L’agriculture productiviste industrielle a besoin constamment de produits dopants pour compenser la mort des sols qu’elle accapare et détruit, notamment à cause des engrais.
Outre les pesticides, le phosphate des engrais (NPK) est en bonne place sur la liste des substances dangereuses indispensables à l’agro-industrie qui ravagent légalement la biosphère pour alimenter la soif insatiable d’argent du modèle étatico-capitaliste.
Des régions entières et leurs habitants sont sacrifiées et polluées pour la croissance et le productivisme.
Les cyniques et criminels Etats occidentaux colonialistes (en complicité avec de gros intérêts privés) délocalisent les activités minières les plus dangereuses liées aux produits qu’ils utilisent abondamment ici.
De plus, les phosphates peuvent provoquer l’eutrophisation des cours d’eau et estuaires, et détruisent la vie des sols, ce qui augmentent le besoin de phosphore d’origine industrielle.
Les industries des engrais chimiques sont comme des dealers qui prospèrent sur la destruction des "moyens de production" (les sols) de leurs clients rendus captifs.
Par ailleurs, de nombreuses cultures industrielles ne servent pas à nourrir les français.es, mais sont exportées (43%), conformément aux besoins du capitalisme et de sa répartition géographique spécialisée des productions.
voir : Exporter au lieu de nourrir, le « scandale » de l’agriculture française - Première surface agricole de l’UE, la France peine à nourrir sa population : elle préfère exporter, dénonce un rapport de Terre de liens. Un « scandale » orchestré par l’agro-industrie. (...) en France 11 millions de personnes en précarité alimentaire (17 % de sa population). Pire, elle doit importer un tiers de ses fruits et légumes pour répondre à sa consommation. (...) Le modèle agricole industriel est aussi fortement dépendant des importations d’engrais de synthèse, de semences, de pesticides ou encore de pétrole, consommés massivement par les agriculteurs pour rester compétitifs sur le marché international (...) « La France consomme chaque année 8,5 millions de tonnes d’engrais minéraux, pour un coût estimé à 5,7 milliards. Ces engrais sont fabriqués à partir de minerais et de gaz qui viennent principalement de pays situés hors de l’UE (Russie, Maroc, Algérie, Égypte) » (...)
- Le phosphate, un fléau toxique pour les sols et les régions minières
L’empreinte toxique du phosphate-
L’empreinte toxique du phosphate - Une enquête de Laurence Grun et Pierre Vanneste
On le trouve dans le Coca, les lessives, les détergents, les médicaments, les cosmétiques, l’industrie textile, pétrochimique et alimentaire, mais surtout dans les engrais (90% de la production). Cet ingrédient, c’est le phosphate transformé en acide phosphorique.
Enquête sur une industrie minière et chimique qui, depuis deux siècles, déplace ses activités selon les législations, laissant derrière elle une contamination souvent irréversible.
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derrière ce modèle agricole se cache une contamination massive de l’air, des sols et des masses d’eau aux métaux lourds et éléments radioactifs.
Si en Belgique, en Espagne et en France, les usines d’acide phosphorique, trop polluantes, ont progressivement fermé, abandonnant derrière elles leurs déchets, en Tunisie et au Sénégal, elles sont toujours en activité et continuent de contaminer irréversiblement les territoires.
« Pour fabriquer de l’engrais convoyé ailleurs, on nous empêche, nous, de cultiver. Ils détruisent l’agriculture, polluent l’eau et les sols », fustige Demba Fall Diouf, président du Réseau national des personnes affectées par les opérations minières
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« On nous dit que l’exploitation minière crée des emplois, mais c’est faux. Nous en perdons plus que nous n’en gagnons. »
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Une fois extrait, le phosphate est lavé puis traité à l’acide sulfurique pour produire de l’acide phosphorique, destiné à la fabrication des engrais. Sur cinq kilomètres autour de l’usine chimique, les fumées chargées de fluor, de dioxyde (SO₂) et trioxyde de soufre (SO₃) imprègnent l’air. « Vivre ici a des conséquences sur la santé, tout le monde le sait.
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À long terme ces gaz provoqueraient de l’asthme, des infections pulmonaires, des fluoroses osseuses et des cancers. Mais aucune étude épidémiologique ne permet de mesurer l’ampleur de ces problèmes, ni de les relier directement à l’activité chimique de l’usine.
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Pour éviter que trop de fluor ne s’échappe dans l’atmosphère, les ICS ont mis en place un système de récupération sous forme liquide du fluorure d’hydrogène (HF), un gaz extrêmement nocif et corrosif. Ce liquide est ensuite déversé dans l’océan Atlantique à 14 kilomètres de l’usine, sans aucun traitement. Pas moins de 150.000 litres d’acide fluorosilicique, renommé le « jus fluo » par les populations locales, finissent ainsi chaque jour en mer à côté du village de Khondio.
