La propriété privée est un des affreux pilier structurant du système étatico-capitaliste. Mauvaise idée d’avoir voulu échapper à l’ancien arbitraire royal pour se mettre sous la coupe de riches et de possédants, de découper la Terre en parcelles de valeur où le capital s’accumule et se transmet, où la terre, l’eau, l’immobilier deviennent des marchandises.
Néanmoins, en dehors des nombreux peuples autochtones pour qui la plupart du temps la propriété n’est même pas conceptualisable, des courants d’idées et des collecitfs ont cherché et pratiqué depuis longtemps d’autres formes de partage des structures et de ce qui est produit, adossées ou non à des conceptions politico-philosophiques plus larges.
Coopératives, terres communales, biens communs, communisme, anarchisme (la propriété c’est le vol), propriété d’usage... Diverses formules ont été tentées pour bien vivre ensemble tout en évitant de se retrouver sous la coupe d’un clan ou d’un tyran.
Absence presque totale de propriété (à part éventuellement quelques effets personnels), ou biens communs très structurés limités à la terre où aux bâtiments, tout a été expérimenté.
La propriété d’usage est en quelque sorte à mi-chemin. Elle consacre un droit d’usage garanti de biens, terres, bâtiments... à qui en a besoin, mais à qui est ce droit est attribué et à quelles conditions est déterminé collectivement, démocratiquement. Et ce droit est limité, il s’éteint à la mort de la personne/structure, son arrêt de l’activité concernée, son usage contraire aux règles fixées ou à son départ vers d’autres horizons.
La propriété d’usage est différente tout autant de l’individualisme libéral et de sa propriété privée qu’à l’étatisme gestionnaire centralisé et sa propriété collective. Elle suppose idéalement une communauté de vie active, une Commune, un cercle d’interdépendance, une forme de démocratie directe et d’égalité sociale.
L’Etat-capitalisme tolère quelques entorses à sa sainte propriété, mais il n’est pas question pour lui de changer de modèle.
Malgré les mals-logés, les sans-logements, les millions de crève la faim et de mal nourris, la propriété privée (et ce qui va avec à notre époque : argent, concurrence, course à la Valeur...) reste sacrée, incontournable, constitutionnelle. On y voit la sécurité, alors qu’elle bénéfice finalement à peu et qu’elle ne protège en rien de tous les autres fléaux liés à son monde. Pire, l’accumulation de propriétés de quelques uns signe la dépossession et l’insécurité de nombreux autres.
La propriété privée empêche des changements salvateurs, elle bloque, enchaîne, fossilise, tue la créativité, met l’obstacle de l’argent sur le chemin de très nombreuses personnes. C’est un cercle vicieux, on le voit notamment pour les terres et les logements, les jeunes paysans ne peuvent pas acquérir de fermes, la propriété rend les logements hors de prix et contraints de nombreuses personnes à la rue, au mal-logement, à l’exil, et trouver un logement adapté est difficile (d’autres facteurs entrent en compte : concentration à certains endroits, choix politiques...).
En résumé, la propriété privée crée des avantages pour un nombre réduit de personnes, pousse sur une mauvaise pente et attise d’autres problèmes. Tandis que la propriété d’usage (et d’autres formes de « propriété » collective, ou de non propriété) est avantageuse et sécurisante pour tout le monde, favorise le bien vivre pour toustes, donne plus de libertés et de créativité. Et ça fonctionnera d’autant mieux, de manière égalitaire, si elle va avec la démocratie directe, l’absence de capitalisme et de classes sociales.
Exemple de projet en propriété d’usage en Drôme : le lieu associatif autogéré L’HYDRE
Ce lieu asso autogéré qui existe depuis 2019 veut racheter ses locaux, et les transformer en « bien commun » durable via un montage pérennisant une propriété d’usage.
Explications et campagne de collecte de fonds (via dons, prêts et événements) : On rachète L’HYDRE ensemble ! - Grande collecte pour faire du lieu un bien commun immortel
Ce projet de rachat pour aller vers la propriété d’usage a été évoqué lors d’une émission de Ratio St Ferréol le 30 janvier :
Comment détourner la propriété privée pour défendre l’intérêt général
A écouter sur https://www.radiosaintfe.com/emissions/details/view/comment-detourner-la-propriete-privee-pour-defendre-linteret-general
Présentation de l’émission :
Existe-t-il une manière d’être propriétaire qui garantisse au maximum la prise en compte de l’intérêt général, mieux que ne le font les pouvoirs publics d’un côté (propriété collective), et les individus de l’autre (propriété privée) ? Qu’appelle-t-on « propriété d’usage », et comment définir ce qu’est un bien commun ?
Quelques liens sur la propriété d’usage et autres astuces pour sortir de la propriété privée :
- https://www.leravi.org/social/alternatives/le-clip-et-lantidote-permettent-de-sortir-les-lieux-collectifs-du-marche-immobilier-et-de-la-speculation/
- Le CLIP : https://clip.ouvaton.org/quest-ce-que-le-clip/
- La propriété d’usage d’un bien est une forme de propriété légitimée par l’usage de ce bien, plutôt que par la détention d’un titre de propriété marchand. : https://politiquesdescommuns.cc/outils/propriete-d-usage
- La foncière Antidote : https://lafonciereantidote.org/