Adorer la Machine et la technologie, ou la vie et la liberté ?
Sauver la civilisation industrielle, ou sauvegarder la Terre et la liberté, la vie et l’existence incarnée ?
Le cauchemar soi-disant décarboné administré autoritairement, ou des mondes désirables en démocratie directe ?
Divers courants critiquent depuis longtemps le techno-monde, la civilisation industrielle, la mégamachine.
A l’heure du solutionisme par les emplois « verts », l’altercapitalisme à tendance décarboné, la technologie, le numérique et les énergies alternatives dites « renouvelables », cette critique est encore plus vitale, essentielle.
- La civilisation, d’autant plus la civilisation industrielle, n’est pas et ne sera jamais soutenable - Technocritiques
- Depuis longtemps des courants technocritiques s’opposent au monde Machine
Effondrement, survivalisme, la destruction des écosystèmes ne signe pas forcément la mort du techno-monde : Comment appréhender intelligemment l’effondrement de l’État-nation ?
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Il est bien plus plausible que l’extermination continue d’espèces vivantes au cours de ce siècle entraîne un renforcement du système techno-industriel et non sa chute. Les systèmes artificiels remplacent les systèmes vivants. Pour résumer la situation, nous sommes à l’heure actuelle lancés dans une course contre la montre où il nous faut stopper le système technologique avant qu’il ne rende toute vie impossible sans prothèses technologiques. Posez-vous la question suivante : aimeriez-vous importer sur Terre l’existence encapsulée de Thomas Pesquet et de ses petits copains astronautes de l’ISS ? À moins d’être un cyborg décérébré, vous devriez répondre par la négative.
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Dossier (forcément incomplet) pour aborder certains courants historiques de la critique de la Machine, les technocritiques : LES ENNEMIS DE LA MACHINE
Ils sont chrétiens, anarchistes, libertaires, décroissants ou zadistes.
Pour eux, la technologie est aliénante, totalitaire, voire mortifère.
Les uns appellent à briser les machines, quand d’autres espèrent convaincre les foules de cesser de croire en leur pouvoir. Marginaux parce que radicaux, ils sont aussi les seuls ou presque à développer une critique érudite et politique d’une société dominée par la technique. Enquête sur les technocritiques, ces irréductibles qui résistent, encore et toujours, à l’envahisseur.
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Les 10 arguments des technocritiques :
1 - La modernité et le progrès sont des mythes, des constructions intellectuelles qui ont montré leurs limites.
2 - La science pure et objective n’existe pas, au contraire de la technoscience, fruit de la collaboration entre chercheurs, ingénieurs et industriels.
3 - La technologie n’est jamais neutre. Au contraire, elle est porteuse d’usages et de sens qui déterminent notre façon de penser.
4 - Les outils numériques nuisent à la concentration et développent de nouvelles formes d’addiction.
5 - La technologie est un instrument de pouvoir, de surveillance et de contrôle social.
6 - Au-delà d’un certain seuil de puissance et d’efficacité, une technologie devient forcément contre-productive.
7 - Les technologies numériques créent un nouvel espace désincarné qui s’oppose au monde réel, à la vie.
8 - La technologie s’est imposée dans nos existences au point qu’on ne peut plus s’en passer sous peine de se pénaliser socialement.
9 - Trop de gens attribuent à la technique un caractère sacré et pensent qu’elle peut résoudre tous les problèmes.
- 10 - Critiquer la technologie, c’est s’exposer à une forme d’exil intellectuel.
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NOTE : On pourrait ajouter d’autres arguements, comme :
- La technologie complexe nécessite la centralisation et l’autoritarisme, donc elle s’oppose à la démocratie réelle
- La technologie renforce le fantasme de la délivrance des réalités matérielles et politiques, en promettant une vie hors sol et la possibilité de l’immortalité
- La technologie complexe nécessite de l’extractivisme à grande échelle et un système mondialisé complexe de transport et de traitement de matières premières, ce qui est incomptatible avec des démocraties réelles et avec des sociétés écologiques soutenables
Extrait d’un livre de Derrick Jensen :
Quel est le problème avec la civilisation ? Pourquoi quiconque voudrait-il y mettre fin ? Derrick Jensen explore la question dans son livre Endgame en deux volumes. Il y cite 20 prémisses en guise de résumé.
Première prémisse : La civilisation, d’autant plus la civilisation industrielle, n’est pas et ne sera jamais soutenable.
Deuxième prémisse : Les communautés traditionnelles abandonnent ou vendent rarement volontairement les ressources dont elles dépendent, tant qu’elles n’ont pas été détruites. Elles ne permettent pas non plus sciemment l’altération de leurs terres dans le but d’extraire d’autres ressources – or, pétrole, etc. Il s’ensuit que ceux qui veulent ces ressources feront ce qu’ils peuvent pour détruire ces communautés traditionnelles.
