Dans les murailles séculaires de la capitale du Diois, un nouvel événement est venu secouer les habitants de leur torpeur hivernale : le très officiel collectif « Collectif vélo diois » y a tenu deux jours d’agapes et de démonstration de sa force d’influence, dans le but de sauver l’humanité et d’imposer le vélo partout.
À les entendre, nos rues tortueuses et pavées de bonnes intentions seraient bien trop dangereuses pour leurs déplacements éco-responsables. La conduite sociopathe des plus fortunés que nous ne sommes pas mettraient en péril leurs frêles engins extraits des mines aux quatre coins du globe sans abimer la planète – ou si peu... Il faudrait ainsi, après quelques décennies de tyrannie de la bagnole, faire de même pour leurs deux roues dopés à l’électricité avec force batteries au lithium.
Outre cette myopie écologique, à aucun moment, semble-t-il, ce « collectif » ne se pose la question du commun, de l’espace public, du politique – appelez-le comme bon vous semble... Continuer la ségrégation des voies de circulation qui oblige chacun à rester dans son rang, perpétuer cette logique de flux qui vide les villes de leur sève depuis bien trop longtemps, imposer la sécurité comme dogme absolu de la République Française, renforcer encore l’arsenal de loi, de règles et de normes qui accablent le peu qui nous reste de liberté d’occupation de la rue... La prétendue « vélorution » ressemble plutôt à un conservatisme rance qui s’appuie sur des méthodes réactionnaires.
Ainsi, tels les lobbies les plus éculés, ces gens déplorables paraissent prêts à tout pour imposer leur vision égoïste et s’accaparer les dernières friches sauvages afin de les dédier à leur moyen de transport adopté, en moyenne, par deux pour cent de la population, à peine, si l’on en croit les dernières statistiques. Imposer de manière totalitaire un tel mode de déplacement, qui n’est compatible qu’avec une catégorie de travail hautement privilégiée, n’importune pas ces proclamés défenseurs de l’humanité et de la planète. Cette classe bourgeoise a ainsi trouvé un nouveau moyen d’étendre son contrôle à un ultime aspect de la sphère publique qui lui échappait encore, juste entre le goudron omniprésent des routes – tout de nos déchets constitués – et le béton des trottoirs obligatoires – qui finit de piller les dernières ressources de sable disponible –, en jouant, au passage, sur la culpabilité de la destruction, bien réelle, évidemment, de la planète.
Mais l’humanité aurait beau devenir végétarienne et ne se déplacer qu’en vélo, le sort de celle-ci ne s’en trouverait pas amélioré d’un iota si l’organisation capitaliste de la société n’était pas radicalement et simultanément remise en cause. Et il ne semble pas que cette préoccupation soit réellement partagée par ce groupe séparatiste. Avec son indécrottable aplomb et sa charité légendaire, ces fondus du deux roues proposent même, pour éviter le drame à leurs congénères qui n’auraient pas les moyens d’investir 3000 balles dans un vélo dernier cri, de rendre obligatoire le port du casque... pour les piétons !
G.
- Vélorution ou cyclofascisme ?
- Mine de lithium pour batteries électriques (pour vélos, voitures...)
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