Il n’y a pas de bons flics, car les flics défendent ce qui cause les problèmes sociaux, c’est leur travail

Mauvais flics comme bons flics sont au service du même système injuste et destructeur

lundi 8 juin 2020, par Auteurs divers.

ACAB.
"All Cops Are Bastards"
Je constate, ces derniers jours, pas mal de critique de cette expression du cœur et de l’esprit. Ces critiques portant essentiellement sur le « All », et absolument jamais sur le « Bastard ». Pourtant, il n’est pas question de types nés hors mariage, si ?
Mais peu importe. Si pour certain-e-s, ce mot « bâtard » semble convenir, il semble qu’à leurs yeux ce mot ne puisse pas s’adresser à « tous ». De mon point de vue, tout dépend où l’on met son curseur de bâtardise.
Oui, il y a des violences policières commises par certains individus. Appelons-les les « mauvais flics ». Ces actes vous semblent globalement condamnable si j’ai bien compris (si c’est pas le cas, virez moi de vos contacts, on a surement pas grand chose d’agréable à se dire). A côté de ça, Il y a tous les autres. Ceux qu’on appellera les « bons flics ». Mais, ces "bons flics", on en voit combien qui condamne les actes (reconnus comme condamnables) des premiers ? Le problème, ce n’est pas seulement les tordus racistes en mal d’action qui rêvent de faire mal à des immigrés et à des gauchistes. Le problème, c’est surtout que les autres les laissent faire. Sans cette complicité silencieuse, les "mauvais flics" n’auraient pas la possibilité de faire ce qu’ils font. Cette tolérance suffit, à mes yeux, à faire de ces « bons flics » des bâtards. Alors, oui, je dis ACAB (de ouf).

Il n’y pas de bons flics, car les flics défendent ce qui cause les problèmes sociaux, c’est leur travail
Mauvais flics comme bons flics sont au service du même système injuste et destructeur, qui tue, mutile, emprisonne et désespère afin de maintenir le statut quo

Mais ça, c’est relativement simple. C’est pour ce qui est du constat qu’on fait avant de se poser la question, plus profonde, du rôle social des forces de l’ordre. Parce qu’à partir de là, "à quoi ça sert, en vrai, un keuf ?"
Est-ce qu’effectivement c’est fait pour protéger ? Mais protéger qui ? De quoi ? Et dans quel but ?

On entend souvent que « ils font ce taf pour aider les gens ». C’est un argument difficile à défendre. Si on veut lutter contre une chose, on essaie de faire en sorte que cette chose, au mieux, n’existe plus, au pire, quelle fasse le moins possible de victime/conséquences. Pour citer quelques exemples, si on veut lutter contre les violences sexuelles, conjugales, patriarcales, on lutte contre le patriarcat et son hégémonie. On n’avoine pas la gueule des féministes le 8 Mars quand elles ont le culot d’ouvrir leur gueule (ou on se désolidarise de ceux qui le font). Si on veut lutter contre les ravages que peuvent faire les drogues, on fait dans le médical, l’accompagnement. On fout pas des fumeurs de shit en prison (ou on se désolidarise de ceux qui le font). Si on veut lutter contre la délinquance de subsistance (voler, trafiquer, dealer pour bouffer), on s’attaque au capitalisme. On éclate pas les gens qui défendent une plus juste répartition des richesses, dans les manifs (ou on se désolidarise de ceux qui le font). [On pourrait faire ça longtemps, mais ça va déjà être trop long pour certain-e-s qui auront la critique plus facile que la curiosité.]
Quand on veut lutter contre quelque chose efficacement, on s’attaque à ses causes. Pas seulement à ses conséquences. Les flics, ils s’attaquent aux conséquences. Et aux personnes qui s’attaquent aux causes. Parce que les flics, ça sert pas à protéger les gens. Ça sert à protéger les causes. Ce qui reproduira les conséquences encore, et encore, jusqu’à toujours. Pour aider les gens, on bosse dans le social, le médical, l’éducation, ou tout un tas d’autres trucs. On essaie de changer de modèle de société, si c’est une société qui produit en masse des gens qui ont besoin d’aide. On coure pas après un métier qui donne, de fait, un pouvoir de domination sur le reste du peuple (et un flingue).

