La neutralité carbone est impossible sous le règne du capitalisme

Espérer rendre l’Economie carboneutre c’est comme espérer que Bernard Arnault devienne altruiste

lundi 16 août 2021, par Les Indiens du Futur.

Comme à présent ils ne peuvent plus nier les dérèglements climatiques ni nier qu’ils sont directement dus à l’Economie, tous les puissants du monde parlent à présent de « transition écologique », d’énergies dites « renouvelables » et sans fossiles partout, et de rendre l’économie « neutre en carbone », même Macron ou Bertrand c’est dire.
Examinons cette nouvelle impasse meurtrière, et ce « nouveau » faux fuyant pour éviter à tout prix de faire ce qu’il y aurait à faire :

LA NEUTRALITÉ CARBONE FACE AU MUR ÉNERGETIQUE DU CAPITALISME

Extrait du livre de Sandrine Aumercier à parâitre le 27 août prochain

« Que les choses soient claires, donc : les annonces de « neutralité carbone » tentent de sauver l’économie de la fin du pétrole pas cher et non le climat ; elles enfoncent le monde dans un extractivisme frénétique qui épuisera les dernières ressources terrestres au nom du salut climatique ; elles effectuent les substitutions énergétiques les plus désespérées dans le seul but que le capitalisme se survive, sans même diminuer la consommation globale d’énergies fossiles ; et elles le font désormais avec la bénédiction du vote vert. Questionnés sur leurs plans pour parvenir à ladite « neutralité carbone », les partis allemands n’ont rien de concret à proposer et l’on sait ce qui est advenu en France des propositions pourtant fort peu radicales de la Convention Citoyenne pour le Climat. Et pour cause : le capitalisme est entré dans un goulot d’étranglement énergétique pressenti dès la première industrialisation – comme nous le verrons par la suite – qui ne connaît aucune solution et qui se traduit par la « combustion » de l’intégralité du monde naturel pour continuer à nourrir la compulsion de valorisation. L’électeur vert a beau jeu d’accuser ses représentants de mener le monde à sa perte, quand lui-même refuse d’examiner le coinçage général auquel il participe en exigeant l’impossible d’un système qui n’a pas d’issue. »

Sandrine Aumercier, Le mur énergétique du capital. Contribution au problème des critères de dépassement du capitalisme du point de vue de la critique des technologies, Albi, Crise & Critique, 2021.

Post de Palim Psao

La neutralité carbone est impossible sous le règne du capitalisme
Les puissants espèrent rendre le capitalisme « vert » car ils ne veulent pas disparaître

- On remet cette citation capitale, à bien méditer attentivement :

L’électeur vert a beau jeu d’accuser ses représentants de mener le monde à sa perte, quand lui-même refuse d’examiner le coinçage général auquel il participe en exigeant l’impossible d’un système qui n’a pas d’issue

La décarbonation est une impasse, pourtant promue partout

NOTE : cet article du Monde laisse une fois de plus croire qu’une décabornation de l’économie productiviste et croissantiste serait possible...
Dans un autre article, l’’Agence européenne de l’environnement (EEA), semble moins sûre de cette cette possibilité : L’agence précise que « les études récentes (…) ne voient aucun indice qu’un découplage total entre croissance et dégradation de l’environnement ait eu lieu à l’échelle mondiale » et ajoute qu’un tel découplage « n’est peut-être pas possible », nul consensus n’existant à ce sujet. « La croissance est ancrée dans la culture, la politique et les institutions, ajoute l’EEA. Le changement exige que nous nous attaquions à ces obstacles de manière démocratique. Les différentes communautés qui vivent dans la simplicité offrent une inspiration pour l’innovation sociale. »

- Les Etats veulent produire des mini réacteurs nucléaires, afin notamment de pouvoir alimenter en énergie des sites miniers isolés. En résumé : multiplier les hautes technologies nucléaires pour faire durer le système industriel et son extractivisme forcené, et donc accentuer les désastres. Mais bien sûr les réacteurs nucléaires seront plébiscités car moins émetteurs de C02.

