Inflation, pouvoir d’achat : restrictions et pénuries pour les masses, gloutonnerie pour les riches et l’industrie

La sobriété globale est incompatible avec le techno-capitalisme et l’Etat

samedi 9 juillet 2022, par Camille Pierrette.

En cas de tensions sur les prix et/ou sur les énergies, Etats et capitalistes demandent aux foules consommatrices de faire des économies d’énergie.
Les entreprises s’essaient aussi aux économies d’énergies, ce qui est bon pour leur chiffre d’affaire.
Pendant ce temps, les plus riches continuent d’accumuler des milliards et de vivre dans la gloutonnerie indécente (yachts, villas de luxe, jets privés...), le techno-capitalisme continue à produire et distribuer aux quatre coins de la planète ses marchandises et les désastres écocidaires et antisociaux qui vont avec.

Inflation, pourvoir d’achat : restrictions et pénuries pour les masses, gloutonnerie pour les riches et l’industrie
« The show must go on », vraiment ?!

Les écolos et rapports officiels ne cessent d’exhorter à la « sobriété » (aux économies d’énergies), mais ces voeux pieux ne cessent de se fracasser chaque année aux réalités et exigences de la civilisation industrielle.
La faible mise en pratique de la sobriété n’est pas un problème technique, ni même de volonté politique (même si on sait que le macronisme s’en tape complètement), mais un problème structurel qui découle des présupposés idéologiques et matériels de la civilisation industrielle.

Impossible d’être sobre pour ce modèle social aberrant qui a besoin pour survivre de croître et consommer toujours plus, aiguillonné par la concurrence et l’impératif d’augmenter le volume d’argent, un système de masse qui a besoin d’industries de masse pour contrôler les foules et vendre ses marchandises.
Ce système consomme toutes les énergies disponibles, il les additionne, il n’y a pas de transitions.

A brève échéance, autour de 2030 nous dit-on, avec la fin des stock de pétrole conventionnel facilement accessible, c’est la récession économique irréversible structurelle, avec inflation et chômage reccords en vue.
Le pouvoir d’achat ne pourra donc que chuter, amorti ou pas par des aides d’Etat.

La civilisation industrielle ne peut donc qu’échouer dans sa promesse (vaine et folle) d’étendre toujours plus la production et la consommation, ce pour soi-disant augmenter le niveau de vie et de « bien-être » (un certain type de niveau de vie et de « bien être »).
En réalité, le nombre de personne souffrant de la faim se remet à augmenter, et l’aisance matérielle pour une partie de l’humanité a entraîné de gros problèmes pour les autres parties (misère, guerres, pollutions, dictatures....). Sans parler de tous les problèmes internes aux sociétés industrielles plus ou moins riches (inégalités, misère, cancers, obésité, suicides, isolement, pollutions, flicage, mégalopeles moches et polluées, perte de sens, individualisme exacerbé, guerre permanente pour les jobs et les marchés, etc.).
A ces problèmes humains s’ajoutent le réchauffement climatique global et les destructions des écosystèmes qui anéantissent la vie en général et compliquent encore drastiquement la vie humaine.

L’inflation, c’est le capitalisme

L’inflation, c’est le capitalisme, c’est lié au fonctionnement standard et inévitable du capitalisme. Sans capitalisme ni autre système social néfaste du même tabac, il n’y aurait pas d’inflation, de « pouvoir d’achat », de chômage, de crise économique, de précarité, d’inégalités sociales, de récession et de reprise...

Le problème à combattre ce n’est pas l’inflation, mais le capitalisme et ce qui va avec (l’Etat, le technologisme...).
La solution ce n’est pas le maintien ou l’augmentation du pouvoir d’achat, mais c’est dézinguer le capitalisme, construire de l’autonomie collective égalitaire, et faire à la place des sociétés bien meilleures libérées du Capital, du marché du travail, de la concurrence, du centralisme, du productivisme, du rêve de la délivrance...

Pour le bien vivre des pauvres et de tous, la solution n’est pas de s’accrocher au pouvoir d’achat et aux augmentations de salaires, de rester sous le joug de l’Etat et du Capital pour leur demander, gentiment ou pas, des miettes plus grosses, de mieux répartir les « richesses » produites sur le dos des travailleurs et de la nature.
La solution c’est d’en finir avec ce système au plus vite, et de faire autre chose, à préciser par la discussion et la pratique.

Dans un régime de droite, type macroniste ou extrême-droite, l’accent est mis sur le maintien du statut des riches, tandis que la gauche essaient, normalement, de réduire la part des actionnaires et des rentiers pour faire ruisseler davantage l’argent produit vers les travailleurs qui en sont la source.
Mais dans les deux cas on reste dans l’impasse de la civilisation industrielle (de l’Etat-capitalisme), qui continue d’exploiter les humains et de détruire la biosphère.

