Revenir aux bases de l’écologie au lieu de se noyer avec les électrologistes

Une seule issue : la révolte contre la civilisation industrielle

mardi 10 novembre 2020, par Les Indiens du Futur.

Vu l’offensive générale des hautes-technologies, du numérique, des énergies dites renouvelables qui se présentent comme "verte" et conciliant croissance et écologie, il est important de faire quelques rappels dans les villes comme dans les campagnes :

GRETA THUNBERG ET ALEXANDRIA OCASIO-CORTEZ, DEUX CHAMPIONNES DE L’INDUSTRIE MINIÈRE

Fin 2019, un article publié sur le site mining.com, le plus célèbre et le plus consulté des sites sur les industries des extractions minières et métallurgiques, soulignait ce fait hautement logique que Greta Thunberg et Alexandria Ocasio-Cortez étaient, quoi qu’elles puissent en dire, et quoi que puissent en penser leurs fans clubs, deux formidables championnes de l’industrie minière.

Pour la raison — laquelle échappe à bon nombre de soi-disant écologistes — que, pour construire des choses, il faut des matériaux, et que pour construire beaucoup de choses, il faut donc beaucoup de matériaux. Les panneaux solaires et les éoliennes et les voitures électriques, etc., ne poussent pas dans les arbres. Le recyclage étant limité et parfois plus coûteux, les industriels se tournent parfois davantage vers l’extraction minière.
Notamment (mais pas seulement) pour l’obtention de métaux qualifiés de terres rares.

OUI, MAIS BON, ON PEUT CONSTRUIRE DES ÉOLIENNES SANSODYME
…disent les écologistes qui font exprès de ne pas comprendre. Disent les « écologistes » moins soucieux de l’exploitation marchande généralisée de l’humain par l’humain (« salariat »), des injustices sociales colossales et croissantes, ou encore de la distribution foncièrement inégalitaire du pouvoir qu’implique le capitalisme (c’est-à-dire du caractère mensonger de l’emploi du qualificatif de « démocratie » pour désigner les oligarchies électives modernes), moins soucieux du désastre social ubiquitaire et polymorphe qu’on a sous les yeux que de garantir la continuation de la production d’électricité pour que le Progrès puisse continuer, et la civilisation industrielle perdurer.

Outre les dispositions sociales iniques nous imposant à tous de vendre notre temps de vie à un système d’entreprises capitalistes, imposant à certains de travailler dans des mines, à d’autres de trimer dans des usines (à construire des éoliennes ou des panneaux solaires, à traiter des matières premières, etc.), ces écologistes occultent aussi tranquillement d’innombrables problèmes de soutenabilité, d’innombrables dynamiques destructrices. On peut évoquer pêle-mêle le fait que la production industrielle d’éoliennes, ou de panneaux solaires, comme toute production industrielle d’appareils quelconques, repose sur de nombreuses autres industries et infrastructures (transport, routes, autoroutes, voies ferrées, machines-outils pour fabriquer les machines qui permettent de fabriquer le panneau solaire, etc.), impliquant toutes diverses nuisances écologiques (et sociales) indubitables ! Le fait que les dirigeants et les dynamiques du technocapitalisme ne soient pas du tout en mesure de mettre un terme à l’exploitation des combustibles fossiles. Le fait qu’éoliennes et panneaux solaires reposent, comme tous les appareils issus du système industriel, sur l’utilisation de combustibles fossiles à presque toutes les étapes de leur production. Le fait que l’énergie prétendument « verte », « propre » ou « renouvelable » ne puisse servir qu’à alimenter d’autres appareils eux-mêmes issus du système industriel (et impliquant donc tous leur lot de nuisances sociales et écologiques). ETC.

Ceux qui se disent écologistes et promeuvent frénétiquement le développement des technologies de production d’énergies dites vertes ou propres ou renouvelables ne sont pas des écologistes, des « défenseurs de la nature et de l’environnement » (définition du Larousse). Ce sont des électrologistes. Le terme désigne déjà des épilateurs recourant à l’électricité, mais peut tout aussi bien désigner les innombrables défenseurs de la vie électrifiée, technologisée, du mode de vie (si on peut encore parler de vie, il s’agit de moins en moins d’organique et de plus en plus de mécanique, de technologique, d’électrique) moderne.

Je hais les électrologistes.

