De quelle écologie veulent les gilets jaunes ?

Quelques pistes pour une transformation écologique de la société

jeudi 25 avril 2019, par Auteurs divers.

Le « Dernier débat avant la fin du monde » , s’est tenu le 24 avril 2019 au Théâtre de l’Échangeur, réunissant plusieurs figures de mouvements écologistes et de gilets jaunes. A cette occasion, une personne a lu un texte rédigé par des gilets jaunes ayant participé à l’écriture de l’Appel pour une convergence écologique de Saint-Nazaire, que nous avons jugé utile de reproduire ci-dessous.

Loin de semer inutilement la division entre écolos et gilets jaunes, ce texte examine les raisons de la séparation actuelle entre les deux mouvements. La critique est rude mais juste : elle vise avant tout une écologie malhonnête, mais dominante, qui voudrait que tout le monde soit également responsable de la catastrophe, et qui ne regarde le populaire qu’avec dégoût.

Le texte donne ensuite quelques pistes sur ce que pourrait être une transformation écologique de la société.

Texte rédigé par des gilets jaunes ayant participé à l’écriture de l’Appel pour une convergence écologique, réunis à Saint Nazaire avec 250 autres délégations lors de l’Assemblée des Assemblées en avril 2019.

Le texte suivant s’appuie sur les discussions ayant eu lieu avec d’autres gilets jaunes de France rencontrés à Saint Nazaire.

Pourquoi les écologistes et les GJ sont-ils toujours séparés ?

Beaucoup de GJ ont participé à des manifestations pour le climat, et ont parfois été très mal reçus. On a pu entendre à plusieurs reprises des « qu’est ce qu’ils font là ? », assez révélateurs du mépris de classe que certains écolos témoignent à notre égard.

Le summum de la dégueulasserie revenant aux organisations de la marche climat bruxelloise du 31 mars, qui n’ont pas hésité à faciliter le travail de la police pour que des manifestants GJ se fassent arrêter (Un article publié sur Grozeille revient plus longuement sur la marche pour le climat du 31 mars à Bruxelles : Les écolos ne doivent plus tourner le dos aux gilets jaunes). Sans doute parce qu’on considérait qu’ils ne se révoltaient pas comme il faut1… Durant les manifestations parisiennes aussi, beaucoup d’entre-nous sentent qu’ils sont tenus à distance du cortège « officiel », qu’on est juste là pour défiler derrière Juliette Binoche et applaudir les discours de Cyril Dion.

Mais nous ne faisons pas partie du même monde qu’eux.

Les écologistes qui glorifient les « petits gestes » et la « cohérence personnelle », qui font la morale à tout le monde en faisant croire qu’il suffirait que chacun se comporte bien pour que le monde aille mieux (par exemple faire ses courses à la Biocoop plutôt que chez Lidl, comme si on avait le choix…) ont exactement le même discours que Macron.

Peuvent-ils nous expliquer pourquoi la moitié de la production mondiale de nourriture est jetée chaque jour à la poubelle ?

C’est bien la preuve que le consommateur n’est d’aucune manière capable d’orienter la société par ce qu’il achèterait, ou n’achèterait pas. Que ce n’est pas la consommation qu’il faut rendre « éthique », que c’est au contraire la production qu’il faut changer

Pourquoi n’entend t-on aucun écologiste poser le problème en ces termes ? Pourquoi posent-ils les questions à l’envers ? Pourquoi n’entend-on jamais prononcer le mot « capitalisme » ?

Car c’est bien ce système capitaliste qui a mis nos vies et l’environnement dans un état catastrophique. Aucune écologie n’est compatible avec cette manière d’organiser la société. L’histoire montre qu’on ne peut pas le « réformer » ni le « moraliser ».

Puisque les gouvernements servent les intérêts des riches, des entreprises capitalistes, avec qui ils forment une seule et même classe, nous ne faisons que perdre notre temps à attendre qu’ils deviennent raisonnables, à élaborer des listes de revendications qu’ils ne liront jamais. Ce ne sont pas des gens avec qui on peut discuter, ce sont nos ennemis. Ils sont en guerre contre nous, et contre la planète.

A quoi ressemblerait une écologie populaire ?

Il faudrait organiser la société à partir des besoins et des envies de la population, qui sont exprimés partout en France dans les assemblées locales que nous mettons en place depuis le mois de novembre. Il faut en créer de nouvelles et renforcer celles qui existent. Décidons ensemble par quoi nous voulons remplacer le capitalisme et quelle vie nous voulons mener.

Pour commencer, tous les besoins humains de base : se nourrir, se loger, se chauffer, se déplacer… devraient être gratuits.

On pourrait produire de l’énergie d’une manière qui soit compatible avec la planète. Il faut décider de tout ça par nous-mêmes, sans partis politiques, sans « organisations » qui se placeraient au dessus de nous et nous diraient quoi faire, quoi désirer.

Pourquoi les écologistes que l’on voit par centaines de milliers dans les marches climat ne nous rejoignent pas sur les ronds points pour en discuter ? Dans les assemblées ? Pourquoi ne les voit-on pas manifester avec nous les samedis, alors que nous nous déplaçons jusqu’à la capitale ?

En province beaucoup d’écolos participent à des blocages organisés par les GJ, mais ils sont encore trop minoritaires. Dans les grandes villes, ils marchent entre eux, avec Juliette Binoche.

Enfin, il faut bien voir l’impasse dans laquelle se trouvent aujourd’hui nos deux mouvements : l’Etat ne cède pas devant les émeutes, mais il ne cède pas non plus devant les pétitions à 2 millions de signatures.

Alors il nous reste une solution si l’on veut vraiment changer cette société : il faut mettre toute la production du pays à l’arrêt, en bloquant des cibles stratégiques, de manière coordonnée sur tout le territoire.

Et à partir de là, reprendre le contrôle de toutes les infrastructures que nous jugerons utiles pour les faire fonctionner d’une manière enfin démocratique, les transformer dans un sens écologique, pour qu’elles servent les besoins de tous, au lieu du portefeuille de quelques uns.

(source : Groseille)


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