- Voir aussi :

  • Contre le régime Jancovichy (par Nicolas Casaux)
  • Contre le technomonde végan et décarboné (par Philippe Oberlé)
  • Leur écologie est un désastre, déconnectons là - La chose (Coordination Hétéroclite pour l’Obturation des Systèmes Electriques) est une nouvelle initiative de mobilisation critique de la transition énergétique et plus généralement de l’ordre électrique : « Parmi les innombrables pièges tendus par les gouvernants, la transition énergétique est un mirage qui ne doit pas nous leurrer. Le capitalisme vert a répandu son poison. Il est 200 pour cent électrique, veut tout contrôler, tout monnayer : notre eau, notre atmosphère, notre addiction aux kWhs.
    L’énergie dépensée à gaver ce nouveau monde pour rouler, communiquer, manger écolo et participatif est un constant pillage de toutes les ressources disponibles jusqu’à tarir un océan transformée en réservoir de marchandises. Définitivement il n’y a pas transition mais accumulation de la prédation des matières premières, des famines, des guerres civiles, des colonisation des corps et des cerveaux selon le modèle du puçage total. » (...)
La neutralité carbone est impossible sous le règne du capitalisme
C’est l’impératif de valorisation du Capital qui dirige tout, les riches, les puissants et les capitalistes aussi

Deux autres arguments qui achèvent de casser définitivement le solutionnisme par la technologie, les énergies renouvelables industrielles, la décarbonation de l’économie productiviste capitaliste ou étatiste

  1. Ecologie : l’effet rebond casse les rêves du solutionnisme technologique - Les hautes technologies, c’est plutôt la poursuite du cauchemar écologique, climatique et social
  2. Voici pourquoi le capitalisme, fondamentalement, ne peut pas être réformé ni devenir Vert - Ses propres lois de fonctionnement discréditent définitivement le capitalisme

Conclusion lapidaire

Non seulement les projets de « verdissement » de l’Economie portés par les puissants ne marcheront pas (pour préserver le vivant et le climat, en revanche ils marcheront un temps pour préserver les profits et les intérêts des puissants, grâce notamment aux régimes autoritaires et à la technopolice industrialisée), mais ils pourraient même aggraver encore le rythme et la diversité des désastres climatiques, écologiques et sociaux.
C’est donc bien de l’Economie (au sens du monde de l’économie devenu central et totalitaire, fondé sur le productivisme et l’extractivisme) et des puissants dont il faut nous débarrasser, et le plus vite sera le mieux.

P.-S.