Post de Nicolas Casaux

Une seule issue à l’extractivisme et à la civilisation industrielle : la révolte
Mine à ciel ouvert (source : France Culture)

AMNÉSIE ÉCOLOGIQUE

Il y a longtemps que le dualisme nature/culture, la réification de la nature, etc., sont dénoncés par le mouvement écologiste. Ceux qui, aujourd’hui, se font les champions de l’exposition de ces problèmes culturels, oublient parfois de le rappeler, se faisant ainsi passer pour de grands découvreurs. Et puis, ce mouvement écologiste du XXe siècle et ses principales figures sont assez largement tombés dans l’oubli. Les célébrités de l’écologie actuelle, les Dion & Co., ne les mettent pas en avant, ne s’en réclament pas (mais les connaissent-ils seulement ?), préférant diluer et édulcorer toujours plus le contenu et la portée de la critique écologiste.
Nous, on essaie de pas oublier, on a appris et on apprend de l’ouvrage de ces personnes qui avaient saisi et formulé nombre des problèmes auxquels nous sommes toujours confrontés. Parce qu’il est crucial de savoir dans quoi on s’inscrit, où on se situe, historiquement, philosophiquement, etc., de connaître ce qui était pour comprendre ce qui est en train d’advenir, saisir les tendances, les dynamiques.

Exemple avec Pierre Fournier, qui nous a quittés il y a près de 50 ans, (tu vois Pierre ?, c’était pas pour rien, nous aussi, « on les emmerde, ça continue ») :

« La société capitaliste, c’est la civilisation industrielle elle-même. Elle ne se contente plus de nous exploiter, elle nous détruit. Une seule issue : la révolte. La défense de l’environnement (nous préférerions dire comme les “provos” hollandais : la réconciliation de la Nature et de la Culture) est devenue le problème n°1. La prise de conscience écologique ne débouche pas sur des réformes, des palliatifs, des rafistolages, comme on voudrait nous le faire croire en haut lieu, mais sur une révolution […]. »

➡ « Depuis 2 000 ans, la première vraie révolution, toutes les autres en découlent, s’est produite quand l’irruption du phénomène scientifique a provoqué la partition de l’homme et de la nature en substituant, à une relation de fils à mère, une relation de sujet à objet. »

« Pendant qu’on nous amuse avec des guerres et des révolutions qui s’engendrent les unes les autres en répétant toujours la même chose, l’homme est en train, à force d’exploitation technologique incontrôlée, de rendre la terre inhabitable, non seulement pour lui mais pour toutes les formes de vies supérieures qui s’étaient jusqu’alors accommodées de sa présence. Le paradis concentrationnaire qui s’esquisse et que nous promettent ces cons de technocrates ne verra jamais le jour parce que leur ignorance et leur mépris des contingences biologiques le tueront dans l’œuf. La seule vraie question qui se pose n’est pas de savoir s’il sera supportable une fois né mais si, oui ou non, son avortement provoquera notre mort. »

« Et c’est une chance terrible, somme toute, que la survie ne soit pas possible “en transformant” notre société un peu plus encore en une cage à lapin de ciment et plastique, en nous échinant encore un peu plus devant des automates toujours plus gros et plus cons, pour produire de la camelote toujours aussi laide, aussi superflue et vite démodée, qu’ira s’accumuler sur des montagnes d’ordures toujours plus hautes partout où on ira. Ni en continuant à améliorer nos fusées à têtes multiples, en nous tapant dessus à coup de mitraillettes, de défoliants, de napalm et de fusées, pour nous arracher les uns les autres les derniers lambeaux de matières premières qu’ont pas encore été transformées en puantes ordures. C’est heureux que ce soye comme ça, et la crise de notre fin de millénaire, de notre fin du quatrième milliards d’années pour mieux dire, si on n’y laisse pas la peau, ce sera alors notre chance d’arriver enfin à vivre comme des hommes. L’Écologie elle va nous y obliger à coups de pied dans le cul – des coups de pieds si violents qu’on ne sera pas prêt de les oublier, s’ils nous cassent pas les reins aussi secs. La leçon qu’elle va nous enseigner, l’Écologie, elle va pas être rose, vous faites pas d’illusion, et qu’elle soye utile ça dépendra que de nous : vivez comme des hommes, ou au moins pas plus mal que les animaux, mille fois moins idiots et moins carnes que vous, ou bien crevez tous. »

