Lancer des formations à la lutte et à la résistance ? Théorie et pratique dans plusieurs domaines

Lancer en Drôme et ailleurs des « stages » pour améliorer les capacités d’autodéfense et d’offensives stratégiques ?

mercredi 8 septembre 2021, par Ana de(s)formations.

Quelques constats préalables

L’arsenal policier, techno-numérique et juridique dédié à la répression des contestations ne cesse de s’étoffer, de se durcir et de s’étendre.
Les désastres sociaux, écologiques et climatiques continuent de s’aggraver partout.
La puissance des capitalistes et de leurs multinationales crève les plafonds, les records de bénéfices en milliards se succèdent, les Etas continuent à imposer leur diktat et à défendre l’économie de marché.

Pourtant, du côté des rebelles et des contestataires situés à gauche (au sens large) on ne voit pas tellement de « mise à niveau » théorique et pratique.
Pour les primo-manifestant.e.s et nouvellaux rebelles, la formation se fait essentiellement sur le tas et à la dure, avec à la clef de nombreux dommages corporels, des imprudences multiples, des erreurs basiques, des arrestations qui auraient pu être évitées, des dépressions, des burns out, des procès et des emprisonnements, et aussi des « errements » politiques et stratégiques.
De nombreux gilets jaunes peuvent en témoigner.

Pourtant, les mêmes méthodes sont toujours couramment employées, on voit trop souvent le même espoir d’une unité de masse, la même vaine attente que les dirigeants changent ou écoutent, et la même foi dans le pacifisme et la communication (manifestation, happening...) se répètent le plus souvent, le même espoir dans un meilleur Etat ou gouvernement.

Et hélas, malgré l’énergie et l’abnégation souvent employées, les mouvements de révolte n’aboutissent en France à aucun changement conséquent, et se dissolvent dans l’échec, le découragement, l’écrasement.
Certes, des paliers sont souvent franchis, de nouvelles personnes participent aux luttes (mais est-ce que ça compense celles qui les quittent ?), davantage de monde comprend dans sa chair la brutalité, l’intransigance meurtrière et les fondements extrémistes, anti-démocratiques et autoritaires des institutions politiques, économiques et sociales en place. Ce qui est positif et peut participer à un futur (proche ?) tsunami.

Seulement, les changements profonds, les basculements radicaux, les moments révolutionnaires, se font attendre malgré de courageuses initiatives et des victoires locales contre de petits ou gros projets inutiles.
Pendant ce temps, des urgences multiples s’accumulent, la Machine et ses instruments de contrôle et de ravage se renforce (même si il s’agit aussi d’un colosse aux pieds d’argile), la précarité s’étend, la destruction de toute autonomie et de nos moyens de subsistance continue, la privatisation des communs aussi.
Alors qu’il faudrait plutôt augmenter nos capacités d’autonomie et d’action collective, le système tend au contraire à les détruire et à individualiser.

Les politiciens ont des experts à leur service, policiers et militaires suivent des formations et sont armés jusqu’au dent, les capitalistes ont des bataillons de salariés spécialisés et dûment formés pour servir et défendre leurs intérêts.
Et les rebelles compteraient uniquement sur leur nombre, leur spontanéité, leur bon droit et leur bonne volonté ??!

Lancer des formations à la lutte et à la résistance ? Théorie et pratique dans plusieurs domaines
Des stages pour être libre et sauvage

Des formations adéquates pourraient aider à franchir d’autres paliers

On sent bien que la situation ne va pas se calmer, bien au contraire.
Des sortes de formations, des « stages » pourraient donc grandement aider les nouvelles personnes engagées (et aussi les plus anciennes) à être mieux outillées d’un point de vue théorique et pratique, afin de mieux faire face au système en place sur tous les plans (communication, action, organisation, argumentation...).
Des formations adéquates pourraient aider à s’éviter certaines déconvenues et à franchir plus vite des paliers.
Vu que l’éducation populaire a pris un coup dans l’aile et que les maisons du peuple se font attendre, ce type de formations pourraient en partie les remplacer.