𝗟’𝗛𝗜𝗦𝗧𝗢𝗜𝗥𝗘 𝗗𝗘𝗦 𝗧𝗢𝗞𝗘𝗟𝗔𝗨, 𝗣𝗔𝗥𝗔𝗕𝗢𝗟𝗘 𝗗𝗨 𝗗𝗘𝗦𝗔𝗦𝗧𝗥𝗘

L’histoire du petit archipel des Tokelau, dans le Pacifique, illustre à merveille l’absurdité et la nuisance du prétendu « Progrès », de la civilisation, ainsi que de la mythologie des énergies « vertes » (ou renouvelables, ou propres).
Tout commence (à aller mal) il y a environ 200 ans, avec sa colonisation par les puissances civilisatrices.
Auparavant, les habitants de l’archipel, dont la culture semblait de type polynésienne, y subsistaient très heureusement, en toute autonomie, tirant leur subsistance, entre autres, du poisson, de la noix de coco, de la banane, du taro, de l’arbre à pain et de la papaye. Ce mode de vie semblait leur convenir parfaitement, ainsi que le suggère un rapport d’une expédition états-unienne de 1841 dans l’archipel, reproduit dans un livre intitulé 𝘔𝘪𝘨𝘳𝘢𝘵𝘪𝘰𝘯 𝘢𝘯𝘥 𝘏𝘦𝘢𝘭𝘵𝘩 𝘪𝘯 𝘢 𝘚𝘮𝘢𝘭𝘭 𝘚𝘰𝘤𝘪𝘦𝘵𝘺 : 𝘵𝘩𝘦 𝘊𝘢𝘴𝘦 𝘰𝘧 𝘛𝘰𝘬𝘦𝘭𝘢𝘶 (en français : « Migration et santé dans une petite société : le cas des Tokelau »), paru en 1992, qui nous apprend que :
« les habitants qui y vivaient étaient beaux et en bonne santé. Ils semblaient prospérer grâce à un “maigre régime” de poissons et de noix de coco, puisqu’aucune trace d’agriculture n’y était visible. Les gens des deux sexes étaient tatoués avec des formes géométriques représentant des tortues et des poissons. Les nombreux rapports et journaux de l’expédition donnent l’impression d’un peuple admirable, aimable (quoique prudent), paisible, ordonné et ingénieux. »
Seulement, ce livre nous apprend également qu’après
« l’adoption par les habitants des Tokelau d’un régime alimentaire plus occidental, la qualité de leur dentition déclina de manière dramatique. La nourriture riche en fibre, les noix de coco et le fruit à pain furent graduellement remplacés par le sucre raffiné et la farine blanche. En résultat, dans la catégorie des 15–19 ans, l’incidence des caries dentaires fut multiplié par 8 (de 0–1 dent à 8 dents), tandis qu’elle quadruplait dans la catégorie des 35–44 ans (de 4 dents à 17 dents), et ce, en à peine 35 ans. »
Le passage au régime alimentaire occidental engendra également un net phénomène de prise de poids chez les habitants de l’archipel.
En outre, avec l’adoption du mode de vie civilisé, « l’alcoolisme est devenu commun sur l’archipel, ainsi que l’obésité ».
Mais tout n’est pas noir ! Un documentaire a en effet récemment été produit par Arte qui célèbre les îles des Tokelau au motif qu’elles seraient « devenues le premier territoire autonome grâce uniquement à l’énergie solaire ». Autonome grâce à des panneaux solaires photovoltaïques, des batteries, des onduleurs, des câbles, etc., dont les matériaux ne sont ni extraits, ni traités, ni assemblés sur place ! Autonome grâce à la nécessité de faire en sorte que la centrale photovoltaïque installée sur l’archipel demeure connectée au réseau internet 24h/24 ! Les habitants de l’archipel seraient donc « autonomes » depuis qu’ils dépendent intégralement de la civilisation et de son système de production industrialo-économique planétaire, de son marché mondialisé, de ses réseaux numériques, etc. !
Mais rien d’étonnant ici. La propagande totalitaire et ses fameuses inversions de réalité, que dénonçait Orwell, prétend depuis longtemps que « la liberté c’est l’esclavage », autrement dit que « l’autonomie, c’est la dépendance ».
Ce n’est pas tout. L’imbécilité du désastre en cours est plus profonde encore. Les populations de poissons des eaux baignant l’archipel sont en déclin — « nous ne prenons plus autant de poissons qu’avant », explique un habitant. Avec l’expansion de la civilisation industrielle et donc de la pêche industrielle (légale et illégale), les habitants des Tokelau voient disparaître les poissons, ces créatures qui leur ont permis de vivre en parfaite autonomie sur l’archipel pendant des siècles.
Pourrait-on faire plus stupide ? Oui. Tout à fait. Car la civilisation industrielle et son économie mondialisée vont, très probablement au cours de ce siècle, entraîner une élévation du niveau des océans qui submergera totalement l’archipel des Tokelau (ils ont déjà construits plusieurs digues pour se protéger des inondations et des raz-de-marée, de plus en plus fréquents).

Résumons : une population qui vivait autrefois principalement de la pêche et de la cueillette, qui était en très bonne santé, qui dépendait uniquement de ce que lui prodiguaient les communautés naturelles (ou écosystèmes) au sein desquelles elle évoluait, qui se passait très bien du plastique, des télévisions, des smartphones, d’internet, des feuilles d’aluminium, des congélateurs, du coca-cola, des bières et des voiturettes de golf, a vu sa santé et son bien-être décliner au fur et à mesure qu’elle était rendue dépendante de toutes ces choses. Et cette catastrophe est présentée, dans les médias dominants, comme un « progrès ». Et cette ultra-dépendance est appelée « autonomie » par les progressistes du monde entier. Et la civilisation techno-industrielle mondialisée dont ils sont désormais dépendants extermine les poissons qui leur permettaient autrefois de vivre en parfaite et véritable autonomie. Et cette même civilisation va également engloutir leur archipel sous les eaux, et continuer de ravager le monde naturel jusqu’à étouffer la planète sous ses déchets et s’autodétruire dans le processus.

(post de N Casaux)
Source : Le désastre de la civilisation et de la technologie (verte ou non) : l’exemple des Tokelau (par Nicolas Casaux)


Perspectives et pistes de résistance active

La situation écologique, climatique, sociale est terrible.
Mais tant qu’il y a des résistances, rien n’est complètement perdu.
Et puis la civilisation industrielle, ce système techno-capitaliste et étatique, n’est peut-être pas si solide que ça, elle sans doute plus attaquable qu’on ne pense.

