L’immigration : parlons-en !

Message des Gilets Jaunes de l’Île Saint Denis (93)

mardi 12 mars 2019, par Auteurs divers.

https://www.youtube.com/watch?v=HvtDu7cz1Jk

Nous sommes ici à l’Ile Saint-Denis avec des gilets jaunes de plusieurs communes du 93, le fameux 9-3, bien placé pour parler d’immigration.
Emmanuel Macron a annoncé vouloir ouvrir un débat national sur l’immigration et sur l’introduction de « quotas » pour l’entrée des étrangers.
Il s’agit, en plus d’une tentative d’escamoter le débat sur l’injustice sociale et de diviser, de faire croire aux Français que la France est généreuse, voire trop généreuse, avec les pays du Sud ou du tiers monde, et qu’« on ne peut pas accueillir toute la misère du monde »... comme on l’entend répéter trop souvent.
C’est faux. C’est tout l’inverse. Et si Monsieur Macron veut qu’on parle de l’immigration, il faut que tout le monde sache ceci :
La France ne possède ni mines d’or, ni uranium, ni pétrole, ni café ou cacao, ni coltan, ce minerai indispensable à la fabrication de nombreux équipements électroniques, nos smartphones par exemple. Et ce n’est pas le camembert français, si bon soit—il, qui peut lui servir de monnaie d’échange pour tout ce qu’elle ne possède pas.

Alors la France a recours au pillage et à l’échange inégal. Après l’esclavage et la colonisation, la France continue à voler les ressources de nombreux continents, dont l’Afrique, en leur imposant des traités aberrants, des cultures intensives pour l’exportation, source de famine pour des millions de paysans et leurs familles...et des guerres.

Prenons le cas du Niger, une néocolonie française

Censé être le 2e pays le plus pauvre de la planète, c’est pourtant le 2e producteur d’uranium au monde.
Pour nous fournir de l’électricité par le biais des centrales nucléaires, Areva importe près de 40 % de sa production d’uranium du Niger. Mais depuis plus de 50 ans, Areva ne reverse qu’une redevance ridicule, de 5,5 %, sur les milliers de tonnes d’uranium naturel extraites du Niger.
Ainsi, la population nigérienne ne bénéficie d’aucune retombée économique. Elle n’a droit qu’aux conséquences de l’exploitation de son uranium, c’est à dire les contaminations radioactives, notamment de l’eau, les énormes masses de déchets radioactifs stockés à l’air libre, sans compter la désertification, qui ruine l’économie pastorale.
AREVA a déjà épuisé à 70% l’aquifère carbonifère des régions qu’elle exploite dans ce pays, à raison de 22 000 mètres cubes d’eau par jour depuis plus de 40 ans.
La ruine du Niger ne concerne pas que l’uranium. Avec ses 20 millions de têtes de bétail, le pays pourrait connaître une relative prospérité. Mais voilà : le Fonds Monétaire International, le FMI, a imposé la fermeture des services vétérinaires locaux, afin d’ouvrir le marché aux multinationales étrangères.
Les éleveurs nigériens doivent désormais acheter les anti-parasitoses, vaccins et autres vitamines pour leurs bêtes, aux prix dictés par les multinationales occidentales. Et comme ils n’en n’ont pas les moyens, les animaux tombent malades et périssent ; et leurs propriétaires n’ont plus qu’à migrer vers les bidonvilles de Niamey, Abidjan... ou ailleurs.

Le FMI, un organisme dont la direction est toujours assurée par l’ex-ministre de Sarkozy Christine Lagarde, restée en poste malgré ses ennuis avec la justice française, a également imposé au Niger la destruction de ses propres stocks de céréales, au nom du sacro-saint principe du libre échange. Conséquence : plus de stocks pour faire face aux aléas, et la famine attaque désormais ce pays africain tous les deux ans.
Qu’on ne s’étonne pas ensuite si les Touaregs se révoltent contre cette situation ou si des Nigériens essaient d’émigrer !

