La 1re partie de l’émission (40 minutes) comporte :
- Une critique des mauvaises compréhensions de l’intersectionnalité (comme simple théorie féministe antiraciste, comme addition des oppressions, comme revendication identitaire, comme appel à une « convergence des luttes », comme invisibiliation de telle oppression) ;
- Une définition préliminaire de l’intersectionnalité comme une théorie capable de saisir l’imbrication des différents rapports de domination (sans une théorie unitaire réduisant tout au capitalisme ou une théorie fragmentaire incapable de penser leurs interrelations structurelles) ;
- Une revue des différentes définitions de l’intersectionnalité (matrice des dominations, systèmes de domination imbriqués et en interaction, consubstantialité des rapports sociaux, carrefour des dominations, outil de visibilisation politique des plus opprimé-e-s) ;
- Une interrogation au niveau de ce qu’est l’intersectionnalité (réalité sociale et/ou méthode d’analyse, synergie d’oppressions vécues à un niveau individuel et/ou théorie de l’articulation des systèmes de domination) ;
- Un rappel de ses origines historiques (féminisme noir lesbien anticapitaliste du Combahee River Collective, émergence de mouvements de femmes racisées au cours des années 1970 à une échelle mondiale) ;
- Une discussion des spécificités des représentations stéréotypées des femmes noires vis-à-vis des femmes blanches et des hommes noirs ;
- Une critique féministe intersectionnelle de Femmes, race et classe d’Angela Davis ;
- Un appel à une abolition de l’ensemble des rapports de domination du fait de leur imbrication, et une nouvelle conception du « sujet révolutionnaire ».
La 2de partie de l’émission (1 heure, à partir de 41:27) comporte :
- Une présentation et une discussion critique des apports et des limites des trois grandes approches de l’intersectionnalité, celle de Crenshaw (juridique), celle de Yuval-Davis (post-structuralisme) et celle de Nakano Glenn et de Hill Collins (matérialiste) ;
- Une réponse aux critiques de l’intersectionnalité (surtout post-structuraliste) comme une approche « individualiste », « identitaire », « essentialiste » et contribuant donc à une « division des luttes » ;
- Une proposition de combinaison constructive de l’intersectionnalité post-structuraliste et matérialiste, et notamment une approche anti-essentialiste et matérialiste des « identités » comme étant des positions socialement construites par des rapports de pouvoir imbriqués qu’il s’agit de dé(cons)truire matériellement et au niveau des discours, des représentations et des idéologies ;
- Un rappel du caractère plastique du concept d’intersectionnalité, davantage une approche analytique qu’une théorie, et donc susceptible d’être révolutionnaire (comme réformiste) et matérialiste (comme idéaliste) ;
- Une réponse aux objections à l’intersectionnalité d’Elsa Dorlin, selon laquelle celui-ci figerait des identités issues de rapports de domination, alors qu’il ne s’agit que d’une critique valable sur un terrain juridique (où une telle fixation des identités est nécessaire dans un but anti-discriminatoire) et qu’une analyse extra-juridique dynamique des identités intersectionnelles (qu’il faut de toute façon utiliser comme vecteur de mobilisation politique) est possible ;
- Une présentation de l’intersectionnalité juridique de Crenshaw, qui vise à une visibilisation des discriminations intersectionnelles auparavant invisibles) en vue d’y mettre fin ;
- Une discussion autour de l’imbrication structurelle du capitalisme et du patriarcat ;
- Une réponse aux objections à l’intersectionnalité des théoriciennes de la « consubstantialité des rapports sociaux » (Danièle Kergoat, Elsa Galerand, Danielle Juteau), qui reprochent à l’intersectionnalité de manquer de dynamisme et de souplesse, alors que leur théorie manque de clarté analytique et marginalise l’importance des rapports racistes.
La 3e partie de l’émission (10 minutes, à partir de 1:42:53) comporte :
- Une conclusion en faveur d’une intersectionnalité matérialiste (mais ouverte aux apports post-structuralistes), dynamique, contextuelle et en termes de rapports de domination imbriqués ;
- Une discussion des usages militants actuels (et potentiels) de l’intersectionnalité, outil de visibilisation des dominations imbriquées, théorie permettant une re-problématisation des combats militants de manière inclusive (et solidaire), outil de reconnaissance des spécificités de chaque lutte et de l’imbrication des luttes, politique de construction d’alliances (et non de subordinations à un mouvement unitaire), analyse à mobiliser au moment des mouvements sociaux pour une meilleure compréhension et une meilleure inclusivité, et motif de critique des groupes militants refusant une prise en compte des intérêts de certains groupes, contribuant par-là à une division et un affaiblissement des luttes.
P.S. : Comme à chaque émission, nous utilisons « race » non comme réalité biologique (infondée scientifiquement), mais comme catégorie sociale réellement existante de par l’existence du racisme structurel et des discriminations, des violences et de l’exploitation qui en résultent, et qu’il s’agit d’abolir matériellement (et non simplement idéologiquement).