Ils nous laisseront volontier la-rue, tant que perdurent l’Elysée, l’Economie et l’Etat

Manifester pour exiger des réponses des puissants, ou démolir les structures du Pouvoir ?

samedi 23 avril 2022, par Stratégie & co.

Quelques observations de bons sens.
La plupart du temps, les manifestations, blocages et grèves, mêmes virulentes, ont pour objectif principal d’adresser un message aux dirigeants économiques et gouvernementaux, d’exiger d’eux une réponse qui nous satisfasse.

Ainsi, ces protestations restent dans le cadre étouffant du système en place (la civilisation techno-industrielle, l’Etat, le capitalisme, l’Economie, le productivisme, la foi dans la délivrance par les machines...), elles en acceptent les présupposés fondamentaux et restent donc prisonnières de ces filets gluants, elles se mettent d’emblée en position d’infériorité et d’attentisme où des dominés demandent aux puissants de bien vouloir leur lâcher quelques miettes, elles légitiment ce faisant l’existence des puissants et leur rôle. Elles ne peuvent donc obtenir, au mieux, que de petites améliorations, mais jamais des modifications positives profondes. Donc le système continue ses ravages globaux imperturbablement, on en voit les résultats.

Ils nous laisseront volontier la-rue, tant que perdurent l’Elysée, l’Economie et l’Etat
Se battre pour des réformes temporaires qui perfectionnent le monstre, ou l’abattre ?

Parfois ces protestations aimeraient bien viser plutôt le coeur du système, virer les dominants et faire du partage horizontal par exemple, mais elles n’en ont pas les moyens (ou ne s’en donnent pas les moyens), alors elles essaient d’arracher certains morceaux plus conséquents, pour soulager leurs peines et éventuellement affaiblir le système, et ainsi petit à petit le terrasser.
Seulement, ces améliorations ne sont que temporaires, le méga-monstre étant toujours là il revient toujours, et puis tout ce qui ne le tue pas le renforce.

Cette méga-machine est plastique, agile, molle, elle peut encaisser des coups, mêmes violents, sans être mise en danger, elle peut se reconfigurer, se réparer, changer de visage et d’apparence.
C’est une des leçons importantes que nous enseigne Kaczynski dans son livre "Révolution Anti-Tech, pourquoi et comment ? : la nécessité d’attaquer le système à un de ses coeurs vitaux, là où il ne peut pas lâcher, rebondir, reculer. Il s’agit de l’acculer, et de lui porter des coups de grâce.

L’autre leçon, c’est qu’on est obligé de détruire/démolir cette méga-machine, car elle ne s’arrêtera pas, et détruira à peu près toute vie sur Terre (en tout cas les formes les plus grandes et complexes), quitte à ce qu’elle en crève elle aussi au final.
Se réfugier dans des zones de « résilience » n’arrêtera rien, le monstre viendra nous chercher partout et toutes les zones seront invivables.

Donc, il est important de bien réfléchir aux objectifs qu’on se donne, sont-ils accordés à la réalité, et ensuite peaufiner les stratégies employés pour les atteindre, sinon on risque de s’épuiser pour peu de résultats, de ne pas indiquer les bons moyens pour parvenir à nos fins.

La méga-machine nous laisse volontier la-rue tant que perdurent l’Elysée, les entreprises et l’Etat, tant que perdurent le pouvoir, le capitalisme et ses fondamentaux, le complexe techno-industriel et l’administration autoritaire centralisée.
Pour nous faire croire que l’enjeu principal est la protestation adressée patiemment aux puissants, une méga-machine « intelligente » dramatisera à outrance cet affrontement là, elle enverra des masses de flics surarmés pour blesser et mutiler, elle s’offusquera à outrance des « dégradations », elle fera mine d’être gênée par tout ça. Et si ça chauffe un peu trop elle ouvrira des négociations et lâchera quelques os, non sans toujours chercher à diviser entre les diverses composantes.
Ainsi les contestataires rentreront le plus souvent dans ce petit jeu, de massifier davantage, d’adresser un message plus fort aux puissants pour qu’ils nous entendent. On oubliera que les puissants ont très bien compris et très bien entendu, mais qu’ils ne veulent/peuvent absolument pas que le système en place s’écroule, qu’ils ne sont qu’une des courroies de transmission de la mégamachine.

Au lieu de détruire le monstre, on lui demandera de moins mal se comporter, de piétiner nos vies avec moins de lourdeur, de brûler tout avec une température de flamme plus douce, de détruire les animaux et les plantes avec des machines industrielles décarbonées, d’alimenter ses fours crématoires avec des énergies alternatives dites « vertes », de moins mal soigner les humains victimes de ses miasmes, de réduire le nombre de ses polluants mortels, etc.