Prenons un autre exemple : celui du Sénégal

Au Sénégal, les sociétés françaises, comme la Fruitière de Marseille, dont les principaux actionnaires sont les grandes chaînes de supermarché françaises, se font attribuer des dizaines de milliers d’hectares de terres pour des durées illimitées, avec une exemption d’impôts de 99 ans !!
Elles produisent des fruits et des légumes, dont 98 % sont exportés vers l’Europe.

Traditionnellement, la terre rurale n’appartient à personne dans la plupart des pays africains. Il n’y a pas de cadastre rural. Les communautés paysannes possèdent un droit d’usufruit illimité des terres qu’elles occupent. Mais par d’obscures négociations qui se déroulent à Dakar entre l’Etat et les multinationales françaises et étrangères, les paysans se retrouvent dépossédés de leurs terres, avec la complicité de fonctionnaires sénégalais grassement récompensés.

Une des techniques utilisées par les oligopoles (« oli » vient du grec et veut dire « tout petit nombre ») pour ruiner un grand nombre de pays à leur profit, c’est aussi le dumping, une baisse artificielle et temporaire des prix, qui permet d’éliminer les concurrents locaux, et ensuite de fixer les prix alimentaires à la hausse. Tout ceci avec l’aide de fortes subventions de la part de l’Union Européenne à nos industriels de l’agro-alimentaire.

Au Cameroun, par exemple, ils ont ruiné la production de poulets autochtones avec des importations massives de poulets étrangers bon marché. Et dès que les éleveurs de poules et producteurs d’oeufs ont été ruinés, ils ont augmenté leurs prix.

Il faut parler aussi des fameux « biocarburants », présentés comme écologiques ?

Les biocarburants ont ruiné l’agriculture de très nombreux pays du Sud. Ils nous sont vendus comme une source d’énergie alternative propre. Mais sait-on que pour produire ces agrocarburants, on brûle des millions d’hectares de cultures agricoles, une véritable tragédie pour les petits paysans et les éleveurs, notamment en Afrique.
Et la production des agrocarburants nécessite beaucoup d’eau, Il en faut 4.000 litres pour obtenir ne serait-ce qu’un litre de bioéthanol !
Le réservoir d’une voiture de taille moyenne fonctionnant au bioéthanol contient 50 litres. Pour fabriquer 50 litres de bioethanol, il faut détruire 358 kg de mais. Avec 358 kg de maïs un enfant zambien ou mexicain vit une année.

Même chose avec l’huile de palme utilisée pour la fabrication d’agrodiesel.

Au Cameroun, c’est le groupe français Bolloré qui a fait main basse sur une grande partie des palmeraies. Il a signé un bail de 60 ans, en 2000 sur 58.000 hectares de terres pour produire de l’huile de palme, et détruit pour cela des forêts primaires qui sont un des principaux « puits de carbone » de la planète après l’Amazonie.

Jean Ziegler écrit : « Sur une planète où toutes les 5 secondes un enfant de moins de 10 ans meurt de faim, détourner des terres vivrières et brûler de la nourriture, en guise de carburant, constituent un crime contre l’humanité ».

Quand les grands groupes français implantés en Afrique, comme Bolloré ou Vilgrain, se vantent des « bienfaits » qu’ils apportent sur place, en construisant infrastructures, ils ne disent pas comment ils expulsent des familles entières de leurs terres ancestrales, comment ils détruisent leurs potagers et leurs vergers, leur savoir-faire, transmis de génération en génération, en matière de connaissance des sols et de sélection des graines.

Le groupe Vilgrain qui possède la société sucrière du Cameroun, détient plus de 22.000 hectares de terres dans ce pays, après avoir signé un bail de 99 ans avec le gouvernement de Yaoundé, pour les exploiter. En échange, Vilgrain a versé aux communautés affectées une indemnité annuelle de 2 millions CFA, soit l’équivalent, tenez-vous bien, de 5 euros par famille et par an !

Non seulement les puissants accaparent la terre de millions de paysans et les condamnent ainsi à la famine ou à l’exode, mais en plus ils provoquant des famines en spéculant sur les matières premières de ces pays comme le riz, le maïs, ou l’huile.

