La lutte et l’orga

Lutter pour, lutter contre, mais surtout lutter comment ?

jeudi 18 février 2021, par Heska.

C’est évident, la manière dont tourne notre monde ne convient qu’à une petite poignée d’individus. Et tous les autres sont mécontents, insatisfaits, outrés, révoltés...

Notre environnement se dégrade, les espèces disparaissent, le béton coule à flot, les terres agricoles sont artificialisées et on bouffe de la merde génétiquement modifiée enrobée de pesticides, les plastiques nous étouffent, nous et les créatures marines, nous sommes à la merci de l’industrie nucléaire, la pression sur les travailleurs s’intensifie quand ils ont encore la chance de travailler, les lois scélérates et liberticides se multiplient, l’étranger, l’exilé, même mineur, est maltraité, le contrôle social s’accentue, les caméras de surveillance traquent nos gestes et comportement « a-normaux », comme rester trop longtemps sur un banc, l’Intelligence Artificielle fait peser sur nous sa logique algorithmique, les compteurs intelligents nous sont imposés, l’école est une fabrique d’androïdes qui se dématérialise pour engraisser des structures à but lucratif, la domination patriarcale poursuit ses ravages, les forces de l’ordre et la justice se déchaînent contre les opposants... Je pourrais continuer comme ça sur des pages et des pages, et chacun d’entre vous y reconnaitrait une illustration de son combat, du thème pour lequel il s’engage et dit « Non » !

Sachons que chacune de ces luttes ne pourra être gagnée sans que toutes les autres le soient car elles sont le produit d’une seule hydre : le complexe Etat-Marchandise.
Chacun-e d’entre vous aborde ces luttes sous l’angle qu’il lui convient : par l’information, l’action en justice, le soutien aux inculpés, la manifestation-promenade, le maraîchage biologique et les circuits courts, la fête-informative, le happening, le sit-in, la monnaie locale, l’action clandestine... ou même pour certains, que je trouve bien crédules, mais ce n’est que mon avis, en choisissant la voie électorale.

La lutte implique que des individus s’organisent, en dehors des structures gracieusement fournies par l’Etat ou au-delà de l’anomie et de l’éclatement de la société qu’il entretient avec soin. Car n’oublions pas que par nature, par essence, matériellement et historiquement, l’Etat est en guerre contre la société. La récente loi renforçant les principes républicains qui met les associations et leur président à la merci de décisions administratives le démontre fort bien. Donc, que ce soit à travers des groupements informels et souterrains, des syndicats, des associations ou des partis, des individus s’organisent pour tenter de contre-balancer le rapport de force que nous impose la classe dominante et prédatrice. Cela implique de se rencontrer, de prendre des décisions, de monter des actions, de trouver des moyens financiers, de tenir des réunions, de faire circuler de l’information...

Mais mon expérience personnelle, qui commence à être longue, me conduit à penser que les militants qui veulent un autre monde n’interrogent pas assez souvent leurs propres méthodes de prise de décisions. Trop souvent, il n’y a même pas de méthode et on reproduit alors allégrement les schémas de domination-personnification-intimidation dont nous nous a farci le crâne depuis notre plus tendre enfance. Et quand processus d’animation-décision il y a, ils semblent n’être que de posture. L’assemblée agite les mains, fait des signes de bras, mais ce sont toujours les mêmes qui causent, qui sont au première loges, vers qui se tournent les militants imprégnés malgré eux de la culture du leader, vers qui se tendent les micros et se braquent les caméras et qui, in fine, décident seuls. Par exemple des militants sincères se retrouvent à faire la docile piétaille d’une action médiatique d’Attac ou XR (noms choisis presque au hasard !).

J’attire votre attention que cela perpétue des rapports de domination, met au centre du jeu des intérêts personnels, ouvre la porte aux récupérations et en bout de course fragilise le mouvement social ; Cela fait le jeu de l’Etat. Rappelez-vous comment le gouvernement se désespérait de ne pas avoir d’interlocuteurs au sein du mouvement des Gilets Jaunes et rappelez-vous combien ceux-ci ont fait vaciller le pouvoir. Pensez ensuite qu’il existe des interlocuteurs clairement identifiés au sein des syndicats réformistes ou des partenaires sociaux et constatez combien ces organisations sont peu dangereuses pour le pouvoir.

Dire que le monde de demain se construit aujourd’hui est une évidence mais le monde de demain ne peut pas se construire sur les pratiques autoritaires, dirigistes, pyramidales d’aujourd’hui, de hier ou du néolithique. Dans le cas contraire nous ne pourrons que ripoliner le monde d’aujourd’hui sans rien changer à ses structures profondes. Le refus de gouverner et d’être gouverné est la base, le reste suivra.


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