BIRMANIE, GRÈCE, MEXIQUE : CONTESTATIONS AUX QUATRE COINS DE LA PLANÈTE
Ces dernières semaines, des mouvements populaires se multiplient dans le monde : pleins pouvoirs à l’armée et la police, sexisme, creusement continu des inégalités, aggravées par la gestion de la crise sanitaire... Les populations se soulèvent unes à unes contre leurs gouvernements.
- Des peuples se soulèvent aux quatre coins du monde
BIRMANIE :
Le coup d’État par l’armée du 1er février est toujours aussi contesté dans les rues birmanes. L’armée prend les pleins pouvoirs, malgré la Constitution de 2008 qui lui donne déjà les ministères de l’intérieur, de la défense et des frontières, et 25% des sièges au Parlement... L’ouverture du pays à l’international, les réformes libérales et la concurrence prive les militaires de leur domination sur tous les pans de la société. Aujourd’hui, le soulèvement des Birman.e.s n’est pas tant pour la libération d’Aung San Suu Kyi, arrêtée le jour du coup d’Etat, ni pour le parti LND (Ligue Nationale pour la Démocratie) élu en novembre dernier, que pour exiger le retrait de l’armée dans les affaires politiques du pays. Malgré la proclamation de la loi martiale le 8 février, les manifestations se poursuivent avec toujours plus d’ampleur. L’armée tire à balles réelles. La repression est sanglante, avec des dizaines de morts. Les arrestations nocturnes ultraviolentes se multiplient. Comme au cours du soulèvement de 1988, l’Etat a libéré des milliers de prisonniers de droit commun pour semer la confusion et effrayer la population, et s’en servir comme prétexte pour une répression sanglante.
Les Birman.e.s s’organisent : ils s’aident d’outils technologiques les plus sécurisés possibles, et construisent des réseaux de solidarité et d’entraide larges. La grève générale ne faiblit pas et paralyse l’économie du pays. Tous les secteurs d’activités sont concernés : agriculteurs, administrations municipales, transports, communications, électricité... L’armée, elle, menace de licenciement chaque fonctionnaire qui ne reprends pas le travail. A Myanmar, les ouvrières du textile en grève sont descendues par milliers dans la rue. Malgré une répression féroce, la révolte est toujours aussi réelle et percutante. Le régime va-t-il tomber ?
- Des peuples se soulèvent aux quatre coins du monde - Protestations courageuses ou basculements profonds ?
GRECE
Les manifestations se poursuivent en Grèce contre la loi qui autorise la présence policière sur les campus universitaires mais aussi contre les violences policières et en soutien aux prisonniers politiques en grève de la faim. Les images d’un jeune homme violemment frappé à terre dimanche dernier par des policiers ont suscité la colère de la population et les manifestations tournant à l’émeute se multiplient. La contestation menace le gouvernement de Mitsotakis élu en 2019 qui, comme de nombreux gouvernements, a joué la carte sécuritaire face à la pandémie, dont le contexte a été pourvoyeur du soulèvement. En effet, la population n’accepte pas que la crise sanitaire serve de prétexte à un contrôle social étendu, avec des pouvoirs de plus en plus importants accordés à la police.
- Des peuples se soulèvent aux quatre coins du monde - Protestations courageuses ou basculements profonds ?
MEXIQUE ET COLOMBIE
La journée des droits des femmes et des personnes sexisées a donné lieu à de violents affrontements en Amérique du Sud. La police a réprimé les manifestations, procédé à de nombreuses arrestations dans deux pays. En Colombie, 2 femmes par jour meurent sous les coups d’un conjoint ou d’un proche. Au Mexique, 10 féminicides sont commis chaque jour.
En Colombie, les manifestantes ont attaqué des établissements commerciaux. Au Mexique, ce sont carrément le palais gouvernemental et celui du pouvoir judiciaire qui ont été assiégés. Des bâtiments publics ainsi que des églises ont également été pris pour cibles. La radicalité du mouvement féministe est la réponse logique à la violence machiste et patriarcale. L’affrontement avec les forces de l’ordre et les symboles de l’Etat est une nécessité pour ces femmes et personnes sexisées qui subissent cette violence meurtrière quotidienne.
