Une tribune lance des appels à interdire partout les pesticides, à désobéir, à résister avec les paysan.ne.s, à lutter contre l’agriculture industrielle et son monde écocidaire.
Ici dans la Vallée de la Drôme, dans la Drôme, quels vont être les maires à interdire immédiatement tout pesticide de synthèse sur "leurs" communes ?
Les habitant.e.s vont-ils les soutenir, vont-ils soutenir les agriculteurs bios et autres permaculteurs ? Vont-ils réquisitionner des terres pour nourrir les gens au lieu de nourrir le CAC 40 et ses actionnaires ? Vont-ils s’entraider au lieu de laisser les paysans aux mains des banques, et du Crédit Agricole en particulier ? Vont-ils court-circuiter les grandes surfaces et organiser autrement la distribution, afin notamment que des produits de qualité soient accessibles aussi aux plus pauvres ?
Lettre aux maires : contre les pesticides et leur monde
Tribune. Depuis mai 2019, de plus en plus de maires ont pris la décision d’interdire les pesticides lorsqu’ils sont épandus près des habitations. L’Etat leur conteste pourtant ce droit élémentaire à défendre la santé de leurs concitoyens et concitoyennes. « Pour protéger les habitants, il faut peut-être désobéir un peu », assume le maire de Langouët, dont l’arrêté vient d’être suspendu.
Nous pensons même qu’il faudra désobéir beaucoup, si l’on veut arrêter la destruction des milieux vivants et l’empoisonnement universel en cours. Nous saluons le geste de ces maires, de Langouët à Saint-Eloi-de-Fourques, de Revest-des-Brousses en passant par Gennevilliers et La Roque Sainte-Marguerite, qui ont pris le risque de désobéir.
Notre modèle agricole est un non-sens
La toxicité de ces produits chimiques est établie par la communauté scientifique, aussi bien pour ceux et celles qui cultivent la terre que pour la population et les écosystèmes. Pourtant, tout le monde pisse des pesticides. On nous parle, pour nous rassurer, de « dose journalière autorisée », de « tests de cancérogénicité », de « risque exagéré ». On nous assène, contre toute évidence, que sans pesticides, nous mourrions de faim.
Nous ne voulons plus écouter ces sottises, ni avoir à discuter de petits ajustements, de « petits pas ». Les pesticides ne sont pas à eux seuls le problème. Le problème, c’est le modèle agricole qui les rend incontournables. Un modèle intensif et destructeur, dont le dernier rapport du Giec a montré qu’il ravage la vie sur terre, épuise et pollue les sols, précarise les agriculteurs, et nous nourrit à la fois mal et inégalement. Un modèle qui, avec le dérèglement climatique en cours, est en danger grave.
Cette agro-industrie sur-mécanisée, reposant sur des intrants chimiques, des monocultures et des accords de commerce mondiaux, est un non-sens. Un tiers de la production alimentaire est perdu ou finit dans les poubelles et un autre tiers est donné à du bétail, alors que presque un milliard de personnes souffrent de la faim. L’agro-industrie, qui occupe les trois quarts des terres agricoles, ne nourrit qu’un quart de l’humanité. Les pesticides sont au cœur de ce système qui assujettit les petits agriculteurs et agricultrices aux grandes firmes.
Nous voulons une agriculture locale, en harmonie avec l’environnement, respectueuse de ceux et celles qui cultivent, juste, saine et démocratique. Les moyens humains et techniques de cette agriculture sont déjà là, nous les avons toujours eus. En France, des milliers d’agriculteurs et agricultrices pratiquent déjà l’agriculture biologique, d’autres expérimentent polycultures, permaculture et agriculture paysanne ; beaucoup se remettent à jardiner. Le désir de cultiver et de se nourrir autrement se fait sentir, des ZAD jusqu’aux Amap.
L’impasse des agriculteurs est la suivante : « Soit on est durable, mais pas rentable, soit on est performant, mais détesté. » Nous nous devons de les aider, car la « transition » ne sera pas « rentable » pour les financiers de l’agrobusiness, et il n’y aura jamais de « croissance verte ». Un modèle agricole juste et écologique ne suppose rien de moins que l’abandon des pesticides et des machines les plus aliénantes. Une parcellisation plus équitable et une nourriture plus saine, c’est donc d’abord plus de gens qui cultivent la terre.
L’écologie a besoin de nous toutes et tous
Le gouvernement prétend régler la question de l’empoisonnement par les pesticides avec une loi réglementant « l’épandage à trop grande proximité des maisons ». C’est une farce : c’est tout le système agricole qu’il faut transformer, et vite, si nous voulons avoir une chance d’habiter dignement cette planète. Et cela passe par une sortie immédiate des pesticides de synthèse !
A l’instar du syndicat agricole majoritaire, l’Etat va pour l’instant dans le sens contraire. En septembre, il a effacé des milliers de points d’eau des cartes préfectorales pour ne pas avoir à les protéger des pesticides. Il continue de soutenir des plans de « réduction » des pesticides qui n’ont qu’un effet : leur augmentation. Il refuse la création d’un fonds d’indemnisation des victimes des pesticides. Tout porte à croire que l’Etat ne fera rien pour améliorer la situation, car il est enchaîné aux impératifs de croissance.
Les maires ne veulent donc plus attendre : nous non plus. Nous voulons prendre les choses en main. Seule notre résistance organisée contre la dictature de l’argent peut mettre fin à la destruction.
Nous appelons tous les maires et mairesses à interdire les pesticides de synthèse sur leur commune.
Nous appelons paysans, agricultrices, citoyens et citoyennes à s’organiser et s’entraider au niveau local et national pour transformer le système agricole.
Nous appelons l’ensemble des jeunes en grève pour le climat, tous les gens préoccupés par l’écologie à se rassembler devant les mairies contre les pesticides de synthèse, le vendredi 6 septembre à 18 h 30 à l’appel du mouvement « Nous voulons des coquelicots » !
Nous appelons aussi toutes celles et ceux qui le peuvent à rejoindre la mobilisation internationale « Free The Soil » contre l’agriculture industrielle et pour la justice climatique et alimentaire du 19 au 25 septembre à Brunsbüttel (Allemagne), où auront lieu un camp et une action de désobéissance de masse contre le leader mondial des engrais azotés : YARA (départ en bus depuis Paris)
Signataires : Désobéissance Ecolo Paris, Désobéissance Ecolo Rennes, Floraisons, Les Amis de la Terre, Nous voulons des coquelicots, RadiAction, Rennes en lutte pour l’environnement, Résistance Ecolo Reims, des membres de Extinction Rebellion PACA et Bretagne, Extinction Rebellion Rennes, Youth For Climate Ile-de-France