Le 21 août 2020, des chasseurs, soutenus par des agriculteurs (souvent proches de la FNSEA), viennent manifester à Crest contre les réserves naturelles créées en Drome par l’association ASPAS.
Dans la Drôme il y avait déjà eu des tensions récemment à propos de l’interdiction de la chasse dans la réserve des Ramières (pétition avec plus de 50.000 signatures) ou de l’extension du bâtiment de la fédération chasse construit illégalement à Crest.
On pourrait aussi citer ce projet de Poulailler industriel à Sauzet
Voici le texte qui annonce la manif du 21 août, posté par les Jeunes Agriculteurs Drôme :
NON à la mainmise sur le foncier naturel drômois :
Le réensauvagement tue les territoires ruraux !
MANIFESTATION le VENDREDI 21 AOUT à 10H à CREST (26).
Les acteurs du monde rural se réunissent pour dire non au discours et aux acquisitions d’entreprises ou d’associations pour l’ensauvagement des espaces ruraux. En drôme, c’est en particulier la mainmise de l’ASPAS (Association pour la Protection des Animaux Sauvages) sur le foncier agricole et forestier drômois par l’aquisition et la création de Réserves de Vie Sauvage qui met en danger les activités sociales, culturelles et économiques de nos territoires ruraux.
Le principe même de Réserve de vie sauvage pose question pour l’avenir des activités agropastorales caractéristiques de notre département. Ainsi, ces acquisitions de centaines d’hectares de terres agricoles et forestières ont pour but de participer à leur ré-ensauvagement en y excluant de façon stricte toute activité humaine.
Cette manifestation, familiale, sera accompagnée d’animaux (brebis, chevaux, génisses). Venez nous rejoindre !!!
Les organisateurs
FDO 26
ACCA LEONCEL
Association des Eleveurs et Bergers du Vercors
Association ILOUPDEV
Avec le soutien de :
La FDSEA (26)
LA COORDINATIONS RURALE (26)
Les JEUNES AGRICULTEURS (26)
La FNDC 26
- Des conflits entre certains chasseurs, éleveurs, agriculteurs conventionnelles et des écologistes
- Les conflits entre mondes vivants et structures industrielles ne datent pas d’hier
Comment construire en ruralité des sociétés soutenables et vivables ?
Peut-être qu’il y aura une « contre » manfestation le 21 août ou à un autre moment ?
A l’heure où les catastrophes climatiques et écologiques produites par la civilisation industrielle s’aggravent et se précisent, il n’est guère étonnant, dans une société morcellée par des intérêts divergents et de multiples classes sociales, que des conflits de visions et de droits d’usage s’exacerbent.
Les questions de survie économique et d’intérêts de certains lobbys se mélangent avec les besoins de préservation et de respect du monde vivant, trop souvent des conflits se durcissent au lieu des tentatives de voies collectives servant l’intérêt commun dans des sociétés soutenables.
Ici, il semble que des chasseurs veulent se réserver les plus grandes surfaces possibles de chasse, tandis que des écologistes font valoir la destruction générale du vivant et des animaux en particulier.
Dans leur tract, des « jeunes agriculteurs » pointent avec raison la disparition des surfaces agricoles, mais ils s’en prennent bizarrement à des écologistes qui essaient de préserver des zones plus au moins sauvages au lieu de critiquer plus sévèrement l’urbanisation, l’étalement urbain, les zones commerciales et industrielles.
Ce qui met en danger les territoires ruraux ce sont plutôt les projets de centre de loisirs (type Center Parcs), les centres logistiques géants et leurs camions (qui détruisent les meilleures terres), les autoroutes et leurs échangeurs, les lotissements en rase campagne, les villages dortoirs, les centrales à biomasses, les monocultures forestières...
Alors que tout le monde constate les désastres écologiques et climatiques, personne ne veut changer de système afin de décroître et sortir du productivisme. La plupart des acteurs économiques veulent surtout continuer comme avant, espérant passer à travers les gouttes ou que des technologies nouvelles nous sauveront par miracle.
voir aussi : Sécheresse structurelle, pesticides, insecticides neurotoxiques « tueurs d’abeille », gestion de l’eau
Par ailleurs, on observe que le foncier agricole est souvent « accaparé » par les gros exploitants, par l’agriculture conventionnelle soutenue par les instances de l’Etat alors que les petits projets et/ou les projets écologiques plus atypiques ne trouvent pas de terre, ne se font pas ou alors dans des conditions difficiles.
La situation est donc très complexe et très conflictuelle, et il serait suicidaire de ne rien changer.
Les conflits d’intérêts aggravés considérablement par la concurrence généralisée, la précarité de nombre d’agriculteurs, les destructions de milieux naturels et d’animaux par la civilisation capitaliste ne pourront pas se résoudre en restant dans le cadre de pensée et les structures économiques actuelles.
Ces conflits entre préservation du monde vivant et activités humaines ne datent pas d’hier. La mécanisation d’après guerre, la concentration des exploitations, la disparition des petits paysans, la technocratie centralisée, la mainmise des grandes surfaces sur la distribution, l’impératif de Croissance, les endettements encouragés par des banques, les pollutions et les pesticides, l’insertion dans le marché mondial et ses spécialisations par régions... ont beaucoup mis à mal les campagnes et ses divers habitants.
Que produire et comment, par qui, pour qui ?
Comment distribuer les terres, pour quels usages ?
Comment stopper le productivisme et l’industrialisation tout en vivant décemment ?
Comment distribuer, vers qui ?
Ces questions dépassent très largement les clivages entre néo-ruraux et « anciens natifs ».
Si on souhaite répondre à ces questions en construisant des sociétés vivables, il faudrait se libérer du joug de l’individualisation des problèmes et des structures/visions capitalistes, et aussi les traiter dans de vrais instances de démocratie directe, après moult débats approfondis.
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