Voici plusieurs textes et faits qui touchent à la question de l’alliance et de la complicité entre révoltés, entre opposant-e-s au système capitaliste et au régime, entre partisant.e.s de société vivables, solidaires, non-autoritaires, soutenables.
Acte 43 - Marseille - Convergence Quartiers Nord / Gilets Jaunes☀ #ACTE43 #MARSEILLE
(Post de Rouen dans la rue, avec video)
Une scène mémorable hier en bas de la Cannebière, tout près du Vieux port à Marseille : les collectifs des Quartiers Nord en lutte rejoignent le cortège des gilets jaunes et sont accueillis sous les applaudissements. Une belle image de convergence entre différentes portions les plus précarisées de la population qui, habituellement, ne se rencontrent jamais.
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- 21 septembre : pour une alliance des Gilets jaunes et du mouvement climat - Le 21 septembre 2019, de grandes organisations écologistes appellent à un nouveau soulèvement massif pour le justice sociale et climatique. De son côté, le mouvement des Gilets jaunes, loin de son élan premier, s’est transformé d’une façon inédite, avec des dispositifs démocratiques qui tiennent la route mais des effectifs réduits. Alors qu’il irrigue d’une force nouvelle les autres luttes dans lesquelles il se reconnaît, nous aurions ici l’occasion de rechercher des cadres communs à notre action et à notre analyse, préalablement à toute alliance poussive. Cette recherche ne s’annonce pas simple. Le mouvement climat et les Gilets jaunes ont en commun d’être hétérogènes et ambivalents. Et des différences peut-être profondes, entre les deux ensembles qu’ils forment malgré leur diversité, pourraient faire durer leur incompatibilité.
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Extraits :
La convergence des luttes se traduit bien souvent par de simples défilés de rue où les un-e-s se contentent de marcher à côté des autres. Ces mises en scène, qui portent en germes de grossières récupérations électorales, semblent particulièrement dépassées à l’heure du soulèvement jaune. L’une de ses plus grandes avancées a consisté en la mise en place d’une assemblée des assemblées à Commercy, en janvier 2019. La quatrième aura lieu en octobre dans le sud de la France. Quel intérêt de répéter les incantations de la convergence après avoir mis la barre aussi haut ?
Les clarifications nécessaires à la coopération de groupes politiques peuvent se faire dans des assemblées communes11, sur des zad et terrains de lutte, dans des rencontres, filmées ou non, ou encore dans des textes. Ceci en plus des partages que permettent déjà la circulation des personnes engagées entre les différentes offensives. Dans tous les cas, il nous semble indispensable de chercher les cadres qui permettront de prendre à bras le corps ce qui nous sépare et nous oppose, comme le dogme culpabilisant de la « non-violence ».
L’alliance est autrement plus exigeante et plus franche que la convergence. L’alliance signifie que si mon allié est attaqué, je le défends autant que je peux compter sur sa protection si je me retrouve en danger. Nous ne parlons plus ici de soutien médiatique et autres postures. Nous ne fixons pas non plus l’horizon illusoire d’une union sans faille face à la puissance de l’État. Les conditions et le désir de cette alliance doivent pouvoir se construire et émerger à travers la recherche et la multiplications des coopérations entre nos luttes. Comme le disait un Gilet jaune de Saint-Nazaire au théâtre de l’Échangeur, le mouvement écologiste légaliste peut être une base arrière pour les différentes offensives, quitte à ouvrir ensemble des « maisons du peuple et du climat »17.
Il est à peu près certain que le système tel qu’il est ne sortira pas indemne d’une alliance de ses opposant-e-s. Et les bases de cette alliance sont en train d’émerger en de multiples lieux et par de multiples pratiques. Que nous bloquions le pont de Sully ou que nous dé-gradions le Fouquet’s, que nous occupions le siège d’Amazon ou le Panthéon, que nous nous réunissions chaque semaine en assemblée ou pour se former à la désobéissance civile, que nous fassions de la permaculture ou du graffiti, de l’antipub ou du rap engagé, que nous prenions des photos ou réparions des vélos, à Notre-Dame-des Landes comme à Gonesse, à Bure comme dans le Vexin, Place du Capitole comme Place des Fêtes, Montpellier comme Bordeaux, à Biarritz, à Lille, à Brest, à Caen, à Nantes, à Lyon, à Perpignan, à Strasbourg, à Nice, à Grenoble, nous sommes tou-te-s engagé-e-s par notre contribution dans une offensive de fond contre l’écosystème des oppressions. Et cette liste serait artificielle si nous ne nous reconnaissions pas déjà, entre révolté-e-s, si nous ne suivions pas assidûment nos luttes mutuelles – en France comme à Hong Kong, au Soudan, en Algérie, en Russie – si nous n’échangions pas déjà soutien symbolique et soutien matériel, de la sympathie et de l’inspiration.
Je me sens moi même gilet jaune. On reproche aux gilets jaunes certaines choses, comme ne pas avoir de leader, de ne pas avoir condamné la violence, et d’avoir de ce fait fait mourir le mouvement.
Je me sens proche de la manière dont les gilets jaunes conçoivent la lutte. Il n’est pas possible de négocier avec son ennemi, car sinon ils vous donnent une victoire qui est en réalité une défaite.
La victoire est dans le fait que les gens se transforment dans la lutte, et imposent progressivement un nouveau monde, plus juste.
Par capillarité tout cela va éclore, et on obtiendra ce à quoi on aspire.
Notre ennemi pense avant tout « efficacité », et selon moi, l’erreur que nous commettons souvent est de penser en terme de nombre, en se disant que nous devons être nombreux avant tout.
Alors qu’en réalité, il faut être vrai, juste, et cohérent avec nos valeurs, pas forcément nombreux.
Leur efficacité à eux ne tient pas compte de ce qui est juste ou vrai, c’est une efficacité qui ne peut pas durer éternellement, et qui sur le long terme devient inefficace.
Nous ne voyons pas immédiatement les résultats de nos combats, et cela nous fait croire que nous ne sommes pas efficaces.
On ne devrait pas uniquement se concentrer sur la stratégie, mais également sur la tactique.
Tout combat se gagne par ses alliés, et non pas par ses ennemis. On doit créer, renforcer, et entretenir les alliances, car c’est ce flux, qui va nous faire gagner.
Le simple acte de se dresser contre l’inertie du monde est une victoire en soi !
Dans la dénonciation des violences policières, je constate un changement énorme. Avant, quand nous en parlions, on nous traitait de menteurs, maintenant les réactions sur les réseaux sociaux montrent une bascule de l’opinion contre ces violences.
Ce gouvernement pense qu’il maîtrise la situation, et est prêt à tout pour gagner contre nous, alors qu’une victoire remportée militairement est perdue idéologiquement...