L’industrie du tourisme accumule les méfaits

Livre : « Dévorer le monde » de Aude Vidal

samedi 2 novembre 2024, par Lili souris de bibliothèque.

Comme toutes les industries de la civilisation industrielle, le tourisme ravage les mondes vivants.
Le tourisme est lié au modèle social capitaliste dominateur et à sa société du travail.
Un livre salutaire pour se libérer du tourisme et du mode de vie qui va avec.

L’industrie du tourisme accumule les méfaits

Comment le tourisme « dévore le monde »

- Comment le tourisme « dévore le monde »
Exploitation des peuples, pollution mondiale, exutoire des aliénés du travail... L’industrie du tourisme accumule les méfaits, écrit l’anthropologue Aude Vidal, qui appelle à son abolition.
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Qu’ont en commun l’ascension de l’Everest avec un sherpa, un séjour dans un hôtel de luxe en bord de mer nettoyé par des femmes de ménage philippines ou un safari dans une réserve africaine dont on a préalablement expulsé les éleveurs qui la peuplaient ? Toutes ces activités touristiques reposent sur la domination de peuples indigènes et d’environnements exotiques au profit d’une petite élite occidentale.
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Mais les effets néfastes de l’avion — de même que ceux des voitures individuelles et des croisières, autres moyens de transport privilégiés des touristes — ne s’arrêtent pas à la seule question du carbone. Au sol, le tourisme exige son lot d’infrastructures : gares, aéroports, marinas, hôtels, parcs d’attraction, etc. Autant de mégaprojets grignotant, partout sur la planète, terres agricoles et réserves naturelles.
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Au-dehors des peuples premiers, le tourisme frappe, de manière générale, toutes les classes populaires. Le phénomène d’accaparement immobilier par les locations touristiques à courte durée, notamment via la plateforme Airbnb, est désormais bien connu des villes et littoraux européens, d’où les habitants les moins fortunés sont contraints de s’éloigner.
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Les destinations les plus inaccessibles — l’Antarctique et, depuis peu, l’espace — sont pour l’heure réservées aux clients les plus fortunés, qui, par le voyage, se démarquent de la masse et se reconnaissent entre eux.

L’industrie du tourisme accumule les méfaits

Au-delà de ces voyages exceptionnels, bien d’autres destinations, apanages des classes moyennes américaines et européennes, façonnent une conscience de classe occidentale. Les photos de vacances dans des lieux insolites, hors des sentiers battus, dorénavant si présentes sur les réseaux sociaux comme Instagram, montrent ainsi que « le succès d’une destination tient autant à l’envie de se distinguer qu’à celle de faire la même chose que les autres ».
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En définitive, pourquoi le tourisme compte-t-il autant pour les classes privilégiées ? En plus de leur conscience de classe à laquelle il contribue, le tourisme représente une « industrie de la compensation » de classes moyennes dévorées par le travail. Aude Vidal fournit quantité de portraits de femmes et d’hommes épuisés par leur train-train quotidien, qui ne trouvent d’exutoire à leur mal-être que dans l’enchaînement de vacances à travers la planète. À ces dominants dominés par la classe supérieure, le tourisme, de quelque nature qu’il soit, offre une parenthèse enchantée dans l’âpre compétition individuelle… et par conséquent un moyen de prévenir leurs frustrations.

Aussi, l’autrice achève son essai par la question du travail. Car on ne peut dissocier tourisme et travail, le premier tirant sa justification de l’intensification du second : « Abolir le tourisme, c’est remettre en question l’organisation économique et sociale qui a besoin du tourisme pour se perpétuer. » En conséquence, pour réduire drastiquement les méfaits du tourisme, il faut s’attaquer à la centralité du travail dans nos modes de vie occidentaux et imaginer d’autres manières de vivre, propices à l’épanouissement au jour le jour.

JPEGDévorer le monde — Voyage, capitalisme et domination, d’Aude Vidal, aux éditions Payot, septembre 2024, 192 p., 18 euros.

et aussi :

  • Désastres touristiques (L’échappée, 2022) d’Henri Mora
  • Renoncer aux voyages (PUF, 2024) de Juliette Morice.

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