Alors, oui, j’utilise ACAB. J’utilise cette expression parce qu’il est indispensable de pointer du doigt le fait que ce n’est pas « un métier comme les autres ». C’est pas un métier dans lequel on peut trouver du nationalisme ou du racisme, comme dans tant d’autres, étant donné qu’on en trouve partout (parce que les shtars protègent les structures et institutions qui les produisent ???). C’est un métier qui implique de valider le fait qu’il est possible d’avoir des privilèges pour la seule et unique raison qu’on à les papiers du pays où on est flic, par ce que c’est un métier qui exige qu’on se comporte différemment avec un français régulier d’avec un sans papier. C’est un métier qui nécessite d’être patriote, de reconnaître les frontières arbitraires et coloniales de la france, et qu’on y aura des droits différent quand on naît ici, ou quand on naît ailleurs, et d’y faire appliquer ces positions politiques. Parce que oui, ça peut sembler "logique", "normal" ou je n’sais quoi d’autre a certain-e-s, mais effectuer une différence de traitement selon l’endroit où l’on est né, c’est un positionnement politique. Faire appliquer ça, c’est politique. La police est politique.

Sur nos exigences à leur égard,
On pourrait espérer que les « mauvais flics » soient condamnés lorsqu’ils commettent des exactions. Mais ça n’arrivera pas. On ne peut espérer ça que parce que l’on voit uniquement le dialogue que, nous, essayons d’instaurer avec l’état sur ce sujet. Mais de leur côté, les forces de l’ordre ont aussi un dialogue avec l’état. Et dans ce dialogue, ils parlent, on les entend, ils pèsent. Pas nous. Ils pèsent pour la simple et bonne raison que ce sont eux qui nous tiennent en joue. Lorsqu’ils manifestent, cagoulés, armés, au mépris de la loi, ils sont écoutés. L’état accède à leurs requêtes. Lorsque nous manifestons légalement, non seulement, on nous écoute pas, mais en plus, ils tirent, mutilent, éborgne, comme ils le font dans les quartiers populaires depuis des décennies. Lorsqu’une colère légitime émane de ces quartiers populaires, à cause notamment de la gestion colonial et raciste de ceux-ci, on ne l’écoute pas. On humilie, on brise, on mutile, on tue. On instaure la peur. S’ils venaient à ne plus se sentir protégés par l’état, s’ils encouraient de vrais risques à se comporter comme ça, alors, ils ne seraient plus prêt à remplir leurs rôles social qui consiste en le maintien du stau quo. S’il pouvait y avoir de réels conséquences pour eux, ils ne le rempliraient probablement plus.
L’état a besoin qu’ils soient en mesure de nous faire subir tout ça. Ce ne sont pas de « mauvais flics ». Ce sont des flics. Ni plus, ni moins. Et on ne peut pas exiger d’eux qu’ils « se contentent de faire leur travail », parce que c’est déjà ce qu’ils font. C’est leur travail.

Alors oui, on peut foutre son curseur de bâtardise où on veut, on peut discuter de machin qu’est flic mais qu’est quand même un bon voisin parce que quand même il sort son chien et qu’il laisse pas traîner ses déjections (au chien) sur le trottoir, on peut pinailler sur les mots, etc... Toujours est il que le constat restera le même. Les mots choisis ne changeront pas la situation.
Alors, avec les mots que je choisis d’utiliser, avec l’endroit où se trouve mon curseur (qui se contenterait de bien moins), oui, AACAB. Absolutely All Cops Are Bastards. Après, libre à vous de ne pas mettre tous les bâtard dans le même sac.
Ça ne fera sûrement pas plaisir à tout le monde. Mais si ça peut vous rassurer, ça ne me fait pas plaisir non plus.

Il est 13h12. Il restera 13h12. Ici, ailleurs, aujourd’hui, et demain.

