- Dénouer le facteur bloquant de l’emploi
- Sortir de la dépendance et de l’individualisme
- Créer et renforcer des espaces libérés du capitalisme et de l’étatisme
- Ne plus se désolidariser des autres modes d’action
- Dépasser l’anti-capitalisme tronqué
- Faire grandir une culture de résistance
- Profiter des crises et des affaiblissements de l’Etat-capitalisme
Depuis des années, l’ultra-capitalisme avance ses pions sans trop de résistances. Le gouvernement est là pour réprimer violemment et jouer du 49-3 si besoin.
Seuls le soulèvement des gilets jaunes et la pandémie ont fait reporter certaines mesures anti-sociales importantes.
- Quelques pistes pour (se) préparer à un basculement révolutionnaire
- Surgir dans la tempête pour jeter le techno-monde par dessus bord - Be Water
Contrairement à ce qu’on pourrait croire et ce que les puissants veulent qu’on croit, il est possible collectivement de faire plein de choses essentielles, même en étant peu nombreux.ses, même sans argent, même sous l’état d’urgence, même dans l’actuelle situation d’écrasement mortifère des forces de vie et de contestation. Il suffirait de réorienter un peu certaines de nos actions, objectifs et stratégies.
Quelques constats :
Le gouvernement piétine les formes qui servaient à faire croire qu’on était en démocratie. Les gouvernements ignorent ou écrasent les protestations et les grèves, même massives.
Les secteurs d’activité et corporations sont écrasés, privatisés, libéralisés les uns après les autres et ne font pas le poids si ils restent seuls à lutter.
Le système policier violent et intrusif s’étend partout, sert de rempart et remplace une politique sociale et écologique digne de ce nom. Les robots autonomes et les logiciels renforcent le régime policier et l’étendent partout.
La forme Etat-capitalisme, la civilisation industrielle est à nu, ses destructions, ses violences, ses voies irréformables sont partout visibles, le covid-19 en est une manifestation parmi d’autres. Les gros médias de milliardaires influent fortement les élections et orientent tout vers les idées d’extrême droite et le libéralisme extrémiste.
Face aux menaces de précarité et de catastrophes, la plupart des plus installés se braquent sur le conservatisme et veulent garder leurs avantages, et nombre de pauvres coincés par les galères se replient dans la survie et la résignation, la soumission, tandis que d’autres veulent croire que voter RN ferait bouger les lignes.
Les formes « symboliques » et limitées de contestation sont donc inopérantes, des réformes ne suffisent pas, on a besoin de changements radicaux et profonds, ce que ne pourront apporter des grèves épisodiques ou des élections.
La norme sacralise la forme travail et l’emploi, les rendant indépassables. Pourtant, le travail et le marché de l’emploi, l’Economie peuvent être critiqués et rejetés au profit d’autres formes d’organisations sociales et de partages des activités et de leurs produits.
La classe ouvrière a elle aussi largement sacralisé le travail. Etant dépossédés de longue date du pouvoir économique et politique, les travailleurs ont eu tendance à survaloriser ce sur quoi ils ont (avaient ?) un certain pouvoir, le travail, au point d’adhérer progressivement aux mêmes folies que leurs maîtres capitalistes et technocrates : la méritocratie, le corporatisme, la valorisation du sacrifice et de la performance, la critique de l’oisiveté et des réfractaires au travail...
Majoritairement, la classe ouvrière a voulu faire du travail une force pour contrer les menées du patronat et du Capital, pour obtenir des droits et un meilleur (un moins mauvais) traitement, au lieu de détruire d’un même geste la « valeur travail », le capitalisme et l’Economie (en temps que système-monde devenu central).
A présent, tout le monde se retrouve aliéné au travail et à ses lois, soumis à la peur de la précarité et du chômage, inféodé aux impératifs de rentabilité et de compétitivité et d’attractivité marchande, toujours sous la menace de délocalisations là où c’est moins cher, et les classes laborieuses sont divisées, intoxiquées par l’idéologie consumériste et capitaliste.
Sans parler bien sûr de la destruction dantesque du monde vivant opérée par l’extractivisme, l’industrie, l’urbanisation, les pollutions diverses, la déforestation..., avec la complicité active des gouvernements et technocrates.
