On entend et on lit tout et son contraire sur les annonces de blocages à partir du 17 novembre par des « gilets jaunes ».
A la base, on a surtout des pauvres et des classes moyennes du bas qui en ont marre de se faire mépriser et ponctionner par tous les bouts par le gouvernement Macron, pour qui le prix de l’essence est la goutte qui fait déborder le vase, et on ne peut qu’être solidaire avec ça.
Et on ne peut qu’être d’accord avec le fait que le pognon va aux riches, tandis que les autres galèrent. Ce n’est pas nouveau, mais Macron l’incarne peut-être de manière plus cynique et violente que d’habitude.
A Crest, l’événement Facebook a disparu, mais on y lisait des appels à manifester samedi 17 à partir de 8h, au hasard des ronds points.
Un groupe FB existe pour Valence, avec appel à partir de 7h au parking Géant Casino Sud, un tract a aussi été distribué avec appel à rassemblement à 14h au parking Géant Casino Sud.
A Die, un événement FB existe avec quelques inscrits.
A Loriol-Livron, on trouve le groupe « bloquons tous Livron Loriol la voulte le pouzin !!! »
Le gouvernement agite toute sorte de menaces (retrait de permis, répression) et de contre feux pour que les manifs restent inoffensives (sans blocages), c’est bon signe.
Je vais sans doute participer, en curieux, pour voir ce qui se dit et se passe, et si l’occasion se présente pour inciter à enraciner les colères dans une contestation plus profonde du capitalisme et de sa civilisation totalitaire. J’invite à faire de même.
Même si Macron, sous la pression ou par tactique, décidait de lever certaines taxes, de donner plus d’argent aux plus pauvres pour faire leurs trajets boulot en voiture, le problème de l’exploitation capitaliste quotidienne, du gaspillage et de l’arrogance des plus riches, de la destruction du monde vivant par cette civilisation resterait entier.
Et ce sont les plus pauvres, les classes moyennes, j’en fais parti, qui subissent et subiront en premier la violence du capitalisme et de cette civilisation industrielle totalitaire (dans les conditions de vie de plus en plus dures, les pollutions subies, le travail harassant et insensé, les burn out, les effets mortels des catastrophes climatiques et destructions écologiques).
Donc si on veut vraiment arrêter de se faire arnaquer et de subir ce système aliénant de plus en plus autoritaire, il faut aller beaucoup plus loin dans l’analyse et les cibles.
Au lieu de réclamer quelques miettes à l’état et une chaîne plus longue aux patrons, brisons nos fers, arrêtons la civilisation industrielle et son capitalisme, et construisons d’autres sociétés, réellement solidaires et soutenables.
Mais il faut bien commencer quelque part...
- à Albert, les policiers empêchent des manifestant.e.s d’interpeller Macron
J’adhère assez au post de Nantes Révoltée que je retranscris ci-dessous (voir en bas de pages d’autres articles) :
QUE FAIRE LE 17 NOVEMBRE ?
Début octobre, une jeune femme, Priscilla, lance une pétition contre l’augmentation du prix de l’essence, partant d’un constat simple : « toutes les personnes qui vivent en banlieue ou dans des zones rurales et qui prennent leur voiture tous les jours n’en peuvent plus de ces augmentations ». La pétition se répand comme une traînée de poudre sur les réseaux sociaux, et recueille des centaines de milliers de signatures. Elle devient le moteur d’une journée d’action le 17 novembre. De nombreux internautes appellent alors à faire de cette date un moment de blocage des voies. Parmi les plus influents, deux routiers dont les vidéos sont vues des millions de fois. Et dans un second temps, des récupérateurs d’extrême droite apparaissent, notamment un certain Franck B., militant proche du Front National, qui publie des vidéos relayant l’appel. Les notables d’extrême droite, Le Pen et Dupont Aignan, lui emboîtent le pas. Entre temps, la mobilisation sur facebook pour le 17 novembre a réuni plusieurs centaines de milliers de personnes. Des groupes s’organisent dans chaque ville, avec l’intention de ralentir ou d’arrêter la circulation. Leur slogan ? « Bloquons tout ». Un sondage vient de paraître : « 78% des français soutiennent le mouvement ». Le gouvernement tente déjà d’y répondre dans les médias. Quel que soit l’impact réel de cette journée, elle aura déjà beaucoup plus fait parler d’elle que les jours de grève inutiles, sans perspective ni énergie, décidés par les centrales syndicales depuis deux ans. Tentative d’analyse de cette mobilisation inclassable.
Quelles revendications ?
La revendication première paraît très limitée : la lutte contre l’augmentation du prix du carburant, qui atteint effectivement des sommets ces dernières semaines, à cause de l’augmentation des taxes. Au delà de l’hypocrisie d’un gouvernement qui prétend taxer l’essence pour raisons « écologiques » tout en faisant des cadeaux faramineux aux plus riches et au multinationales qui détruisent la planète, cette revendication pose une question bien réelle. Celle des formes de vies contemporaines. Celle des existences gâchées à passer des heures chaque jour au volant pour aller subir des jobs précaires et inutiles, toujours plus éloignés de nos lieux de vie. Les métropoles s’étendent, le béton dévore le paysage, et de plus en plus de personnes sont contraintes de se loger toujours plus loin, dans des zones péri-urbaines sans âmes, pour des raisons économiques. Les mêmes doivent rouler toujours plus longtemps pour aller rejoindre leurs lieux de travail. Cette France périphérique, éloignée des centre-villes, est celle des perdants de la mondialisation, des perdants de la métropole, des exclus de la gentrification. Celle qui ne peut pas aller au travail en vélo, en transports en commun, voire en taxi. Balayer cette réalité en traitant simplement les organisateurs du 17 novembre de « fachos » est un non-sens et une erreur politique.
