Gagner ensemble ou tout perdre chacun son tour ?

Crever et survivre chacun pour soi, ou lutter et vivre ensemble ? - Tout monstre a des pieds d’argile

vendredi 7 août 2020, par Auteurs divers.

CHACUN POUR SOI ET TOUS PERDANTS ? ✊

Rêver d’un monde meilleur est essentiel. Seuls ceux qui ne baissent pas les bras réussissent à déplacer des montagnes. Mais si cette soif d’un monde meilleur est précieuse, il reste vital de reconnaître les échecs. Nos échecs. Et la période actuelle comporte malheureusement énormément d’échecs. Peut être parce qu’elle voit de nombreuses luttes surgir, et donc de nombreux espoirs.

Mais depuis plusieurs années, tous les grands mouvements de luttes ont été mis en échec par le pouvoir. Par le système. Que les luttes aient pris des formes totalement pacifiques ou plus offensives, ou des actions spectaculaires et médiatiques, le résultat a toujours été le même : aucune remise en cause profonde du système et du pouvoir.

Sans faire de liste exhaustive, on peut regarder rapidement dans le rétro. Cette liste n’a pas vocation à critiquer ceux qui ont pris part à ces luttes, bien au contraire. Mais à constater une réalité qui n’est clairement pas à notre avantage.

- La lutte pour l’hôpital public : On pensait qu’elle serait forcément victorieuse au vu de l’énorme soutien populaire pendant le confinement. Une colère affichée et criée au balcon pendant plusieurs semaines. Mais une fois déconfinés, le soutien ne s’est pas concrétisé massivement. Une manif importante à Paris avec une répression énorme sur les personnes (dont des soignants) ayant osé imaginer autre chose que la manif sono/merguez proposée par les syndicats. Verdict ? Le pouvoir n’a rien cédé à part des médailles et quelques augmentations marginales. Aucune remise à plat du système et de son financement. Status quo qui nous amènera à de nouveaux drames sanitaires dans les prochaines années.

- La lutte féministe : de #metoo à nous toutes en passant par les collages, une nouvelle (jeune) génération de féministes a émergé en France, avec des mobilisations rassemblant parfois jusqu’à 100 000 personnes. Des actions offensives également, que ce soit lors des Césars ou sur des manifs sauvages. Il y a souvent eu le nombre et la détermination. Verdict ? La société semble toujours aussi sexiste, machiste et la culture du viol a de beaux jours devant elle, y compris dans les palais du pouvoir. Un violeur à l’intérieur, un complice à la justice.

- La lutte antiraciste : avec le tremblement de terre BLM aux US, la France a connu une secousse importante sur les questions de racisme et de violences policières. Le Comité Adama, déjà fortement impliqué et implanté dans les quartiers populaires a réussi un coup magistral en rassemblant des dizaines de milliers de personnes, souvent très jeunes et qui n’avaient jamais manifesté, alors que le préfet avait formellement interdit le rassemblement. S’en est suivi une autre énorme manif à République puis une marche à Beaumont. Mais en focalisant l’attention sur le Comité Adama, le mouvement s’est exposé à des attaques (indignes certes mais prévisibles) sur le cas Adama Traoré. Il a aussi laissé de côté des dizaines de comités de victimes de violences policières et de racisme. Verdict ? Aucune remise en cause du racisme systémique existant dans certaines institutions françaises. Au contraire, le pouvoir campe plus que jamais sur ses positions et donne toute sa confiance à la police.

- Le combat contre la réforme des retraites : clairement en perte d’influence dans les luttes sociales suite aux séquences cortège de tête puis surtout Gilets Jaunes, les syndicats avaient fait du combat contre la réforme des retraites Le combat à ne pas perdre. Malgré un mouvement de grève massif et long, des manifestations très nombreuses et massives (et parfois offensives), le gouvernement n’a rien cédé...Et s’est même autorisé l’utilisation du 49.3 pour passer le texte en force.

- Lutte écolo : comme pour la lutte féministe, le mouvement écolo a vu l’éclosion d’une nouvelle génération, très jeune et déterminée. Le mouvement est mondial. En France, des énormes rassemblements ont eu lieu ces dernières années. D’autres actions plus offensives ont également eu lieu : occupations, blocages, sabotages. Verdict ? Si tous les politiques, et notamment le gouvernement, ne cessent d’user des mots liées à l’écologie, aucune décision réellement structurante n’a été prise ces dernières années pour changer radicalement la donne sur le réchauffement climatique et la préservation du vivant.

- Les Gilets Jaunes : sûrement le mouvement qui nous a donné le plus d’espoir tant il a surgi de nulle part et qu’il a brisé tous les codes des luttes passées. Tant il a été massif, long et déterminé. En un an et demi, plusieurs centaines de rassemblements et d’actions. Des centaines de milliers de personnes mobilisées au moins une fois. Verdict ? L’énorme répression (plusieurs milliers de blessés, tout autant de peines de prison, des dizaines de milliers de GAV et d’amendes) et le temps a réussi à faire perdre la puissance initiale du mouvement. Les questions de justice sociale et de démocratie directe peuvent être tranquillement mises sous le tapis par le pouvoir.

Ce panorama, loin d’être exhaustif, montre à quel point la société a connu des luttes importantes ces derniers mois. Mais il montre aussi que toutes ces luttes n’ont pas fait bouger les lignes de notre société. Le système est toujours le même. Les puissants sont toujours en place.

