La France a peur. La route tue.
Que sont les trente mille morts annuels attribuables à l’amiante, que valent les dizaines de milliers d’infarctus dus au tabagisme ou à la mal-bouffe, que valent-ils face à la route cruelle qui tue chaque année trois mille personnes ?
Le carter brille pour notre sécurité
Sauver des vies. Pour renforcer la sécurité. Voilà l’objectif. Ainsi, depuis mai cette année, plus la moindre trace d’huile sur votre carter ne sera tolérée. Il devra briller. Plus de deux cents points de contrôle supplémentaires ! Et interdiction de rouler si les travaux ne sont pas fait immédiatement.
Pour nombre des plus fragiles, cela signifiera tout simplement devoir abandonner leur véhicule, faute des moyens d’en acheter un moins vétuste. On les condamnera plus encore à la misère. D’autres, par nécessité, conduiront quand même. Ils seront attrapés. Frappés plus durement.
Voici une formation pour des conducteurs en mal de points : on y apprend bien des choses raisonnables et sages, comme de rouler doucement.
Mais on évite de répondre aux questions critiques des stagiaires sur la raison pour laquelle on autorise sur les routes des véhicules hyper puissants capables de d’excéder largement les limitations de vitesse. L’assemblé goguenarde observe les efforts des animateurs pour éluder ces impertinentes questions qui tiennent à à la sécurité, certes, mais surtout à la démocratie.
Des matériaux de plus en plus légers, des voitures de plus en plus lourdes
Les matériaux dont sont construites les automobiles sont de plus en plus légers. Résultats : elles sont de plus en plus lourdes. Une Deuche, c’était 500 kg, de tôle – même pas de carbone.
Pourquoi pénalise-t-on les véhicules anciens, dont la fabrication est amortie depuis des lustres, sobres parce que légers, alors qu’on déclare pastille verte, des SUV et des Crossovers,
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chouchoutés des contrôles techniques, dont les constructeurs fournissent clés en main les logiciels avec la bénédiction de l’administration ?
Qui décide vraiment, et selon quels critères, qu’une ZX diesel de 1990 nuit plus à l’environnement qu’un SUV de deux tonnes flambant neuf, gavés de gadgets connectés, de correcteurs de trajectoire, de cameras de recul, d’aides à la conduite, de vérins et moteurs d’automatismes, qu’il faut produire à grand renfort de pollution, de travail, d’énergie, surpoids qu’il faut ensuite transporter tout au long du cycle de vie du véhicule à grands renforts d’émission de CO2 ?
Frugalité, légèreté, pérennité
Faisons du poids d’une 2CV de tôle des années 1960 - 500 kg - l’étalon fiscal, réglementaire et écologique. Taxons toute la masse excédentaire, plutôt que de favoriser des chars d’assaut high-tech.
Taxons toute la masse attachée au véhicule et non directement nécessaire à la fonction de transport des personnes et leurs bagages.
On engendrerait ainsi un mouvement de recherche vers des véhicules légers et sophistiqués aux performances rapidement étonnantes. Ainsi peut-être pourrait-on susciter une filière économique, d’emploi et de savoir-faire, à la fois locale et globale, high/low-tech, globalement soutenable, socialement avantageuse ?
Pourquoi ne le fait-on pas ?
Parce qu’il n’existe pas de démocratie.
Parce qu’une bêtise encore tout animale nous sert de constitution politique. Nous n’en sortirons qu’en introduisant centralement une dose de tirage au sort. Jusque-là une mesure aussi simple que le contrôle technique ne saura être que le masque du productivisme et de l’inégalité sociale, toutes deux des impasses.