Blouses blanches et merde noire, une journée de solidarité pour les soignant-es supendu-es

Gigors et Lozeron, 20 novembre 2021 - Retour sur l’événement

samedi 4 décembre 2021, par Quelques blouses blanches.

Depuis la fin de l’été entre deux vagues, le gouvernement a rendu obligatoire pour tous les soignant-e-s de se faire vacciner contre le covid 19. Une majorité a obéi à cette directive, pas forcément par conviction de l’efficacité de cette mesure pour enrayer la pandémie, mais par l’obligation de conserver leur travail et leur revenu.
D’autres ont fait le choix de résister, au nom de la liberté fondamentale de disposer de son corps, le libre choix de décider soi-même de ce qui est bon -ou pas- pour soi.

La sanction prévue par la loi promulguée le 6 août est sans appel : suspension et interdiction d’exercer, plus de boulot donc plus de salaire et, pour les fonctionnaires, privilège d’une double peine, interdiction de rechercher du travail ailleurs. Les suspendu(e)s ayant fait le choix de ne pas se soumettre le payent très cher car percevoir une indemnité quelconque (chômage, RSA…) relève de l’exploit.
Applaudi-e-s tous les soirs il y a un an, les valeureux-ses soldats en première ligne de la guerre sanitaire, se retrouvent, faute d’une obéissance aveugle, fusillé-e-s dans le dos, la sentence réservée aux sales traîtres et aux déserteurs.

Blouses blanches et merde noire, une journée de solidarité pour les soignant-es supendu-es
Gigors et Lozeron, 20 novembre 2021

Qui connaît le nombre de toutes ces personnes ainsi froidement exécuté-es ? Certains avancent un petit 2%, d’autres l’estiment à beaucoup plus. Qui recense ? Qui s’en soucie ? Qui se préoccupe de leurs situations ? Qui en parle ? L’hôpital tourne encore ! Sur trois pattes diront les chagrins, mais ça tient…

Saurons-nous un jour comment tout-e-s ces soignant-es suspendu-e-s ont traversé cette période ?

En tout cas, un peu partout, des supendu-es s’organisent pour survivre, se regroupent pour lutter, pour ne pas se laisser sombrer, pour manger, assurer l’éducation de leurs enfants, assumer leurs charges, pour garder leur dignité et se battre contre l’injustice.

Ce week-end du 19 et 20 novembre, après plus de deux mois de préparation, l’évènement « blouses blanches et merde noire » prend forme, s’étire et se déploie. C’est à Gigors chez un particulier solidaire qui prête son terrain et la salle de concert qui va avec. Plusieurs dizaines de bénévoles s’activent sous la direction bienveillante de quelques « pros » des festoches militants. Deux chapiteaux s’élèvent, une serre s’aménage en salle à manger, des stands pour l’accueil, un centre de documentation, des chiottes secs, une cuisine, deux buvettes, un parking. On brasse des chaises, des tables, des affiches, des banderoles, du bois pour les braseros pour éviter que les visiteurs ne gèlent sur place… On épluche des tonnes de légumes, on prépare, on s’affaire pour un accueil chaleureux, terreau indispensable à l’échange, au partage d’idées riches et savoureuses.
Dans la journée de vendredi, le site est installé, on espère, on attend pour demain, 300 personnes ? Ce serait pas mal, plus d’accord, mais faut pouvoir gérer. Des bruits nous reviennent en écho, l’info, de bouches à oreilles et par sms a bien circulé…

Blouses blanches et merde noire, une journée de solidarité pour les soignant-es supendu-es
Gigors et Lozeron, 20 novembre 2021

Samedi, c’est parti ! Dès 10 heures, première conférence « la santé et notre système de soin » une approche globale où intervient un médecin suspendu de la vallée. Deuxième échange, « Le passe sanitaire et la surveillance du citoyen » par le collectif « Ecran total », le sociologue Laurent Mucchielli et la députée européenne Michèle Rivasi qui animeront aussi la dernière conférence « et maintenant qu’est-ce qu’on fait ? – quels moyens de résistance ? ».
Entre ces temps d’échanges très suivis, des performances artistiques, des ateliers, des discussions, des projections de documentaires, des moments de détentes, des espaces d’informations et de rencontres, des invitations au témoignage, de la musique, du théâtre forum, des interviews, de la soupe, du vin chaud…