(source : post Facebook)

- voir aussi :

  • Tout le monde peut se passer de la police - Organisations communautaires pour abolir la police à Chicago - Scandale après scandale, meurtre après meurtre, la police états-unienne s’est taillée une solide réputation de brutalité, notamment auprès des populations noires. Dans le South Side de Chicago, des militant.e.s de terrain s’organisent pour dépasser la simple critique de l’institution policière, et mettre en place des contre-institutions rendant inutile l’intervention de la police. Inspiré.e.s par le concept d’abolition de la prison porté par Angela Davis, ou par la notion de « justice réparatrice » héritée des traditions indiennes, le but est de montrer que la fonction de la police tient plus dans la répression que dans la protection. Cercles de parole, repas de quartier servant de défense collective, ou bien encore résolution des délits à l’intérieur des communautés et des quartiers, les idées pour abolir la police ne manquent pas. Et certaines sont mises en pratique.
  • MINNEAPOLIS ANNONCE LA DISSOLUTION DE LA POLICE MUNICIPALE⚫ Des jours d’émeutes et des manifestations dans tous les Etats Unis suite au meurtre de George Floyd commencent à montrer leurs conséquences politiques. La police de Minneapolis gangrénée par le racisme est maintenant en voie de démantèlement. (...) La police n’a d’ailleurs pas toujours existé et la résolution de nombreux types de conflits est quelque chose d’expérimenté dans plusieurs endroits du monde à une échelle plus communautaire ou communale qu’institutionnelle. Gérer la violence, ses conséquences et ses réparations est quelque chose que des groupes au sein d’une communauté peuvent assumer collectivement.
LA POLICE GAZE...ET TUE.
Sarah Grossman, tuée par les gaz lacyrmo de la police

LA POLICE GAZE...ET TUE.

Militante écologiste et des droits civiques, Sarah Grossman 22 ans venait d’être diplômée de l’Université de l’Ohio (USA). Elle est morte le 30 mai dernier suite aux manifestations BLM à Columbus. Alors qu’elle protestait pour que justice soit faite après la mort de George Floyd, tué par un policier. Elle aurait reçu des gaz lacrymogènes, ce qui lui aurait provoqué une insuffisance respiratoire, menant à sa mort. Sa sœur Jessa a par ailleurs démenti le fait que Sarah souffrait d’asthme, contrairement à ce que certain·e·s internautes avaient relayé.

(post et visuel sur Cerveaux non disponibles)

En réponse aux menteurs cyniques et complices du gouvernement, de l’extrême droite ou de la droite

« La police et la gendarmerie française sont l’exact reflet de notre société » et « ni raciste ni violente » F.Péchenard.
Pourtant il y a des témoignages (le lien est public mais je choisis de ne pas diffuser les noms vu les tensions actuelles)

 J’ai fait une seule GAV dans ma vie, parce que je suis blanche, et que je suis flippée des manifs et de l’affrontement donc je me retrouve rarement là où ça pète.
J’ai fait une seule GAV parce qu’un soir, il y a longtemps maintenant, un mec taré, un fou furieux nous a pété la gueule, on était 3 queers sans aucune skill de baston, on s’est défenduEs comme on pouvait, assoméEs et choquéEs, mais vous savez quoi ? ce type, ce connard fini et taré, il a porté plainte en premier. Il était 4 heures du matin, on était blesséEs et on s’est retrouvéEs en GAV alors que nous étions trois victimes d’un chauffeur de taxi et de son pote qui nous ont juste démontéEs une nuit dans une rue vide d’août à Paris : j’avais un œil au beurre noir et j’ai gardé pendant des mois des éclairs dans le champ de vision, la deuxième copine a gardé des béquilles pendant un mois, et c’était une lèvre éclatée pour la troisième personne qui se pissait de sang sur le t-shirt. Mais ce conducteur de taxi a très bien su parler aux flics et a immédiatement porté plainte contre nous, on sortait de bar, et les flics l’ont cru plutôt que nous trois, nos dégaines et nos gueules éclatées. On l’a vu sortir du commissariat, impuissantEs et abasourdiEs, pendant qu’on nous emmenait en cellule. Et nous avons passé, un jour d’août 2014, 18 heures en GAV, et c’est ici en fait, en vrai, que l’histoire commence.

Un jour on pourrait écrire en détail ce qu’il s’est passé pendant cette GAV, en plein Paris à 2 pas de beaubourg, et qui est resté gravé dans nos mémoires et qui fera que oui, à tout jamais, j’aurai peur de la police, même si je suis blanche, cis, et fort peu intrépide. On pourrait raconter des choses mais l’IGPN en a décidé autrement alors on dira que tout ceci n’est pas vrai, n’est ce pas ?