Les emplois « verts », les énergies dites « renouvelables » ou « propres », les croissances « vertes » ne peuvent au mieux que ralentir le plongeon final, ou accélèrent sa venue. Le capitalisme réclame par nature toujours plus et l’effet rebond annule les éventuelles économies réalisées ici ou là.
A présent, les machines, les robots, les IA, les algorithmes et les logiciels remplacent la force de travail humaine, et pas seulement dans les usines, et les travailleurs deviennent de plus en plus superflus, cantonnés à des taches toujours plus parcellaires et machiniques dont tout leur échappe.
Continuer la valorisation du capital, la croissance, le consumérisme et le productivisme, et fournir des emplois, souvent « maltraitants » à une partie des travailleurs (et de gros profits à une minorité), et continuer à polluer et détruire le vivant OU quitter le capitalisme et le techno-monde pour préserver le vivant tout en satisfaisant les besoins et désirs de toustes dans l’égalité et les activités partagées ?
- Quelques pistes pour (se) préparer à un basculement révolutionnaire
- L’avalanche démarre avec un tout petit rien fragile et imperceptible, puis plus rien ne l’arrête
Deux options :
Les basculements positifs ne viendront pas tout seuls, donc :
- Agir volontairement pour faire grandir une culture de résistance, des espaces libérés, et se préparer aux prochains soulèvements ?
- Juste attendre le prochain soulèvement spontané type GJ ?
L’option 2. a l’avantage de la surprise incontrôlable et de l’inventivité, mais il a aussi des inconvénients :
- Il risque de venir bien tard par rapport aux catastrophes sociales, climatiques et écologiques
- En face, ils sont organisés et se préparent activement
- Un soulèvement, même puissant, aura du mal à tenir la distance si rien n’existe avant pour le soutenir
- Tout ça pourrait mener à l’échec et au risque accru de montée d’extrême droite
Avec l’option 1. on se prépare matériellement, politiquement et collectivement, ainsi on a beaucoup plus de chances de pouvoir amplifier un soulèvement.
Si on bâtit en grand partout des autonomies, des démocraties directes, des activités autogérées, des espaces libérés de l’Etat et du capitalisme, alors le nécessaire effondrement provoqué/hâté de la civilisation industrielle (=productivisme, croissance, valorisation du capital, marché du travail, étatisme, patriarcat, consumérisme, hiérarchies...) sera moins rude et moins susceptible de conduire à de nouveaux régimes autoritaires. Et ces mondes interstitiels, communaux, seront d’autant plus attractifs s’ils sont forts et étendus.
Une course contre la montre est donc engagée entre les actions volontaires de résistance pour faire s’effondrer et remplacer la civilisation industrielle ET les forces qui veulent faire durer la civilisation industrielle qui détruit tout et fait s’effondrer le règne vivant et ses habitats.
- Quelques pistes pour (se) préparer à un basculement révolutionnaire
- L’eau finit toujours par tout éroder
Une culture de résistance :
Pour sortir de l’impuissance et de l’attentisme, du désespoir résigné et des micros-actions, il faudrait faire grandir une culture de résistance tous azimuts.
Quelques exemples :
- Ne plus attendre l’élection « salvatrice »
- Multiplier les « maisons du peuple »
- Elargir les ponts, coopérations, coordinations, rencontres...
- Faire grandir des médias de masse complices
- Multiplier les Communs, les coopératives hors marché, les mutualisations, les lieux de partage des savoirs faire, le besoin et le goût de faire ensemble plutôt que d’obéir à un patron ou au libre marché, les occasions d’(auto)éducation populaire
- Travailler moins quand c’est possible, et fournir des débuts d’autonomie et d’alternatives au marché de l’emploi, comme l’a fait la coopérative intégrale catalane
- Penser aussi aux activités de lutte et d’autonomie qui soient facilement rejoignables
- Apprendre l’auto-défense numérique, juridique et autres
- Ne pas se désolidariser des diverses actions illégales (émeutes, pillages, sabotages...) qui portent la même révolte
- Ne pas attaquer publiquement les alliés. Rester solidaire en public face à l’oppresseur et régler les conflits en privé
- Ne pas négocier avec les pouvoirs à la place des bases
- Rétablir des pratiques de subsistance soutenable
- Se lier aux paysans, réinvestir l’artisanat manuel
- Se rôder aux pratiques d’organisation démocratiques via assemblées et auto-organisation
- Soutenir les luttes des exclus et des féministes
- Défendre becs et ongles les territoires et empêcher l’expansion des destructions du vivant
Profitons de la crise structurelle de la civilisation industrielle, de ses moments de faiblesse, de la mise en lumière croissante de sa violence structurelle, suicidaire et irréformable pour pousser le bouchon.