Ainsi en s’épuisant à griffer la carapace du monstre, on aidera le monstre à « s’améliorer », à être moins frontalement ravageur par endroit, à mettre un masque plus cool sur son visage d’horreur, ce qui l’aidera à durer, et massacrer, plus longtemps.
Et on oubliera de viser ses coeurs par des actions adaptées, de coordonner et organiser des minorités assez nombreuses et puissantes pour être à même d’y parvenir.

En gros, vouloir réformer la méga-machine ne mène à aucun changement consistant et lui permet de se renforcer, d’être plus efficace, d’améliorer son acceptabilité et son adaptabilité, et de faire davantage de dégâts.
La nature même du monstre oblige à viser sa destruction complète.

Ils nous laisseront volontier la-rue, tant que perdurent l’Elysée, l’Economie et l’Etat
Détruire la mégamachine ou la réformer pour mieux huiler ses rouages mortels ?

Autre problème : notre dépendance vitale à la méga-machine

Autre frein majeur : on est à présent, dans les pays industrialisés, entièrement dépendant des productions industrielles du monstre (nourritures, énergies, vêtements...) dont les éléments proviennent des 4 coins du monde mis en coupe réglée. Les autonomies locales et les paysans sont de plus en plus anéantis, les moyens de subsistance sont soit détruits soit annexés par les forces privées ou étatiques.

Ainsi, en l’état, détruire le monstre c’est se couper de la « corne d’abondance », c’est sauter dans le vide sans parachute : « on ne mord pas la main qui nous nourrit », même si cette main est d’acier, même si elle nous nourrit avec des poisons et que l’autre main du monstre vous étrangle ?

C’est pourquoi on hésite aussi à vraiment s’attaquer aux coeurs du monstre.

Il faudrait donc immédiatement reprendre de la distance par rapport aux machines du monstre, développer l’autonomie collective, savoir assurer notre subsistance directement, individuellement et collectivement.

Mais ça le monstre n’en veut pas, ça heurte ses intérêts et il sait que si on peut se passer de lui au moins en partie on hésitera moins à l’abattre.
Alors pour ça aussi il faudra lutter et ruser.

Ils nous laisseront volontier la-rue, tant que perdurent l’Elysée, l’Economie et l’Etat
Détruire la mégamachine pour laisser renaître et s’épanouir les fleurs

Si on affaiblit le monstre via des coups porteurs, alors on aura plus de latitude pour construire de l’autonomie collective, pour récupérer des moyens de subsistance.
Si le monstre est bien occupé ailleurs (pandémie, guerre, catastrophe...), alors on aura plus de marge de manoeuvre pour l’autonomie collective.
Si le monstre est affaibli par des pénuries, inflations, canicules, mégafeux, alors il sera moins difficile de le détruire par des coups en ses coeurs, de l’achever au lieu de vouloir le réparer.
Et puis le monstre ne va pas s’écrouler sous nos coups en un jour, ce qui laisse du temps pour construire productions et organisations autonomes dans les espaces « libérés ».
La stratégie doit aussi s’adapter à la situation, pour saisir des opportunités, pour ça il faut sans cesse s’entraîner, se tenir prêt, avoir déjà identifié les cibles et fabriqué les outils pour profiter des occasions.


Répondre à cet article

modération a priori

Attention, votre message n’apparaîtra qu’après avoir été relu et approuvé.

Qui êtes-vous ?
[Se connecter]
Ajoutez votre commentaire ici

Ce champ accepte les raccourcis SPIP {{gras}} {italique} -*liste [texte->url] <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Partagez la page

Site réalisé avec SPIP | | Plan du site | Drôme infos locales | Articles | Thèmes | Présentation | Contact | Rechercher | Mentions légales | Suivre la vie du site RSS 2.0
Médial local d'information et d'expression libre pour la Drôme et ses vallées, journal local de contre-pouvoir à but non-lucratif, média participatif indépendant :
Valence, Romans-sur-Isère, Montélimar, Crest, Saillans, Die, Dieulefit, Vercheny, Grane, Eurre, Loriol, Livron, Aouste sur Sye, Mirabel et Blacons, Piegros la Clastre, Beaufort sur Gervanne, Allex, Divajeu, Saou, Suze, Upie, Pontaix, Barsac, St Benois en Diois, Aurel...
Vous avez le droit de reproduire les contenus de ce site à condition de citer la source et qu'il s'agisse d'utilisations non-commerciales
Copyleft