Troisième prémisse : Notre mode de vie – la civilisation industrielle – est fondé sur une violence étendue et permanente. Il a besoin de cette violence et s’effondrerait sans.
Quatrième prémisse : La civilisation se fonde sur une hiérarchie clairement définie, largement acceptée et pourtant souvent non déclarée. La violence exercée par ceux qui sont au sommet de cette hiérarchie envers ceux d’en bas est quasiment toujours invisible, c’est-à-dire qu’elle passe inaperçue. Quand elle est énoncée, elle est alors entièrement rationalisée. La violence exercée par ceux d’en bas sur ceux d’en haut est impensable, et quand elle prend place, elle est considérée avec stupeur, horreur, et voit ses victimes adulées.
Cinquième prémisse : La propriété de ceux qui sont au sommet de la hiérarchie est plus importante que celle de ceux d’en bas. Il est acceptable que les premiers augmentent la quantité de propriétés qu’ils contrôlent – autrement dit, de gagner de l’argent – en détruisant ou en prenant la vie des seconds. Cela s’appelle la production. Si les seconds endommagent la propriété des premiers, alors les premiers peuvent tuer, ou détruire les vies des seconds. Cela s’appelle la justice.
Sixième prémisse : La civilisation ne peut pas être améliorée. Cette culture ne connaîtra jamais aucune sorte de transformation volontaire aboutissant à un mode de vie soutenable. Si on ne l’empêche pas, la civilisation continuera à paupériser la grande majorité des êtres humains et à dégrader l’état de la planète jusqu’à ce que la civilisation, ainsi que la planète probablement, s’effondre. Les effets de cette dégradation vont continuer à nuire aux êtres humains et aux non-humains pendant très longtemps.
Septième prémisse : Plus nous attendons que cette civilisation s’effondre – ou plus nous attendons nous-mêmes pour la démanteler – plus l’effondrement sera problématique, et plus les choses seront graves pour les êtres humains et les non-humains qui vivront cela, et pour ceux qui viendront après.
Huitième prémisse : Les besoins du monde naturel sont plus importants que les besoins du système économique.
Une autre version du huitième prémisse : Tout système économique ou social qui ne bénéficie pas aux communautés naturelles sur lesquelles il se fonde est insoutenable, immoral et stupide. La soutenabilité, la moralité et l’intelligence (ainsi que la justice) requièrent le démantèlement de tout système économique ou social de ce genre, ou au minimum qu’on l’empêche d’endommager le monde naturel.
Neuvième prémisse : Même si un jour nous serons à l’évidence moins nombreux sur la planète qu’aujourd’hui, la réduction de population peut se dérouler de différentes manières, et en fonction de la passivité ou de l’activité dont on fait preuve à l’approche de cette transformation. D’un côté, elle peut passer par des violences extrêmes et des privations : une apocalypse nucléaire, par exemple, réduirait à la fois la population et la consommation, de manière horrible ; il en va de même dans le cas d’une croissance sans limite suivie d’un crash. Cependant, d’autres manières pourraient être moins violentes. Malheureusement, vu le degré actuel de violence dont fait preuve la culture industrielle à l’encontre des être humains et du monde naturel, il semble impossible d’imaginer une diminution de la population et de la consommation sans violences ni privations. Non pas parce que ces réductions nécessiterait en elles-mêmes de la violence, mais parce que les violences et les privations sont devenues banales. Toutefois, une solution consisterait à faire diminuer le niveau de violence requis et causé par le flux (souvent forcé) des ressources des pauvres vers les riches, ce qui provoquerait parallèlement une réduction de la violence à l’encontre du monde naturel. Personnellement et collectivement, nous pouvons être capables à la fois de réduire et d’adoucir le caractère violent qui se produira lors de cette transformation vers un monde durable. Ou peut-être pas. Mais ceci reste certain : si nous nous refusons à débattre de la question de la surpopulation et des moyens d’y faire face, les violences seront indubitablement plus sévères, et les privations plus extrêmes.
Dixième prémisse : La culture dans son ensemble et la plupart de ses membres sont fous. La culture est dirigée par une pulsion de mort, une pulsion de destruction du vivant.
Onzième prémisse : Depuis le début, cette culture – la civilisation – est une culture d’occupation.
Douzième prémisse : Il n’y a pas de gens riches dans le monde, et pas non plus de gens pauvres. Il y a juste des gens. Les riches possèdent peut-être tout un tas de pièces et de papiers imprimés (ou des nombres stockés dans des disques durs de banques) censés valoir quelque chose que les pauvres ne possèdent pas. Les « riches » prétendent posséder la terre, et les « pauvres » se voient nier le droit d’exprimer de telles prétentions. Un des buts premiers de la police est d’imposer par la force les délires de ceux qui possèdent beaucoup de pièces et de papiers imprimés. Ces délires s’accompagnent de conséquences extrêmes dans le monde naturel.