Il ne s’agirait pas de fabriquer des élites, des professionnelles, des chefs, mais au contraire de multiplier les personnes « formées » (et aptes à transmettre à leur tour), et donc les capacités d’autonomie, d’auto-organisation, d’horizontalité, de spontanéité, de résistance, etc.
Ce qui pourrait au passage limiter les risques d’émergence de chefferies, de suivisme aveugle d’unE leader charismatique, de direction/récupération par un syndicat ou un parti, et par ailleurs accélérer les sorties individuelles et collectives du confusionisme entretenu par le flot médiatique, les médias du pouvoir, la nébuleuse d’extrême droite et certains lobbys qui y ont intérêt.
Il ne s’agirait pas non plus d’instaurer une espèce de caste de formateur-trice qui détiendrait tous les savoirs et les transmettrait aux masses ignorantes. Il faudrait plutôt imaginer des dispositifs où toute personne qui détient un bout de savoir utile, théorique ou pratique, pourrait le transmettre aux autres. Des sortes d’universités libres, des auto-formations partagées ?

Il faudrait que ce soit gratuit ou à prix libre, accessible en tout cas.

A quoi pourraient ressembler de telles « formations » ?

C’est à imaginer collectivement, ça pourrait prendre différentes formes suivant les volontés, les connaissances et le contexte local.

On pourrait par exemple imaginer une sorte de programme à la carte (à dimensionner suivant les connaissances des personnes) à suivre durant plusieurs mois, avec ensuite des sortes vérifications de connaissance, des tests, des mises en application pratique.

- On pourrait imaginer pour la théorie :

  • Proposer une liste de lectures (livres, articles, revues...), de vidéos, de documentaires, de films, de médias
  • Des séances d’arpentage collectif d’ouvrages ou de vidéo
  • Des moments de discussion-débat sur un sujet en petits groupes
  • Mieux connaître ses droits face à la police et la justice
  • Savoir où attaquer juridiquement les projets inutiles
  • etc.

- On pourrait imaginer pour les exercices pratiques :

  • Consulter un site internet sans laisser de traces pour remonter à soi
  • Savoir démarrer et utiliser un ordinateur via une clé usb (le système d’exploitation et les logiciels s’exécutent dans la mémoire vive) et un système Linux (TAILS, Mint, Ubuntu...)
  • Se procurer un téléphone « anonyme »
  • Une formation complète à l’utilisation d’ordinateurs et d’internet pour les motivéEs qui n’y connaissent que dalle. (pour les non-motivéEs par ce type de formation, mieux vaut qu’ils-elles évitent un usage militant de l’ordi et du web)
  • Se créer une boite mail anonyme via des fournisseurs sécurisés et des navigateurs TOR (à ce sujet voir infos sur les moyens de répression employés récemment via des requêtes envers Protonmail)
  • Etablir un protocole de communication, plus ou moins sécurisé, hors ligne et en ligne avec ses potes rebelles
  • Apprendre à réaliser, ou à déjouer, une filature
  • Savoir repérer les diverses caméras dans l’espace publique
  • Savoir se protéger un minimum des éventuels espions et infiltrés, sans pour autant entraver toute « expansion » (culture de la sécurité)
  • Savoir reconnaître à leurs uniformes les divers membres des forces de l’ordre
  • Observer les mouvements de foule et de FDO dans une manifestation
  • Identifier les potentiels alliés de sa région (identifier aussi les ennemis et adversaires)
  • Savoir créer des moyens internet de communication publique anonymisés et indépendants des GAFAM
  • Connaître son territoire et sa géographie
  • Savoir, seul.e ou en petit groupe, se déplacer furtivement sur un territoire
  • S’entraîner au déplacement de groupe coordonné (bien utile pour les manifs et blocages)
  • Savoir s’habiller et se déplacer pour ne pas être identifiable
  • Réaliser seul ou à plusieurs certaines actions à définir (par exemple coller des affiches, attacher une banderole...)
  • Se créer une planque hors du domicile, ne serait-ce que pour mettre en sécurité ses données informatiques
  • Il y aurait aussi tout ce qui touche à la forme physique, aux arts martiaux...
  • Des séjours en pleine nature, plus ou moins en autonomie
  • etc.

- Pour organiser tout ça, ce serait à discuter au sein de groupes et colllectifs existants pour commencer ?

Bien sûr, il faudrait ensuite périodiquement des mises à niveau, des approfondissements.
Mais si déjà plein de monde possédait des bases alors les capacités d’auto-défense et d’offensive seraient grandement améliorées.

On ne peut pas compter sur la seule volonté d’auto-formation indépendante des plus volontaires, il faudrait carrément proposer des formations généralistes organisées, pédadogiques, adaptées et accessibles au grand nombre.
Ensuite, celleux qui désireront approfondir ou se spécialiser trouveront bien les ressources pour le faire.


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