Hypothèse (r)évolutionnaire II pouvoir et émancipation

samedi 25 juin 2022, par Hypothèse (r)évolutionnaire.

L’adhésion au système tire sa force irrésistible de ce qu’elle est de l’ordre du non dit, de l’impensé, de l’implicite.

Alain Accardo, De notre servitude involontaire


La révolution n’est pas désirable pour elle-même. Il n’y a qu’à voir les révolutions fascistes du XXe siècle. Ou encore la majorité des révolutions communistes, qui se sont soldées par des désastres humains. Non, si ce bouleversement profond de nos sociétés est nécessaire et enviable, ce n’est que dans la mesure où il serait accompagné de l’adjectif adéquate : l’émancipation. Autrement dit, une révolution qui abolirait le pouvoir exercé sur les individu.e.s et les peuples. Mais encore faut-il être au clair sur ce que l’on désigne par ces termes.

La notion de pouvoir recouvre de multiples réalités, en politique, en droit, en sociologie, dans les relations entre individu.e.s, qui peuvent difficilement être synthétisées en une seule approche. Selon les auteur.e.s, le pouvoir est définie comme étant la capacité de faire, ou à l’inverse la capacité de faire faire, ou les deux à la fois sans distinction. C’est pourquoi certaines personnes, tel que Murray Bookchin, divisent le pouvoir en pouvoir de et pouvoir sur. Pour notre part, nous désignons par pouvoir uniquement le pouvoir sur, la capacité qu’a une personne ou un groupe de personne de contraindre d’autres personnes à faire des choses qu’elles n’auraient pas faites d’elle-même. Au terme pouvoir de, nous préférons celui de puissance tel que déplié par Baruch Spinoza.

Ainsi selon notre distinction, le pouvoir est la capacité de contraindre. Mais celle-ci ne s’exprime pas de la même façon selon les cas. De manière schématique, soit le pouvoir est directement exercé par des personnes, soit il réside dans des institutions – par exemple le gouvernement, la police, la justice, l’entreprise – qui perpétuent dans le temps cette capacité de contrainte. Un monde où personne n’aurait de pouvoir sur quiconque est autant un combat permanent qu’une utopie irréalisable. Par contre, une société avec un minimum de structures de pouvoir est parfaitement envisageable. De telles sociétés – dites autochtones - ont existées sur l’ensemble du globe avant, à côté, au sein des États. Mais existent également aujourd’hui dans la construction du confédéralisme démocratique kurde du nord de la Syrie, et plus enraciné encore dans les communautés autonomes zapatistes du Mexique.

L’émancipation est, quant à elle, le passage d’une situation dominée par la contrainte à une situation libérée de celle-ci. Autrement dit, le remplacement du pouvoir par la puissance. Une révolution émancipatrice a donc pour vocation d’abolir les structures de pouvoir, les dispositifs qui permettent à une minorité de personnes d’exercer la contrainte sur la majorité, pour inventer d’autres manières de faire société. Tout cela reste pour l’instant bien abstrait. Nous nous efforcerons dans les prochains articles de rendre palpable ces structures de pouvoir, leurs logiques et leurs conséquences. En commençant par l’État, une notion souvent abordée de manière confuse et caricaturale. C’est par la connaissance de ce à quoi l’on s’oppose, que peuvent se dessiner les contours d’un horizon désirable, la perspective d’une révolution émancipatrice.

P.-S.

Le bonheur individuel se doit de produire des retombées collectives, faute de quoi la société n’est qu’un rêve de prédateur.

Daniel Pennac, La Fée carabine


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