Il existe quantité de moyens de se battre, de lutter pour abattre/détruire/démolir/désarmer/stopper/effondrer les structures matérielles et idéologiques de la civilisation industrielle. Et quantité de moyens pour construire à la place des mondes vivables et soutenables.
Soutien financier, action directe, information, soutien aux personnes engagées, actions publiques ou clandestines, communication, refuges...
Il y en a pour tous les goûts, toutes les disponibilités et "niveaux" d’engagement.

Il y a des places pour chacun.e dans cette vaste culture de résistance à construire.

- Liens utiles pour aller plus loin :


Forum de l’article

  • La neutralité carbone est impossible sous le règne du capitalisme Le 17 août 2021 à 09:58, par Sandrine

    L’exemple de l’archipel de Tokelau est tout à fait exemplaire : les économies insulaires sont par nécessité quasi auto-suffisantes jusqu’à la colonisation. Cela vaut pour les Antilles françaises comme pour la Nouvelle Calédonie. Aux Antilles, la destruction de l’auto-suffisance commence par l’économie colonialiste sucrière, dont les chefs de file, esclavagistes, firent pression sur Napoléon, pour que soit rétabli l’esclavage, faute de quoi ils passeraient à l’Anglais. Ces grandes familles naguère esclavagistes sont aujourd’hui toujours bien présentes : elles contrôlent notamment nombre de cultures de rentes à la chlordécone (qui génèrent des profits à l’exportation, qu’on oppose aux cultures vivrières qui n’en génèrent pas mais permettent…de vivre, même en dehors d’une économie monétaire). Elles sont également présentes dans la grande distribution, raison pour laquelle la vie est si chère dans les îles, et restent profondément imprégnée de racisme social et de racisme tout court.

    Ce phénomène de remplacement des cultures vivrières par des cultures de rente se rencontre depuis l’antiquité avec la fin de la République et le passage à l’empire sous Auguste, ce dictateur bizarrement honoré à Aouste, ou bien encore en Amérique latine sous le joug ibérique, en Afrique avec les cultures bananières notamment (d’où les fameuses république du même nom), avec de puissants importateurs marseillais toujours bien vivants, qui discutent d’égal à égal avec les chefs d’Etat africains. D’où l’intérêt pour ses croque-morts des économies et indépendances insulaires de se constituer en lobby – ou association – et d’y placer à leur tête quelque personnage croyant dur comme fer, pour des raisons obscures et personnelles, contre l’évidence du cas de Tokelau et bien d’autres, aux bienfaits de la colonisation, dont le seul inconvénient, mineur quand on songe aux bénéfices narcissiques d’un tel leadership, est la destruction des économies insulaires et plus loin de la planète et de l’humain.

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    • La neutralité carbone est impossible sous le règne du capitalisme Le 23 août 2021 à 23:33, par poulet roger

      L’exemple des Antilles est parlant. J’ai vu un documentaire sur ces familles issues du colonialisme. Tous bien blancs.. et richissimes.
      Certains sont responsables de l’empoisonnement au Chlordécone.
      Rien n’a vraiment changé, les mêmes ont toujours le pouvoir.

      J’ai organisé, il y a quelques années avec Patrick Hartwick, musicien de « Malavoy »,(l’autre groupe martiniquais avec « Kassav »), un stage de musique avec des jeunes Martiniquais.
      Ce qui était frappant, c’était la variété des couleurs de peau.
      On allait de blanc-blanc à noir-noir en passant par toutes les nuances de couleur.
      C’est la réalité de la Martinique, mais le pouvoir économique, lui, est toujours entre les mains des descendants des premiers colonisateurs.

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  • La neutralité carbone est impossible sous le règne du capitalisme Le 17 août 2021 à 09:26, par Andréa

    Pour info : "Un tout nouveau fonds pour l’innovation dans les énergies propres de 111 millions de dollars a été lancé dans le but d’aider les start-up. L’initiative vient du travail de « Breakthrough Energy Venture », un fonds d’un milliard de dollars lancé par Bill Gates fin 2016, réunissant plusieurs investisseurs privés et entreprises, dont SAP, GE, Jeff Bezos, Vinod Khosla et Jack Ma" (Forbes). Un des projets de ce fonds est l’exploitation sur les fonds arctiques des nodules polymétalliques, ceci afin de fournir les matériaux nécessaires à la production des véhicules électriques. Du coup, il s’agit d’un « fonds vert », même si, « Heil ! », il est plutôt vert de gris. On sait par contre que le paquebot du philanthrope Gates, pour lequel il a dépensé 63 millions de dollars de parcmètre sur les quais d’Antibes, ne fonctionne pas à l’hydrogène.

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