À la tombée de la nuit, à la lecture de paroles de soignant-es, accompagnées à la harpe, 8 pendu-es (enfin c’étaient des mannequins hé !) en blouses blanches sont hissé-es comme des condamnés pour l’exemple, entre la salle et le chapiteau. Les yeux s’embuent, ceux des soignants et ceux du public ...mais les coeurs se réchauffent. Nous ne sommes plus seuls, isolés et désemparés. Nous pouvons enfin exprimer le vécu de ces longs mois d’absurdie, de surcharge de travail, d’ordres et de contre-ordres. Nous pouvons dire notre désarroi à regarder les gens mourir du covid ou de chagrin, seuls, enfermés loin de leurs proches. Nous relevons la tête, nous sommes nombreux et nous résistons. Le silence assourdissant des médias sur le sort de milliers de soignants, la propagande et les mensonges d’Etat, ne nous feront pas renoncer !

La journée se termine en musique avec deux groupes du coin « la Sève » et les « Krous Ducs à sa Maman », AfroBeat et Ska-Punk histoire de poser le cerveau et de lutter contre une légère fraîcheur ambiante en bougeant un peu son corps.

Dimanche, démontage et rangement avec encore une équipe fournie, rapide et efficace.

Le Bilan est très satisfaisant : près de 500 participants, des conférences pleines à craquer, des discussions avec les intervenants à n’en plus finir, de l’émotion pas mal, des dons en nombre. L’objectif de cette journée était de collecter des fonds pour aider, ceux et celles qui ont perdu leur travail, qui ont été frappé-e-s d’indignité par le gouvernement et les représentants élus de la nation qui ont voté cette loi infâme, inique.
Près de 4000€ ont été collectés et seront distribués à ceux et celles qui ont été jetés comme des rebus.

Plusieurs victimes ont témoigné, entre l’incompréhension de ce qui leur était tombé dessus, de la culpabilité de subir et de faire subir à leurs proches, par choix idéologique, des mesures radicales décidées arbitrairement par le pouvoir et ses experts. Elles ont exprimé l’isolement, le désespoir, la colère, mais ont découvert ou redécouvert que notre monde recèle encore un peu, voire pas mal, d’humanité.

Merci aux bénévoles, aux intervenants, aux artistes, à toutes celles et tous ceux qui ont participé pour faire reculer l’injustice, pour offrir leur soutien, pour aider à une prise de conscience collective et solidaire.
Celle-ci est la véritable immunité collective indispensable pour lutter contre les maladies de notre société que le pouvoir crée et entretient pour nous « soigner » et nous asservir.
Nous nous sentons particulièrement solidaires des Guadeloupéens qui se révoltent depuis quelques semaines.
Dans quelle société voulons-nous vivre ? Une société de contrôle ? Une société où les inégalités se creusent, où la maltraitance au travail se banalise, où les droits fondamentaux sont bafoués ?
Pour nous, la réponse est clairement NON !
La résistance continuera, d’autres actions suivront…

- Ils étaient là :
La librairie « le Petit Agité ».
« L’Info Kiosque ».
Stéphane Vidéaste.
La Cantine Pop et Laurent.
Flo’Piteau
Lise et Salomé Théâtre Forum
Anne et Gabrielle -performance artistique-
Sandrine et Bernard -témoignages soignants.
Jérôme et Béné -Bar-
Jean-Phi -parking-
Et tous les autres bénévoles…
Concerts « La Sève » et « les Krous Ducs »
Intervenants : Régis Faucheur, Michèle Rivasi, Laurent Mucchielli, Dr Gorius.
Collectif Ecran total, Collectif des soignants de la Drôme, Collectif citoyen d’Aouste sur Sye.

Et… Un immense merci à tous les producteurs, dont la plupart sont adhérents à la Confédération Paysanne, qui ont donné des bons produits frais, bio et locaux !!


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