Ailleurs dans le monde, au Paraguay, en Afrique du Sud, au Sénégal, en Espagne, en Belgique et ailleurs, les contestations ne cessent de croître contre la précarité, contre les conditions de travail dégradées, pour une santé publique vraiment égalitaire, et pour que les puissants arrêtent de profiter de la crise au détriment des populations qu’ils gouvernent.
Reprenons nos vies en main.
Sources : Yanis Youlountas, AFP, Lundiam, Secours Rouge…
(Un message de Nantes Révoltée)
- Des peuples se soulèvent aux quatre coins du monde - Protestations courageuses ou basculements profonds ?
INDE, la contestation s’étend et rebondit
Inde : les paysans sur le front éléctoral et contre les privatisations - J. Chastaing
La révolution se construit ainsi à travers ces étapes, avant de nouvelles explosions spontanées à un niveau plus élevé, et ainsi de suite.
Alors que des campagnes électorales pour l’élection des parlements et gouvernements se tiennent en mars et avril dans les Etats du Kerala, Bengale Occidental, Tamil Nadu, Assam, Pondichery, des Etats principalement du sud du pays, le soulèvement paysan s’est invité dans les élections en appelant partout à ne pas voter pour le BJP (parti au pouvoir) en organisant meetings et manifestations dans ces Etats. « Punissez le BJP, cassez son arrogance, soutenez le mouvement paysan... vous avez le sort du mouvement paysan et le votre dans vos mains avec votre vote, transformez le vote en une continuation du mouvement paysan... Nous ne nous battons pas que pour les paysans, mais pour tout le pays, pour l’avenir de la jeunesse, pour la démocratie » : voilà ce que disent les leaders paysans.
Par ailleurs les ouvriers de l’aciérie Vizag (33 000 salariés) dans l’Andrha Pradesh qui sont en lutte contre leur privatisation ont appelé à une grève illimitée à partir du 25 mars et ont appelé les paysans à un meeting commun le 28 mars pour construire la lutte ensemble en pensant notamment avec eux bloquer toutes les routes de l’Etat dans la foulée.
Les ouvriers de Vizag avaient déjà entraîné tout l’Etat (50 millions d’habitants) dans une grève générale massivement suivie fin février puis à nouveau dans un mouvement spontané de lutte de trois jours les 8, 9 et 10 mars. Ce n’est pas la première fois que les leaders paysans ont été invités par des ouvriers en lutte pour la radicaliser, par exemple les chauffeurs de bus de Bengalore (qui avaient de ce fait gagné), mais c’est la première fois que cela se fait à cette échelle et surtout autour de la question des privatisations qui concerne toutes les professions, puisque le gouvernement veut tout privatiser de l’Ecole à l’industrie de défense nationale.
Ainsi les banques et assurances font-elles grèves du 15 au 18 mars contre les privatisations suivies par les électriciens les 18 mars, après déjà ceux de la Défense, des mineurs de charbon, les cheminots, les enseignants, etc... les uns derrière les autres. Or le soulèvement paysan a pu commencer un début d’unification en appelant en commun avec les directions syndicales ouvrières à une journée commune de lutte contre toutes les privatisations le 15 mars en occupant ce jour-là les gares en soutien aux cheminots. L’appel à la lutte commune des ouvriers de Vizag pourrait donner une suite à ce combat mais cette fois initié par la base face à des directions syndicales plus que frileuses.
La révolution se construit ainsi à travers ces étapes avant de nouvelles explosions spontanées à un niveau plus élevé, et ainsi de suite.
voir aussi : Inde, Pakistan, Révolution - Inde : contre Modi, la démocratie des paysans, des ouvriers, des femmes, des Dalits !