Oui, l’appel au 17 novembre est insatisfaisant, mais il part du réel. Il part des conditions objectives d’existence déplorables subies par des millions de personnes. De la même manière, le mouvement contre la loi travail en 2016 était parti du réel, avec des recueils de témoignages en ligne contre la précarité, les humiliations des petits-chefs, les salaires de misère ...
Une initiative d’extrême droite ?
En regardant les groupes facebook d’appel au 17 novembre, on ne peut que constater une grande confusion. Des appels à chanter la Marseillaise côtoient des appels à « refaire Mai 68 ». On y débat pour savoir s’il faut avoir le soutien des policiers, ou au contraire les attaquer. D’autres veulent « élargir les revendications » plutôt que se concentrer sur le prix de l’essence. Ces groupes ne sont pas d’extrême droite, mais il est incontestable que des militants d’extrême droite tentent de faire de l’entrisme sur ces réseaux. On y trouve aussi des syndicalistes, des militants de gauche, voire d’extrême-gauche. Mais pour l’immense majorité, il s’agit d’une France périphérique sans références précises, qui se revendique « apolitique ». A l’image de la situation du pays : instable et atomisé, mais en colère.
Sur le fond, les protestations contre les taxes rappellent effectivement des mouvements réactionnaires, comme celui de Pierre Poujade dans les années 1950, ou plus récemment le mouvement confus des Bonnets Rouges en Bretagne. D’autant plus qu’on trouve aussi bien des travailleurs précaires que des patrons d’entreprise dans ces différents appels : autant de mondes qui n’ont aucun intérêt commun, et qui se retrouvent ligués ensemble contre le prix de l’essence.
Mais si l’on remonte plus loin, les révoltes anti fiscales font aussi écho aux Jacqueries paysannes de l’Ancien Régime, qui ont mené à des situations insurrectionnelles contre les injustices. On a aussi vu ces dernières années en Espagne des refus collectifs de payer les loyers ou les taxes. Dans un climat où le président s’affiche comme un monarque aux goûts luxueux, et crache ouvertement sur la plèbe, ce refus de payer plus de taxes se comprend largement.
En bref, il est difficile de classer ces revendications sur l’échiquier politique traditionnel, même si, redisons le, elles ne sont pas suffisantes pour en faire un véritable mouvement social. Il s’agit pour l’instant d’un agrégat de colères.
« On bloque tout ». Un moyen d’action efficace ?
C’est là le plus important, et aussi le plus douloureux. Nous avons tous constaté l’inefficacité des seules manifestations. Nous savons tous qu’une victoire sociale passe par le blocage de l’économie. Alors que les mouvements sociaux appellent depuis des années à « tout bloquer » sans jamais y parvenir, ni à organiser sérieusement les blocages, le mouvement du 17 novembre lui, a l’air de vouloir se donner les moyens de paralyser les flux.
Les directions syndicales ont fait preuve de leur totale inefficacité alors que les attaques de Macron sont d’une violence sans précédent : tout au plus quelques manifestations minables, isolées, sans volonté d’engager le rapport de force. Les « cortèges de tête » non plus, ne sont pas parvenu à aller au delà des actions spectaculaires et des slogans radicaux. Pendant tout le printemps 2016, nous avons crié « on bloque tout » sans effet. Au printemps 2018, nous n’avons pas été capables de dépasser le calendrier syndical qui nous a mené à l’échec, malgré une multitude de luttes.
En s’organisant sur facebook, le mouvement du 17 novembre a imposé sa propre date, son propre calendrier, avec l’objectif affiché de tout bloquer. Ce mouvement que beaucoup insultent, ou traitent avec mépris, serait-il en passe de réussir ce que les révolutionnaires n’ont pas réussi à mettre en œuvre ? Nous aurons la réponse dans une dizaine de jour.
Que faire ?
Si notre seule réaction face aux dizaines de milliers de personnes qui s’organisent pour bloquer effectivement l’économie, se cantonne à les traiter de fascistes, alors nous avons déjà perdu. Rejoindre sans regard critique cet agrégat de colères n’est pas non plus la solution. Si ces colères confuses n’émergent ni dans les manif classiques, ni dans les cortèges de tête, posons nous les bonnes questions. Les centrales syndicales font échouer toutes les luttes depuis 10 ans, les mouvements radicaux se font isoler par la répression, la propagande, et les logiques d’entre-soi puristes. Comment dépasser ces contradictions ? En organisant des blocages parallèles ? En ciblant des multinationales comme Total ? En allant soutenir ces blocage tout en affichant des revendications anticapitalistes ? La question reste ouverte.
D’autres articles sur le sujet pour nourrir votre réflexion :
- Les contradictions du gouvernement : taxe carbone d’un côté, mesures anti-climat de l’autre
- Essence, gaz, loyers, produits alimentaires, électricité... Ras-le-bol !, pour une mobilisation auto-organisée qui écarte les fachos et les patrons
- Je n’irai pas manifester pour le prix de l’essence, mais essayons de comprendre et proposons des alternatives (Jean Gadrey)
- 17 novembre : quand l’existence précède l’essence. Propositions concrètes pour sortir d’une contradiction (suite du billet précédent de Jean Gadrey)
- En France, comme une envie d’en découdre...
- Tou.te.s dans la rue le 17 contre l’augmentation du prix du cocktail molotov !
- Oui, les voitures polluent terriblement…manifester le 17, entre démagogie et inconscience…
- Pouvoir d’achat : ces impôts toujours plus injustes
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