L’Etat policier étend ses tentacules : Dormez bien, la police veille, avec le nouveau schéma du maintien de l’ordre

Le système en place ne peut pas faire autrement que réprimer toujours plus pour se maintenir

dimanche 20 septembre 2020, par Camille Pierrette.

Le système en place est obligé de recourir à toujours plus de terreur d’Etat pour se maintenir. Plus que jamais, les élections, outil calibré pour le statu quo et la continuation des institutions antidémocratiques et du capitalisme, ne pourront pas suffire pour renverser la vapeur et reprendre la main.

🔴 "SCHÉMA DU MAINTIEN DE L’ORDRE" : TOUJOURS PLUS VITE VERS L’ÉTAT POLICIER

- Décryptage d’un rapport alarmant-
Le gouvernement vient de dévoiler un nouveau « schéma national du maintien de l’ordre ». Ce document devait être « l’aboutissement d’une réflexion lancée à la suite de centaines de plaintes pour violences policières ». En réalité, le rapport confirme et accélère la fuite en avant totalitaire de l’Etat français. Le texte commence ainsi : « l’infiltration systématique de casseurs au sein des cortèges a conduit les forces à adapter leur doctrine de gestion des manifestations ». Habile retournement : le gouvernement devait modifier le maintien de l’ordre suite aux mutilations de Gilets Jaunes. Il annonce exactement l’inverse. Répression judiciaire extrême, surveillance totale, nouvelles armes, arrestations de journalistes et même unités anti-terroristes contre les manifs : on vous résume.

➡️ARRESTATIONS DE MASSE ETPRESSION JUDICIAIRE

Le document promet d’abord une « plus grande mobilité des forces, pour mettre fin aux exactions et interpeller les auteurs de violences ». Donc plus de charges, plus d’attaques de cortèges, plus de manifestants trainés au sol, plus d’arrestations. Le rapport met en avant la « réactivité en recourant notamment à des unités spécialement constituées disposant de capacités de mobilité élevées ». Donc les policiers les plus violents : BAC, BRAV, et unités de type RAID déjà déployées sur certaines manifestations pour aller au contact.
« Une attention particulière doit être portée à la dimension judiciaire des opérations », avec des équipes de magistrats directement intégrées au maintien de l’ordre dès les manifs. La fin officielle de la prétendue séparation des pouvoirs. Un accent est mis sur « la préservation des traces ou indices » notamment par « la police technique et scientifique » et « le déploiement de moyens vidéo systématique ». Les opposants traités avec les moyens du crime organisé, la haute technologie et une efficacité absolue. Bien loin, par exemple, de la réactivité pour agressions sexuelles ...
Toujours dans le domaine judiciaire, le document préconise la généralisation des « procédures rapides » de type comparutions immédiates, et des interdictions de manifester. Une justice toujours plus expéditive et au service de la police.

➡️ARSENAL MODIFIÉ ET RENFORCÉ

Le schéma confirme d’abord « l’intérêt de l’emploi des moyens et armes de force intermédiaire au maintien de l’ordre ». C’est à dire l’arsenal mutilant tiré sur la population. Le rapport reconnaît tout de même le danger extrême des grenades GLI F4 et GMD, contenant de l’explosif militaire. C’est pourquoi « des moyens innovants sont continuellement étudiés et mis en œuvre ». Autrement dit, plutôt que d’abandonner ces grenades, elles sont remplacées par d’autres munitions explosives du même type. En ce qui concerne les tirs de balles en caoutchouc, le rapport annonce que les tireurs de LBD auront « des superviseur sauf en cas de légitime défense ». Problème : officiellement, le LBD doit être utilisé seulement et uniquement en cas de légitime défense. Cette annonce révèle donc que les policiers tirent régulièrement sans être menacés.
L’arsenal lourd va être considérablement durci, puisque « l’engagement de moyens aériens (hélicoptères, drones) devra être développé » et « les moyens spéciaux de type engins lanceurs d’eau ou véhicules blindés méritent d’être renforcés » puisqu’ils ont « prouvé leur intérêt ». Attendons nous à de nouvelles dépenses pharaoniques pour la répression.

➡️ DE NOUVELLES VICTIMES DÉJÀ ANNONCÉES

Un passage troublant annonce la mise en place « d’un référent chargé de l’appui aux victimes, qui n’ont pas pris part aux affrontements avec les forces de l’ordre et cherchent à obtenir réparation pour les dommages subis ». Derrière cette fausse concession, un aveux gravissime : le gouvernement reconnaît qu’il va faire d’autres blessés, et même des blessés qui ne participent pas aux manifestations. Il n’a aucune intention d’empêcher ces drames : il créée des référents, probablement pour dédommager ces victimes avant qu’elles ne sollicitent les juridictions compétentes.