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Trente-quatre ans après le début du déversement, un laboratoire privé sénégalais, le Ceres-Locustox (Centre régional de recherches en écotoxicologie et sécurité environnementale), a analysé le jus fluo. Les résultats sont alarmants : le pH est à 1,8 ; le cadmium et le plomb sont respectivement 500 et 70 fois au-dessus des normes de l’OMS pour l’eau potable. Deux métaux toxiques qui s’accumulent dans les organismes vivants. Les résultats du laboratoire n’ont jamais été rendus publics.
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Une tonne d’acide phosphorique génère cinq tonnes de phosphogypse, un déchet chimique solide, chargé en métaux lourds et éléments radioactifs, tous deux naturellement présents dans la roche phosphatée.
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Ce que Narr et les 3 à 4.000 maraîchers actifs dans les bassins ignorent, mais que l’entreprise, elle, sait, c’est que ces terres sont contaminées. En 2008, une étude menée par le Cirad à la demande des ICS révèle des teneurs élevées de cadmium, chrome, fluor, etc. pouvant « représenter des problèmes pour les cultures et les personnes qui les consomment ». Une étude restée sans suite.
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Dans ces bassins, nous avons nous-mêmes mesuré, à l’aide d’un compteur Geiger mis à disposition par la Criirad, un niveau de radioactivité cinq à six fois supérieur au bruit de fond. Pour l’ingénieur Albert Sarr, « il faudrait faire des études d’impact pour voir si ces légumes sont propres à la consommation. Ils sont vendus partout dans le pays. Les gens ferment les yeux parce que cela représente une certaine économie ».
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Tunisie : Plusieurs études et thèses universitaires, dont celle de Bilel Salhi, témoignent de la forte présence de métaux lourds et de fluor entraînant la contamination des sols, de la végétation et des réservoirs d’eau de la région. Un tiers du couvert végétal du bassin minier de Gafsa a déjà disparu, recouvert par les 2,5 millions de tonnes de boue rejetées chaque année
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Le phosphate est un sujet hautement politique. Exploité par l’État, il est, avec le tourisme, la principale ressource économique du pays et le seul employeur de la région. « Quand ce sera fini, quel sera le futur de la région ? »
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Le golfe de Gabès, autrefois célèbre pour ses eaux poissonneuses et son oasis, s’est gravement dégradé. Chaque jour, 6.000 à 12.500 tonnes de phosphogypse sont déversées en mer, atteignant 180 millions de tonnes en 40 ans. Sallah Ouma El Wardi, issu d’une famille de pêcheurs, constate une situation devenue catastrophique depuis l’installation du Groupe chimique. « On allait nager juste à côté. Même s’il y avait déjà les poussières, le soufre et les rejets des cheminées, il y avait encore du poisson et de la végétation. Petit à petit, le sable s’est retrouvé enseveli sous les couches de phosphogypse. Maintenant, la mer est noire. Sur plus de trois kilomètres, la zone est devenue stérile. Les chiffres officiels disent que nous sommes passés de 370 espèces de poissons à environ 50. C’est une catastrophe. »
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Un rapport de 2017 de l’ICE sur la santé à Gabès souligne l’absence d’études approfondies ainsi que de nombreux dépassements des normes de dioxyde de soufre, particules fines, ammoniac, gaz fluorés, cadmium, fluor et mercure tout autour de l’usine.
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« Avant, ces industries étaient en Espagne, en France, en Belgique. Puis, des lois les ont arrêtées et ont imposé d’importer le phosphate déjà transformé en acide phosphorique. ’autres pays, comme le Maroc ou la Tunisie, sont prêts à payer la facture. Et comme aucune loi n’interdit l’importation de produits non conformes à ses propres normes de fabrication, cette hypocrisie persiste. »
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- Le phosphate, un fléau toxique pour les sols et les régions minières
voir aussi : L’Europe accro aux phosphates marocains - Malgré le conflit larvé sur l’indépendance du Sahara occidental, l’Europe devrait rester dépendante pour ses engrais du phosphate extrait au Maroc. Cet intrant a tout de même été inclus dans la liste des matières critiques pour l’Union européenne.
En bonus, les engrais phosphatés apportent des polluants : Du cadmium, un métal toxique, retrouvé dans du pain, du chocolat et des fruits (...) L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) recommande aussi de baisser la concentration maximale de cadmium autorisée dans les engrais phosphatés à 20 mg/kg, contre 60 mg/kg actuellement.