➡ « L’irruption du fait écologique dans notre champ de conscience signifie d’abord la fin de l’anthropocentrisme, et par voie de conséquence, la fin d’un certain ratiocentrisme cartésien : le je pense donc je suis figurant au centre du monde, comme seule réalité indubitable, avec tout le reste autour et s’y rapportant. D’où la mécanisation de l’univers, figurée puis effective, conformément à nos seules structures intellectuelles. Cette remise en question devra se faire mais ne l’est pas encore. »

➡ « Ce qui est sûr, c’est que le problème de la survie n’est pas politique (n’est pas, veux-je dire, seulement politique, n’en déplaise à ceux qui font de la politique une mystique). Il va beaucoup plus loin que ça. C’est le problème de la relation de l’homme au réel. C’est un problème religieux (du latin ligere : relier). Une religion est un système de relation de l’homme à la nature, et par suite de l’homme à l’homme. Elle n’implique pas forcément l’existence de Dieu (problème propre à l’univers mental judéo-chrétien) ni celle d’une église. Toute grande révolution (89) est un changement de religion. Nous vivons sur l’héritage religieux de 89. Le culte du Progrès est une religion messianique et fataliste, basée sur des dogmes métaphysiques, entretenue par une église qui a, comme celle du Moyen Âge, les monopoles de l’éducation et de la santé publique, plus beaucoup d’autres que l’église médiévale n’avait pas. Et si chacun doit rester libre de choisir sa foi, ou de n’en choisir aucune, il ne reste pas moins que la société dans son ensemble doit aujourd’hui changer la base même de ses comportements suicidaires – changer son mode de relation au réel – changer de religion. »

➡ « La “mécanique humaine” est pas prévue pour fonctionner sans arrêt. La “mécanique humaine” est pas une mécanique. Les mécaniques c’est parce qu’on en fabrique qu’il faut croire que ça existe. La “mécanique humaine” ne s’insère pas sans mal dans un monde mécanisé. La logique de la machine se substitue insidieusement à celle de l’homme qui fait semblant d’y croire, qui fait semblant de marcher, qui fait semblant de suivre, qui suit, tant bien que mal, à grands coups d’équanyl, de valium, de librum, poussé au cul. Y’a longtemps que c’est plus du tout de l’homme qu’il s’agit, de n’importe quel homme, même de celui qui est en haut, celui-ci aussi subit, se conforme à une finalité qui contrecarre les siennes beaucoup plus radicalement que ne le faisait l’antique fatalité naturelle, laquelle, d’ailleurs, n’a pas disparu, tire dans sa direction, ajoute de l’écartèlement. Tout le problème est de repousser l’échéance, l’éclatement, l’effondrement, un peu plus loin, encore un peu plus loin. Y’a toujours une chance de mourir avant. La science et la technique résolvent un tas de petits problèmes qui, finalement, n’étaient pas les nôtres car les nôtres étaient toujours plus vastes que nous ne les avions formulés. Mais les fausses solutions font naître chaque fois des problèmes neufs qui font boule de neige, chaque fois plus énormes, plus insolubles, plus impossibles, même à poser : indéfinissables. »

Post de Nicolas Casaux

- Article complet sur : Y’en a plus pour longtemps : la civilisation et le désastre écologique (par Pierre Fournier)

P.-S.

- Compléments :


Forum de l’article

  • Revenir aux bases de l’écologie au lieu de se noyer avec les électrologistes Le 10 novembre 2020 à 21:18, par rutabaga

    Bonjour
    Je trouve que les personnes qui veulent revenir à la bougie en cire, que ce soit les indiens du futur ou d’autres, je trouve disais-je que ces personnes oublient les handicapés et les vieillards qui ont besoin de mécanisation et même parfois d’automatisation, pas par luxe, mais pour survivre...
    Peut-être que les vieillards, qui sont de plus en plus nombreux et qui parfois ont du pouvoir , vont être des boulets qui vont ralentir votre élan si vous ne leur parlez pas.

    Amishcalement votre.

    Répondre à ce message

    • Revenir aux bases de l’écologie au lieu de se noyer avec les électrologistes Le 11 novembre 2020 à 12:28, par Les Indiens du Futur

      Salut,

      Oui c’est une question importante et délicate, merci d’en parler.
      Ca mériterait tout un article..., d’ailleurs si vous avez vous-mêmes des idées et pistes de solutions...