On pourrait raconter que nous n’étions pas les seulEs en GAV cette nuit-là, et que des jeunes filles, mineures et Roms, étaient dans une cellule en face de la nôtre, et elles pleuraient,
On raconterait le chantage que les flics faisaient aux adolescentes, elle n’auraient un traducteur que si elles donnaient leurs empreintes,
On raconterait comment ils disaient tous que c’était « des animaux » et que ça les dégoutait que l’une d’elle tire son lait dans une bouteille en plastique, sans doute venait-elle d’accoucher et les seins gonflés de lait, ça fait mal, et ils disaient tout haut leur dégout et leur écœurement,
On pourrait raconter comment un flic gradé est arrivé dans le couloir,
On raconterait qu’il en avait assez de les entendre pleurer,
On raconterait comment il a sorti son flingue,
L’a dirigé vers les jeunes filles,
Pour leur faire peur,
Sadique,
On raconterait comment il a sorti l’une des jeunes filles,
On raconterait comment il l’a frappée au visage d’un coup de poing dans le couloir du comico, parce qu’en France on ne met pas de caméra dans les couloirs des comicos,
On raconterait comment il a essayé de la forcer à boire son propre lait maternel qu’elle tirait parce que sans doute elle avait accouché il y a peu, il lui tenait le visage et la bouche ouverte et il versait le lait partout et elle pleurait, on le raconterait et ça semblerait tellement délirant que l’IGPN n’y a pas cru, mais c’est une autre histoire,
On raconterait comment l’un de nous a hurlé pour faire venir un témoin à cet enfer,
On raconterait comment la témoin est venue, elle était flic, elle était Noire, elle a demandé ya quoi, elle n’a jamais tourné la tête vers ce qui se passait derrière elle et elle est repartie en silence, et je me demande ce que ça fait, d’être une flic noire subordonnée d’un néo-nazi, et ce que tu vis,
On raconterait comme le flic gradé s’est retourné vers celui qui hurlait, et lui a proposé de venir régler ça dans sa cellule, et comment la peur te tétanise et tu peux plus rien faire et tu te tais,
On raconterait, à côté de cette violence raciste et misogyne inouïe, combien ce qui s’est passé par ailleurs était presque anecdotique au fil de ces 18 heures,
On raconterait le flic qui insiste bien sur l’état civil du copain trans pour ensuite le coller dans la même cellule qu’un mec cis qui a tout entendu,
On raconterait la flic qui braille en ricanant dans un grand couloir de je ne sais plus quel lieu, peut-être les urgences médico-judiciaires, « va retrouver ta copine » en nous poussant chacunE dans le dos,
On raconterait la flic qui passe sa main sur le corps de la personne pour savoir d’où il est opéré ou pas,
Bref tu sais,
On raconterait la transphobie banale et le racisme d’une violence hallucinante.
Et comment ce qui s’est passé cette nuit-là et ce jour-là dans un commissariat de Paris un mois d’août 2014 était tellement atroce et insupportable que nous aurions préféré nous refaire péter la gueule 5 fois que de vivre cette GAV.
On raconterait comment en sortant, profondément choquéEs, nous n’avons pas pu obtenir le numéro d’immatriculation du flic qui avait torturé les jeunes filles et que ses collègues ont juste éclaté de rire quand on a insisté,

On raconterait comment celui qui a tout vu et a hurlé depuis sa cellule dans le commissariat pour qu’un·e témoin vienne, a tout fait : porter plainte à l’IGPN, enchainer les rdv à 8h du matin systématiquement annulés pour te décourager, jusqu’au rendez-vous enfin maintenu, la confrontation avec le flic, les rires, les propos racistes encore sur ces « filles Roms qui pleurent tout le temps vous savez c’est pénible ».
On raconterait qu’on est alléEs à des rendez-vous avec Amnesty et avec Rom Europe, pour leur raconter.
Mais que ça ne sert à rien et qu’un jour, l’IGPN nous a répondu que l’affaire était classée, en l’absence de témoins.
Porter plainte contre les flics est une vaste blague.
On le raconterait parce qu’on ne l’a jamais écrit nulle part, que c’est un moment réellement traumatique, on le raconterait à l’écrit et moi j’aurais peur, peur que le flic tombe sur ce récit et se reconnaisse, et alors on dirait bien : tout ça n’est pas vrai, c’est des histoires,

et moi j’ai juste : peur de la police, et je ne suis ni Noir·e, ni Arabe, ni Asiatique, ni Rom, ni trans, alors je ne peux même pas savoir ce que c’est la peur que tu ressens quand tu n’es pas une blanche cis.


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