Nous ne serons pas radioactif.ve.s !

Retour sur les RENCONTRES NOMADES 2022 à Bure

vendredi 14 octobre 2022, par Stéphane.

Du 15 au 21 août dernier ont eu lieu à la gare de Luméville près de Bure, les Rencontres nomades, rassemblement annuel des chorales révolutionnaires de toute la France. Des rencontres qui ont lieu chaque année dans un lieu de lutte et qui ont réuni cette année près de 400 personnes dont des membres des chorales de la Meute à Die et de la Horde à Crest.
Durant cette semaine, organisée en auto-gestion, des chants sont transmis, des ateliers et activités diverses sont proposées par les participant.e.s et des temps sont dédiés à la lutte du territoire, en l’occurrence cette année, la lutte contre le projet de poubelle nucléaire CIGEO. Parmi ces temps, une action chantée devant le siège de L’ANDRA (Agence Nationale pour la gestion des Déchets Radioactifs) dont j’ai réalisé un petit film (Nous ne serons pas radioactif.ves ! visible ici https://vimeo.com/759115559)

Pour résumer le projet d’enfouissement des déchets à Bure, l’état français tente de faire sortir de terre et rentrer sous terre un centre d’enfouissement des déchets radioactifs (en tous les cas les plus radioactifs). Il a choisi pour cela le site de Bure dans la Meuse. Depuis 1998, année durant laquelle le choix du lieu a été officialisé, une grosse mobilisation s’est développée sur place contre le projet. Une mobilisation qui a pris de de multiples formes de la simple pétition aux recours juridiques et administratifs en passant par l’achat de lieux collectifs mais aussi des occupations comme celle du bois Lejus en 2019.
Les opposant.e.s pointent du doigt la technique peu sûre d’enfouissement irréversible, son impact sur les ressources en eau, l’absence de débat démocratique. Elle demande en outre et avant tout l’arrêt de la production de déchets nucélaires et donc l’arrêt des centrales.

Où en est on sur place ? Au mois de juillet dernier, malgré moultes avis négatifs lors de la consultation, Cigéo a été classé parmi les opérations d’intérêt national (OIN) et déclaré d’utilité publique (DUP), ce qui permettra à l’État d’exproprier les propriétaires des parcelles nécessaires à la construction du projet. Par le biais des SAFER (Sociétés d’Aménagement du Foncier et d’Établissement Rural), l’Andra s’est progressivement accaparée plus de 3000 ha de terrains, dont 1000 ha de terres agricoles et 2000 ha de forêts, harcelant de nombreux·ses paysan·nes, augmentant le prix du foncier et compliquant les installations agricoles. Concrètement, il manque encore à l’ANDRA 5% des terres nécessaires à la réalisation du projet. Le site de la gare, où les Rencontres ont eu lieu, en fait partie. Ce site, acheté par un groupe de militant.e.s et d’opposant.e.s en 2000, est un espace de 8ha faisant office de lieu de ressource, d’organisation et d’accueil. De nombreux événements y ont été et y sont organisés. La DUP et l’OIN permettent à l’Andra de racheter le lieu.

Loin de s’affaiblir, la résistance sur place est repartie de plus belle après le passage difficile qu’a constitué la mise en examen de 7 militant.e.s pour association de malfaiteurs. Après près de 4 ans d’instructions, de milliers d’heures d’écoutes, de plusieurs perquisitions, de restrictions comme l’interdiction de se voir et de se parler pour les accusé.e.s pendant plus de deux ans et l’interdiction de présence en Meuse et en Haute-Marne et après plus d’1 million d’euros dépensés, les 7 prévenus ont tous été relaxés en juin 2021 de l’accusation (d’association de malfaiteurs). Les avocats estimaient alors que l’accusation n’avait été qu’un « prétexte » pour « réprimer le mouvement antinucléaire d’opposition à Cigéo », « pour les écouter, les perquisitionner, les surveiller, les contrôler et les éloigner de la Meuse et de la Haute-Marne » [1].

Comme j’ai pu le constater lors des rencontres et des temps d’infos, de discussions, la résistance a repris du poil de la bête et s’organise notamment dans les lieux collectifs, la gare mais aussi la maison de la résistance à Bure, l’augustine à Mandres en barrois [2]... Elle doit cependant faire face à une énergie et des moyens massifs mis en place par l’Etat pour étouffer la contestation.
Lors d’une soirée de témoignages des personnes en lutte habitants la zone de Bure, on a par exemple appris que l’ANDRA, non contente de racheter des maisons en vente sur le territoire, avait décidé aussi d’en détruire quelques-unes pour éviter que des opposant.e.s ne les rachètent.
On a aussi constaté comment de grandes quantités d’argent étaient dédiés à l’achat des consciences des citoyen,.ne.s et des décideurs politiques. On a par exemple appris que certaines banques conditionnaient l’octroi de prêts à l’acceptation d’un fond d’aide, le GIP (Groupement d’Intérêt Public Haute-Marne [3]), financé par l’ANDRA. Ainsi, un opposant historique, qui voulait monter un projet de fromagerie, n’a pas pu avoir son prêt puisqu’il refusait l’argent de l’ANDRA !...
Concrêtement, on a aussi pu vivre la surveillance policière, que ce soit par des contrôles sur les routes, par des survols du site de la gare, par l’encadrement policier massif de notre sortie dans les lavoirs du coin pour aller chanter à la rencontre de la population. On a pu aussi constater les moyens financiers mis au service des municipalités pour refaire leur route, leur éclairage, leur salle des fêtes... Sans parler des sorties organisées par les écoles, collèges, lycée pour visiter le laboratoire de l’ANDRA et les expos qu’il monte. Il faut se pincer pour le croire, lors des rencontres nomades, l’expo proposée s’intitulait « Secrets d’abeilles » ! [4].

Depuis les Rencontres nomades, 32 organisations opposées au projet ont déposé en septembre des recours à la Déclaration d’Utilité publique du projet auprès du conseil d’Etat. Côté politique, un front parlementaire Anti Cigéo a vu le jour réunissant plus de 100 députés [5]. Et... Jean-Marc Jancovici, ingénieur et enseignant, a carte blanche dans les médias pour promouvoir le nucléaire avec son costume faussement écolo (je vous conseille la lecture de ces articles à ce sujet [6] [7]).

En tous les cas, la lutte a besoin de nous toustes que ce soit :

  • En allant sur place pour s’impliquer sur un chantier, pour participer à un événement, pour y vivre, pour y organiser un événement à la manière des rencontres nomades
  • En faisant un don financier pour améliorer le quotidien sur place, pour financer la lutte juridique
  • EN se mobilisant dans votre territoire contre l’Andra ou ses sous-traitants.
  • En parlant du projet autour de vous, en le faisant connaître, en organisant des événements d’infos et de soutien

Bref, de multiples moyens de se mobiliser et d’empêcher ce projet de se réaliser !

Nous ne serons pas radioactif.ve.s !

Pour aller plus loin :

Les sites internet :

Les brochures :

Les films :


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