Se limiter à augmenter les salaires ou à distibuer des aides, à taxer davantage les riches et les actionnaires, ça peut aider sur le moment, mais ça ne fait que repousser les problèmes à plus tard, où ils deviendront encore plus insolubles et cruciaux.
Idem pour les économies d’énergies, pour l’efficience des process industriels, les barrages, les bassines, les climatiseurs, etc.
On reste dépendant de la corde, on continue à s’y aggriper pour monter « plus haut », on tire dessus toujours autant, on la rafistole, on la repeint, et puis un jour ça craque vraiment d’un coup sec.
Il est tend d’atterrir, de retrouver le sol, de se passer des cordes qui étranglent plus qu’elles n’élèvent.

Inflation, pourvoir d’achat : restrictions et pénuries pour les masses, gloutonnerie pour les riches et l’industrie
Dans plusieurs pays, des révoltes éclatent face à la précarité accrue (Sri Lanka, Panama...) (image illustrative)

Plusieurs articles complémentaires sur le pouvoir d’achat et l’inflation

Je vais essayer de publier plusieurs articles autour de ces sujets cruciaux du point de vue de l’écologie politique ET du point de vue social.
On ne peut pas parler d’écologie politique sans parler du "pouvoir d’achat" et de l’inflation, et on ne peut pas causer de ces deux problèmes décemment sans parler aussi d’écologie. Ecologie, social, politique et économie sont totalement imbriqués. Les ultra-libéraux misent sur le Marché et l’innovation technologique pour résoudre les problèmes produits par le Marché et la course technologique, absurdité.
Résoudre la tension entre "niveau de vie" et écologie, entre "choix productifs" et écologie, entre implique forcément de tout remettre à plat.
Sinon, on ne résoud rien et on s’enfonce dans les désastres de tout ordre.
Quels besoins, quelles productions, quelles distributions, comment, avec qui, pourquoi, pour qui ...?
Comment vivre bien sans détruire la biosphère ni enchaîner/démolir d’autres humains ?
Le capitalisme, l’Etat, le "pouvoir d’achat", l’augmentation des salaires, les aides temporaires et la "lutte contre l’inflation" ne répondent pas du tout à ces questions, et se contentent de bricoler au fur et à mesure des ajustements dans l’urgence en fonction des rapports de force, des intérêts et des contraintes du moment.

Rappel d’un ancien article déjà sur ces sujets :
- Défendre un fragile pouvoir d’achat qui enchaîne à la marchandise et à la destruction du vivant OU conquérir durablement la puissance de l’autonomie et de l’agir ? - Reconquérir les moyens de subsistance et les capacités d’autonomie populaire au lieu d’être soumis à l’Economie

- Et sur la contradiction insoluble inhérente au capitalisme, qui sans arrête martèle des injonctions contradictoires :
Plus vert, tu meurs ! Clivage du moi, traitement de la contradiction et farce de la lutte pour le climat, par Sandrine Aumercier et Frank Grohmann - Clivage du moi, traitement de la contradiction et farce de la lutte pour le climat
(...)
Parallèlement, l’invasion russe de l’Ukraine vient poser la question de « l’indépendance énergétique », et il ne se passe pas un jour sans que ce thème ne fasse, lui aussi, les gros titres, entre moralisation ciblée des approvisionnements, annonces de grands changements dans la politique énergétique et incitations hypocrites à la sobriété. À l’image des publicités pour la crème glacée obligatoirement assorties d’une recommandation à consommer « cinq fruits et légumes par jour », le temps n’est pas loin où chaque incitation à consommer sera accompagnée d’une incitation à rester sobre. Chaque fait et geste devra par exemple remplir la condition de « zéro émission nette » de gaz à effets de serre qui n’est qu’un savant calcul destiné à « compenser » les émissions, et non à les supprimer. Cette consécration de l’injonction contradictoire manifeste de manière aiguisée le traitement de la contradiction réelle, qui met tout en œuvre non pas pour sortir de cette équation impossible, mais pour la pérenniser.
(...)
Aussi n’importe qui disposant d’un minimum de présence d’esprit devrait hurler à la supercherie et descendre dans la rue, non pour crier à la sauvegarde du climat, mais pour exiger la fin de sa prise en otage dans de tels discours en « double bind » qui sont comme des appels incessants à se compromettre avec l’impossible. Cela aurait naturellement des conséquences sur les « modes de vie ». L’électricité à l’interrupteur et le gasoil à la pompe ne tombent pas du ciel et celui qui prétend les garantir à perpétuité ne peut être qu’un vendeur de poudre de perlimpinpin. S’il est éhonté de la part des détenteurs et défenseurs du capital de culpabiliser les « choix » particuliers du consommateur, inversement il est donc tout aussi exclu de dédouaner l’individu de la responsabilité de son agrippement à son seul pouvoir d’achat et aux fausses garanties d’une sortie de crise qui n’arrivera en aucun cas dans les conditions existantes.
Il n’est pas étonnant que la contradiction ne soit pas médiatisée, mais seulement « traitée »
(...)


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