      Quelques remarques vite-fait :
      Si on veut la fin de la civilisation industrielle, ce n’est pas forcément le retour à la bougie non plus.
      Si on pourrait concevoir (dans un changement de perspective et dans une autre société offrant une qualité de vie et un bien vivre) de se passer d’i-phone, de 5G, d’ordi et de bagnoles pour tout le monde, de voyages touristiques en avion, etc., c’est moins évident dès qu’on touche à la santé.
      Pratiquement tout le monde, et sans doute encore davantage en avançant en âge en effet, va vouloir conserver des technologies complexes permettant de soulager des problèmes de santé et de prolonger/sauver des vies.
      Donc on aura souvent tendance à vouloir garder toute une série d’appareils hyper-technologiques et donc toutes les infrastructures industrielles qui permettent de les fabriquer.

      - Remarques préalables :
      D’abord, il y aurait moyen de réduire considérablement les maladies dites de civilisation, et donc d’avoir beaucoup moins de maladies difficiles à soulager (cancers, dépressions, obésité...) que ce soit pour les jeunes ou les plus vieux.
      Ensuite, avec d’autres médecines (low-tech) à inventer ou à redécouvrir (en remettant en cause la prétention de la médecine à être une science), il y aurait peut-être moyen de soulager efficacement des tas de problèmes sans recourir à des technologies complexes nécessitant une grosse infrastructure industrielle.
      Et plus généralement, dans une société où les personnes peuvent réellement s’épanouir et vivre selon leur conscience et besoins (donc libérée du capitalisme et des tyrannies étatisées), il y aurait beaucoup moins de maladies graves et autres problèmes (suicides ratés, accidents graves...) qu’actuellement.

      Mais ça ne résoudrait pas tout, et pas de suite, donc que faire pour les nombreux cas résiduels ?

      Quelles options collectives en gros on aurait dans une optique de société écologique et démocratique ?

      1. Tout le monde accepte de rester sur du low-tech, et accepte que tout ne puisse pas être guéri et soulagé, donc accepte un certain nombre de morts qui auraient pu être évitables avec des hautes technologies dérivées du système industriel, en considérant que ces problèmes là sont globalement moins graves que les nuisances du maintien d’un certain monde industriel pour la santé. En l’état actuel, ce choix est difficilement imaginable

      2. Garder et développer malgré tout certaines technologies complexes (et nécessitant des dispositifs industriels) en les contrôlant drastiquement, et en essayant d’éviter au max les nuisances liées (extractivisme, mines, travail nécessaire à la fabrication, etc.)
      En gros, ça voudrait dire « pas de nucléaire, pas de 5G ni d’’i-phone », mais « des IRM et laboratoires génético-biochimiques ». Ce qui est un peu contradictoire avec les nécessités d’une société écologiquement soutenable et démocratique, mais il peut être fait le choix de supporter certaines nuisances pour les questions de santé.

      Il y aurait donc toute une réflexion à mener sur la santé, sur comment la conserver, sur la médecine, etc. (sans parler des questions sur les maladies graves et génétiques de naissance)
      Il existe sans doute certains auteurs et médecins qui ont déjà réfléchi à tout ça. A rechercher.

      Ce sont des questions de société complexes auxquelles nous on n’a pas vraiment de réponses, et où seuls des débats politico-éthiques-moraux collectifs approfondis, conscients, muris et démocratiques pourraient répondre.

      Sinon, on a trouvé ces deux articles qui abordent indirectement le sujet :
      https://www.partage-le.com/2020/09/08/contre-lorganisation-scientifique-du-monde-entretien-de-pmo-avec-la-decroissance/
      https://www.partage-le.com/2015/05/31/techniques-autoritaires-et-democratiques-lewis-mumford/
      ou ce passage de celui-ci :
      https://www.partage-le.com/2020/10/13/12471/

      Un enfant dans le monde meurt toutes les vingt secondes chaque jour du fait d’une maladie liée à l’eau ou au défaut d’eau, Les seules diarrhées tuent un million et demi d’enfants par an, plus que la malaria, le sida et la rougeole réunis. En une époque d’avancées médicales époustouflantes, une bonne moitié des lits d’hôpitaux sont occupés par des patients atteints de maladies qui pourraient pratiquement être éliminées s’ils avaient seulement accès à une eau de bonne qualité et à des sanitaires décents. En leur absence, des pathologies qu’il serait facile de prévenir emportent chaque année l’existence de plus d’hommes qu’il n’en meurt dans les guerres et les conflits qui empoisonnent la planète.

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