Pour qu’un changement profond, radical, advienne dans notre société, il faudrait que ceux qui profitent du système actuel ne soient plus ceux qui décident. Et cela ne pourra se faire en douceur. Et cela ne pourra pas se faire « par secteur de lutte ».
La révolution ne sera pas écologique. Elle ne sera pas féministe. Elle ne sera pas anti raciste. Elle ne sera pas sociale. Elle sera tout cela à la fois. Ou ne sera pas.
Rien de nouveau dans ce constat, déjà clamé depuis des années. Le fameux « tous ensemble ou tous perdants » . Il n’empêche, chacun doit désormais se poser la question de son désir ou non de changer profondément le système. Qu’importe sa sphère de lutte, si l’on pense que le problème est systémique, il faut accepter que pour régler le problème, il faudra renverser le système. Et que pour y arriver, il faudra dépasser, de très loin, ses simples affinités militantes. Et pousser au même moment, au même endroit, et tous ensemble.

(post Cerveaux non disponibles)

Gagner ensemble ou tout perdre chacun son tour ?

Remarques

Ce texte est intéressant, mais il pourrait laisser croire que la « voie » serait juste d’être plus nombreux.ses et synchronisé.e.s. Peut-être que les questions à se poser seraient aussi du type :

  • A-t-on les mêmes objectifs ?
  • Ne faut-il pas revoir les modes d’action, les stratégies ?
  • Comment allier les stratégies réformistes avec les stratégies radicales, l’une renforçant l’autre au lieu de s’opposer ?

Il est clair à présent que nous sommes face à un régime policier surarmé, face à un système économique totalitaire extrémiste prêt à tout détruire, et qui est prêt à muer en des formes nouvelles de dictatures et de fascismes.
Même si par endroit ce système « adoucissait » les désastres, ou les différait légèrement, par du « verdissement » capitaliste et un peu de redistribution de richesses, la Machine en place continuerait à détruire le monde vivant, le tissu social et les conditions d’existence, ici et ailleurs.
D’autre part, dès qu’il y a de la résistance, les institutions autoritaires et non-démocratiques en place se durcissent, qu’elles soient étatiques ou privées, aggravent la répression et la surveillance, au lieu de tenir compte de la réalité et des désirs de changements radicaux.

C’est tout ça qu’il faudrait analyser et discuter, pour agir au mieux, faire ce qu’il y a à faire au lieu de se fourvoyer dans des illusions ou de se faire laminer.
D’autant qu’on n’a plus le temps de se perdre ou de se faire écraser.

Le mur en béton à abattre et franchir est immense, épais, sédimenté, il se dresse partout, y compris à l’intérieur de nos têtes.
La méga-Machine avance et se renforce en pompant et détruisant partout le vivant pour le recracher en marchandises de série prêtes à consommer.
Pourtant, tout monstre a des pieds d’argiles, des faiblesses.
Il serait opportun de les chercher activement, de les viser, au lieu de continuer à frapper le béton et l’acier qui se dressent devant nos colères avec nos petits poings nus et nos griffes.
Le monstre préfère qu’on s’en prenne aux élements qu’il a choisi, sur son terrain, là où il se sent le plus fort, alors il nous les offre en pâture, en fait tout un plat.
Il faudrait alors réfléchir davantage, et viser des choses plus pertinentes que ces pièges dérivatifs ?

Pour contourner et démolir les murs et la Machine, pour faire grandir d’autres mondes, il faudrait une alliance entre la folie de l’instant, la mesure et les stratégies élaborées ?

A.


Forum de l’article

  • Gagner ensemble ou tout perdre chacun son tour ? Le 9 août 2020 à 00:44, par Glycine

    Oui : choisir une nouvelle stratégie, qui nous réunisse tous !
    Nous tous qui sommes fatigués de lutter en vain au sein d’un système politique qui ne nous donne aucun pouvoir citoyen.
    Cette stratégie, c’est celle de la démocratie, qui est LE sujet qui a le plus rassemblé pendant les Gilets-Jaunes, avec la question du RIC, reprise par l’ensemble des manifestants partout sur les ronds-points.
    Le thème de la démocratie, la vraie, celle qui donne vraiment le pouvoir au peuple, est un thème très rassembleur.
    Question : comment démocratiser la France ? Réponse : en prenant le contrôle de la Constitution.
    Actuellement, la Constitution est écrite de telle façon que les élus ne la craignent pas, elle les protège une fois élus (on le constate tous les jours), elle ne nous donne aucun pouvoir de contrôle des élus, ni aucun pouvoir de décision, aucun pouvoir non plus de modifier cette Constitution.
    Bref, TOUT est verrouillé.
    Nous devons mettre toutes nos forces dans ce projet de « prise » citoyenne de la Constitution.
    Une opportunité s’offre à nous avec la présidentielle 2022 : pourquoi l’ensemble des démocrates que nous sommes ne présenteraient-ils pas conjointement un candidat à la présidentielle 2022 ? Candidat qui aurait comme SEUL programme la démocratie.
    La colère et l’impuissance ressentie sont telles dans l’opinion actuellement qu’un tel candidat serait très certainement écouté avec grand intérêt...
    Folie, mesure et stratégie !!!

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