➡️LA FIN OFFICIELLE DE LA LIBERTÉ DE LA PRESSE

Plusieurs passages sont consacrés aux journalistes. Le rapport préconise « une meilleure connaissance mutuelle » entre police et médias. Pourtant, les journalistes officiels font déjà tous leurs reportages du côté des forces de l’ordre. « Un officier référent peut être utilement désigné au sein des forces et un canal d’échange mis en place avec les journalistes, titulaires d’une carte de presse, accrédités auprès des autorités ». Des « exercices conjoints permettant aux forces d’intégrer la présence de journalistes dans la manœuvre » sont aussi prévus. Un pas de plus assumé vers la fusion entre médias dominants et police.
Plus grave : « Il importe de rappeler que le délit constitué par le fait de se maintenir dans un attroupement après sommation ne comporte aucune exception, y compris au profit des journalistes ou de membres d’associations ». Autrement dit : n’importe quel journaliste couvrant une manifestation pourra être arrêté au bon vouloir des forces de répression. Une mesure dictatoriale. Même dans certains régimes autoritaires la presse peut couvrir les rassemblements.

➡️GÉNÉRALISATION DE LA POLICE POLITIQUE

Le rapport met l’accent sur la police politique : « les services de renseignement jouent un rôle primordial dans le dispositif de gestion de l’ordre public », ils permettent « ’amélioration de l’anticipation et du suivi des mouvements de contestation ».
« Ces services sont chargés d’assurer un suivi dans la durée des mouvements contestataires les plus radicaux, à l’origine d’actions violentes voire d’envisager la dissolution de certains groupes constitués ». Les barbouzes qui infiltrent et espionnent les militants, souvent en toute illégalité et avec des méthodes abjectes, pourront donc faire dissoudre des collectifs. De pire en pire.

➡️MOYENS ANTITERRORISTES

Le meilleur pour la fin : le rapport veut envoyer au contact des manifestants des unités qui peuvent « combiner résistance au choc et manœuvres en mobilité ». Il propose l’engagement « des Sections de protection et d’intervention 4e génération (SPI4G - CRS) et les pelotons d’intervention (EGM) » pour « procéder à des interpellations […] Des travaux seront conduits pour améliorer encore leurs capacités de mobilité. » Petit problème : la SPI4G est une section spéciale, militarisée, intégrée aux CRS et créée après les attentats officiellement pour « intervenir sur des risques de tuerie de masse ». Le gouvernement assume donc d’envoyer la police antiterroriste pour mater les opposants.
Le rapport ajoute : « elles peuvent bénéficier de l’appui de moyens vidéo SARISE », c’est à dire « système autonome de retransmission d’images pour la sécurisation d’événements », des moyens de surveillance de pointe, eux aussi conçus pour contrer la menace terroristes.

Dormez bien, la police veille.

(post de Nantes Révoltée)

L’Etat policier étend ses tentacules : Dormez bien, la police veille

- voir aussi :

Cette bourgeoisie, toujours, partout, est #versaillaise

« Jamais, nulle part, la bourgeoisie n’a rendu les clés de son propre et gracieux mouvement. Pourquoi le ferait-elle d’ailleurs ? Pourquoi laisserait-elle faire la destruction de la société capitaliste, puisque la société capitaliste est *pour elle* ? Aussi, sous toutes les latitudes, et à toutes les époques, la bourgeoisie a-t-elle le même visage distordu de haine, la même frénésie de faire tirer sur la foule, que cette rombière à brushing et lunettes de soleil saisie par la caméra de Patricio Guzman dans les rues de Santiago en 1973. Et sinon toute la "bourgeoisie", catégorie mal définie qui brasse plutôt large, du moins sa fraction consciente de soi comme classe, et consciente de ses intérêts de classe - la bourgeoisie #ensauvagée.
Par toutes les fibres de son être, cette bourgeoisie, toujours, partout, est #versaillaise. C’est en France, en effet, en 1871, qu’elle réalise pleinement son concept et indique tout ce qu’il faut savoir de la démocratie bourgeoise, ce régime où l’on peut parler de tout à l’exception de ce qui asseoit le pouvoir social de la bourgeoisie : la propriété privée des moyens de #production et la forme particulière d’enrôlement qu’elle détermine : le salariat. Quiconque entreprend de toucher à ça trouvera la bourgeoisie en travers de son chemin...
Entre 1970 et 1973, Salvador Allende s’y est risqué. Il en a résulté une leçon de chose politique d’une cruauté qui force la méditation – au moins de ceux qui auraient le projet de recommencer. »
(...)
Comme toujours, le vrai lieu d’étonnement n’est pas tant du côté des éborgneurs que de celui des intellectuels de service après-vente. Car cette colossale ânerie de « la-démocratie-on-peut-parler-de-tout » est l’article de foi d’une corporation entière, journalistique notamment.
(...)
Les expériences politiques passées s’ajoutent donc aux expériences de pensée présentes pour nous permettre de mesurer ce qu’il est permis d’espérer des procédures électorales dans le capitalisme quand c’est le capitalisme qui doit être mis en cause : rien. Mais le malaxage des esprits depuis si longtemps y a incrusté la religion de « la démocratie » si profond que rien ne semble pouvoir venir à bout de son argument formel
(...)
Ce que valent la « démocratie », son « débat » et ses scrutins sous la garde des institutions de la Ve République et du cirque médiatique, une part croissante de la population commence à s’en faire une idée assez juste. Qui voit aussi de mieux en mieux, entre violences sociales, violences symboliques, violences langagières et violences policières, qui sont les vrais violents dans cette société.
On peut gager que, bientôt, plus grand monde ne se laissera arrêter par ce genre d’arguties, peut-être même plus ceux qui étaient pourtant le mieux disposés à y croire — la bourgeoisie « éduquée » — quand ils constateront que toutes les protestations pacifiques du monde ne dévient pas d’un iota le cours du désastre climatique et pandémique — c’est-à-dire le cours du capitalisme
(...)
« ceux qui rendent une révolution pacifique impossible, rendent une révolution violente inévitable ». L’histoire ne connaît pas d’autre responsables du niveau de violence que les dominants.
— Frédéric Lordon.