Ces groupes fixent les prix des aliments, par le biais de leurs traders dans les bourses des matières premières agricoles. Ils décident ainsi chaque jour qui va mourir et qui va vivre, en invoquant les « lois naturelles du marché » comme si c’étaient des « lois de la nature ».

La planète croule sous les richesses. La production alimentaire n’est pas déficiente, mais des millions d’êtres humains sont acculés à la mort ou à l’émigration par la loi du profit maximum pour quelques-uns.

Ghandi disait déjà :
Le monde a assez pour satisfaire les besoins de tous, mais pas assez pour satisfaire la cupidité de tous

L’ONU estimait, en 2010, à 25 millions le nombre de réfugiés liés à cette situation, qui n’a fait qu’empirer depuis.
Monsieur Macron pourrait-il introduire dans le débat public la possibilité d’interdire la spéculation sur les denrées alimentaires ? Ou bien est-ce, comme l’impôt sur la fortune : pas touche !

Pendant ce temps on nous parle de la dette des pays du tiers monde. Parlons-en !

Il parait que l’Afrique a une dette envers la France depuis son indépendance. Ceci en raison de tous les « bienfaits » accordés par la France pendant la colonisation.

14 pays africains sont obligés de déposer plus de 60 % de leurs réserves sur un compte d’opération à la Banque de France, à Paris. Dix milliards d’euros bloqués qui ne peuvent pas servir au développement de ces pays.

Et l’Afrique est en plus maintenue dans l’esclavage monétaire, avec le franc CFA qui lui est imposé, et qui vaut 650 fois moins qu’un euro. Un beau tour de passe-passe, non ?
Le franc CFA est la seule monnaie héritée d’un système colonial encore en vigueur dans le monde – les billets sont d’ailleurs imprimés dans deux usines françaises.

Ces pays africains obligés ensuite de s’endetter, doivent payer des intérêts sur leurs dettes. Et comme personne ne veut accepter la monnaie locale ridicule que la France leur a imposée, ils sont obligés de se procurer des devises. Et, leur seule manière d’y parvenir est d’exporter leurs matières premières, de produire pour l’exportation, du coton, de l’arachide, du café, ou de l’huile de palme, au détriment des cultures vivrières et des produits manufacturés qu’ils doivent acheter très chers, et prioritairement à la France.
Et pour obtenir l’étalement de la dette, ils doivent aussi d’accepter les conditions draconiennes imposées par le FMI, c’est à dire : la suppression des programmes sociaux, la suppression de l’aide de ces Etats à leurs producteurs, et le droit pour les multinationales de faire main basse sur les richesses de ces pays, sous prétexte de « libre concurrence ».
Et quand ils ne se laissent pas faire, quand les coups d’Etats que nos gouvernements fomentent ne suffisent pas, ils détruisent leur économie et introduisons le chaos, en leur faisant la guerre, sous prétexte d’« ingérence humanitaire », ou d’« armes de destructions massives » totalement inventées par nos dirigeants.

C’est le cas de l’Irak, du bombardement de sa population civile et de l’embargo économique qui a entraîné la mort de 550.000 enfants irakiens de 1996 à 2000, à cause de l’interdiction d’importation de nourriture, de médicaments et d’autres biens vitaux, sous prétexte de punir Saddam Hussein.

On pourrait citer bien d’autres exemples en Afghanistan, en Libye ou en Afrique, qui ont poussé à l’émigration, cette émigration sur laquelle on propose maintenant d’instaurer des « quotas ».

Il y a un proverbe qui dit : « les murs les plus puissants s’écroulent par leurs fissures ». Alors, comme le propose Jean Ziegler, provoquons-en des fissures, pour interdire la spéculation boursière sur les aliments de base, et la fabrication de biocarburants à partir de plantes nourricières, pour protéger les paysans qui représentent la moitié de la population mondiale contre le vol des terres, et pour préserver l’agriculture vivrière.

La volonté des Etats n’existe pas. Monsieur Macron n’ouvrira pas le débat sur ce sujet.
C’est à nous de l’imposer, par la mobilisation générale, au nom de la justice et de la dignité humaine, et de refuser que les migrants, dont les pays nous nourrissent, servent de boucs émissaires.

Source - publié sur FB le 1er février 2019


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