Profitons des catastrophes pour faire vivre une alternative radicale à la gestion étatiste-capitaliste autoritaire au lieu de réclamer davantage d’Etat, de technologie et de reprise économique.
Des soulèvements et insurrections pourraient alors accélérer les basculements révolutionnaires et asseoir la puissance d’attraction des espaces déjà libérés.
A l’avenir en France, l’Etat, les médias des milliardaires, le régime policier et les forces capitalistes ne pourront plus en même temps contenir et masquer les catastrophes qu’ils provoquent partout ET écraser les soulèvements et les espaces libérés.
Si la civilisation industrielle essaie de se réformer franchement, ce qui est fort improbable et plutôt impossible, ça ne fera que l’enfoncer, l’affaiblir, et révéler, en creux, la nécessité/possibilité de faire sans elle.
En cas de soulèvement important, ne soyons plus dupes des futurs jolis discours et des éventuelles velléités de nouvelles constitutions, de constituante, de nouveaux gouvernements. Au mieux, ces contre-feux opportunistes atténueraient temporairement notre joug et permettraient de consolider les espaces libérés, mais il n’en reste pas moins que la démolition du capitalisme et la destitution de la forme Etat/gouvernement devra se poursuivre au profit des fédérations de lieux communaux et autogérés surgis des luttes et des autonomies.
Enfonçons le clou au lieu de desserrer naïvement l’étreinte.
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- Submerger la civilisation industrielle avant qu’elle ne nous achève
En bref :
Au lieu de protester épisodiquement chacun dans son coin, créons des alliances en remontant aux racines communes des oppressions.
Approfondissons l’anti-capitalisme et les formes de démocraties directes localisées.
Au lieu de subir à tour de rôle, agissons ensemble.
Au lieu d’accentuer la dépendance au marché du travail et de nourrir les chaînes des carnages, bâtissons des autonomies, des lieux libérés et une culture de résistance.
Au lieu d’attendre et d’échouer (trop souvent) à défendre ce qui reste, passons à l’offensive pour tout reconstruire.
- Quelques pistes pour (se) préparer à un basculement révolutionnaire
- La puissance et la beauté de l’eau en mouvement
Des noeuds importants restent à résoudre :
Syndiqués, travailleurs, chômeurs et précaires vont-ils continuer chacun à leur tour à réclamer aux Maîtres des sous, des emplois, de meilleures miettes, une écoute ?
Ou vont-ils s’allier pour en finir avec le règne du travail, avec le système capitaliste productiviste, avec l’Etat qui le défend, avec toutes les institutions qui permettent aux puissants de dominer et de s’enrichir aux dépends du vivant ?
Veut-on cultiver une fausse singularité qui exclue les autres catégories ou veut-on conjuguer les différences pour en faire une force indestructible ?
Vont-ils s’allier pour, en même temps, en finir avec un système qui les agresse tous spécifiquement de manière particulière et qui globalement détruit le vivant et une « bonne vie » pour tout le monde ?
Les bulles de consommation privée et le chacun pour soi individualisé vont-ils être dépassés par l’envie de bâtir des sociétés vivables et soutenables pour tout le monde ?
L’envie de reprise du même système délétère va-t-elle un jour être remplacée par l’envie de le détruire ?
S’accroche-t-on encore aux promesses mortelles de croissance et d’emplois du capitalisme ou impose-t-on des assemblées locales en démocratie directe pour choisir ce qui est produit et comment, et de quelle manière c’est distribué ?
Veut-on en finir avec le techno-monde ou veut-on à tout prix croire au solutionnisme technologique qui permettrait de poursuivre ce système destructeur ?
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