- Lire la suite sur Chili 73, par Frédéric Lordon

- En écho au Chile de 1973, le 12 septembre 2020, la petite bourgeoisie du 16e encourage les CRS à “défoncer” les Gilets Jaune :

Remarques persos


Comme d’habitude depuis longtemps, les directives et lois valident et légalisent les pratiques illégales des forces l’ordre
. Au lieu de rappeler la « sacralité » des libertés aux flics et de les sanctionner dès qu’ils sortent du cadre théorique, l’état les encouragent dans l’arbitraire et la brutalité en leur donnnant toujours plus de moyens de répression. Logique, les régimes capitalistes dépendent de la répression policière pour se maintenir par la force, ils doivent donc en toute circonstance dérouler le tapis rouge aux flics, à leurs méthodes et à leurs revendications.
Ce qui est d’autant plus inquiétant quand on sait qu’au moins 50% des flics sont sympathisants de l’extrême droite, du Front National. (voir aussi, comparativement, le nombre de policiers et militaires votant à gauche)

Le ministre de l’intérieur Darmanin avait d’ailleurs indiqué récemment : « C’est la police, la gendarmerie, les forces de l’ordre qui font la loi dans notre pays »
Saluons cette franchise inhabituelle, la France est bien un état policier, et ce sont les largement les flics qui font la loi, au moins dans le domaine toujours plus étendu de leurs prérogatives d’ordre public.

Les catastrophes climatiques, écologiques et sociales provoquées par la civilisation industrielle ne pouvant que s’aggraver, les contestations et rebellions augmenteront forcément.
La civilisation capitaliste, ses Etats et ses gouvernements, ne voulant rien lâcher, étant structurellement irréformable, elle ne peut donc pas faire autrement pour se maintenir qu’accroître toutes les formes de répression et de surveillance.
La fuite en avant ultra-répressive du macronisme n’a donc rien d’étonnant.
Les tyrans de tout poil se cachent derrière le paravent de la pseudo-démocratie pour justifier le maintien du système et le terrorisme d’Etat exercé envers toute contestation ou contre-pouvoir consistants.

Si en 2022, une « gauche molle » (EELV, PS) vient par extraordinaire au pouvoir, ses quelques petites velléités de changement surperficiel seront contraints par les Maîtres capitalistes. De toute façon ces courants ne remettent pas en cause l’Etat ni le capitalisme, et installent eux-aussi toujours plus de flics et de surveillance (voir les mairies de Nantes, Lille, Lyon...).

Si, encore plus extradordinaire tant la puissance de la propagande merdiatique est grande, en 2022 arrivait au pouvoir une sorte de coalition anti-capitaliste, donc écologiste et populaire, donc porteuse de changements radicaux et de remise en cause du centralisme étatisé, là les puissances capitalistes feraient tout, comme au Chili de 73, pour la détruire et l’empêcher d’agir. « La-démocratie » et « la-légitimité » dont elles se réclament pour réprimer à tout va n’existeraient alors plus pour elles.
Pour résister, il faudrait alors une forte présence des peuples opprimés et autres écologistes dans les rues, dans l’auto-organisation et l’autonomie, dans des assemblées permanentes. En espérant que le système policier, les bourgois, capitalistes, oligarques et technocrates ne recourent pas comme au Chili de 73 aux massacres, tortures et disparitions en série.

On voit donc qu’il y a très très peu de chances de changement par le biais électoral, et que de toute façon les diverses formes de résistance hors institutions sont indispensables dans tous les cas. Il est donc vain d’attendre 2022 ou autres échéances institutionnelles pour agir.


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