont vantés par les élus, les entrepreneurs, les « écolos de marché » et les geeks.
Tout n’est peut-être pas à jeter, comme les ateliers de réparation d’objets au lieu de les jeter ou les « Install Party Linux », mais on a l’impression que les Fab Labs permettent surtout aux néo-entrepreneurs de tester leurs concepts, de lancer leur boîte et leur start-up, et à l’idéologie technicienne et numérique de s’ancrer.
Bien entendu, les Fab Labs sont très soutenus par les autorités et les subventions (Département, Région, Europe...), preuve suplémentaire qu’ils ne gênent en rien le capitalisme et la civilisation industrielle.
De multiples petits ateliers de bricolage low-tech autogérés seraient moins coûteux, plus accessibles financièrement, plus utiles, et aideraient vraiment à se libérer de la civilisation capitaliste. Ce serait donc nettement plus écologique et socialement plus juste.
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