Treizième prémisse : Ceux qui sont au pouvoir règnent par la force, et plus tôt nous nous affranchissons des illusions qui prétendent le contraire, plus tôt nous pourrons commencer à prendre des décisions raisonnables sur si, quand, et comment nous allons résister.
Quatorzième prémisse : Depuis la naissance – et probablement depuis la conception, mais je ne saurais comment défendre cette assertion – nous sommes individuellement et collectivement éduqués à haïr la vie, haïr le monde naturel, haïr la nature, haïr les animaux sauvages, haïr les femmes, haïr les enfants, haïr nos corps, haïr et craindre nos émotions, nous haïr. Si nous ne détestions pas le monde, nous ne permettrions pas qu’il soit détruit sous nos yeux. Si nous ne nous détestions pas, nous ne permettrions pas que nos maisons – et nos corps – soient empoisonnés.
Quinzième prémisse : L’amour n’implique pas le pacifisme.
Seizième prémisse : Le monde matériel est élémentaire. Cela ne signifie pas que l’esprit est inexistant, ni que le monde matériel soit tout ce qu’il y ait, mais que l’esprit se mêle à la chair. Cela signifie aussi que les actions dans le monde réel ont des conséquences bien réelles ; que nous ne pouvons compter ni sur Jésus, ni sur le Père Noël, ni sur la déesse mère, ni sur le lapin de Pâques pour nous sortir du pétrin. Cela signifie que cette pagaille est une vraie pagaille, et pas un battement de cils de Dieu. Cela signifie que nous devons y faire face nous-mêmes ; que durant notre passage sur Terre – que l’on soit condamné ou privilégié dans votre vie terrestre, et que l’on accède ou pas à un « ailleurs » après la mort – la Terre est ce qui importe. Elle est élémentaire. Elle est notre maison. Elle est tout. Il est stupide de penser ou agir comme si ce monde n’était pas réel et élémentaire. Il est stupide et pathétique de ne pas vivre nos vies comme si elles étaient réelles.
Dix-septième prémisse : C’est une erreur (ou plus probablement, du déni) de fonder nos décisions sur le fait que, oui ou non, des actions découlant de ces constats vont ou ne vont pas effrayer les gardiens de la bien-pensance et la grande majorité de la population.
Dix-huitième prémisse : Notre perception actuelle du « moi » n’est pas plus soutenable que notre usage actuel d’énergie ou de technologie.
Dix-neuvième prémisse : Le problème de cette culture repose principalement sur la croyance selon laquelle contrôler et abuser du monde naturel est justifiable.
Vingtième prémisse : Au sein de cette culture, la finance – et non le bien-être communautaire, la morale, l’éthique, la justice, ni même la vie – prend les décisions sociales.
Modification de la vingtième prémisse : Les décisions sociales sont principalement déterminées (et souvent exclusivement) par le fait qu’elles entraîneront ou non une augmentation des fortunes monétaires des décideurs et de ceux qu’ils servent.
Re-modification de la vingtième prémisse : Les décisions sociales sont principalement déterminées (et souvent exclusivement) par le fait qu’elles entraîneront ou non une augmentation du pouvoir des décideurs et de ceux qu’ils servent.
Re-modification de la vingtième prémisse : Les décisions sociales sont principalement fondées (et souvent exclusivement) sur la croyance quasiment jamais examinée selon laquelle les décideurs et ceux qu’ils servent sont autorisés à amplifier leur pouvoir et/ou leurs fortunes monétaires au détriment de ceux d’en bas de la hiérarchie.
Re-modification de la vingtième prémisse : Si vous vous placiez au cœur du problème, vous verriez que les décisions sociales sont principalement déterminées par leurs capacités à servir les orientations de contrôle et de destruction du monde naturel sauvage.
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CE WEEK-END, À PARIS,
avait lieu le festival annuel du greenwashing, évidemment appelé « We Love Green » (le greenwashing ne se reconnaît jamais comme tel), sponsorisé ou financé par les meilleurs (les champions du « monde d’après », sans doute).
Parmi les intervenants prévus figuraient Lamya Essemlali, Hugo Clément, Camille Étienne, Paloma Moritz, Mike Horn, Assa Traoré, Vikash Dhorasoo ou encore Hugo Travers (Hugo Décrypte). On y trouvait en outre un « village des innovations » avec des « start ups et ONG de l’impact positif » et des stands d’ONG dont Négawatt, Greenpeace et Oxfam.
Les acteurs habituels du « mouvement climat », c’est-à-dire de l’écologisme citoyenniste (altercapitaliste, alterindustrialiste, celui qui prétend qu’un autre capitalisme industriel est possible, durable et décarboné, avec des emplois verts, des énergies vertes, etc., le tout sous la houlette d’un État sympa, « plus démocratique »).
Dans l’interminable désastre en cours, ces gens-là ont leur part de responsabilité, occupés qu’ils sont à raconter des imbécilités mensongères, à promouvoir des rassurances absurdes auprès d’un public naïf.
(post de Nicolas Casaux)
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